J'ai quitté mon job de bureau pour devenir prof de yoga

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J'ai quitté mon job de bureau pour devenir prof de yoga

« La vie est là, dans l'équilibre et en changeant de vie, je n'étais plus dans l'ambition et les conventions sociales de réussite. »

Après l'obtention de mon baccalauréat j'ai décidé de prendre une année sabbatique. Durant cette année, j'ai pu profiter pleinement de ma première passion, la danse, et partir voyager en terres inconnues. Après ce premier moment de réflexion, j'ai décidé de reprendre pour de bon mes études. J'ai suivi un double cursus de langues et civilisations étrangères d'un côté, et un de sciences politiques de l'autre. En 2010, je suis diplômée d'un master 2 en sciences politiques et suite à un stage de fin d'études dans une agence publique dépendant du ministère de la Jeunesse et des Sports, j'obtiens mon premier poste.

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J'ai ensuite travaillé durant deux ans et demi dans une fondation, puis un an et demi dans le monde associatif et c'est à ce moment-là, en 2014, que j'ai commencé à penser à ma reconversion.

Je travaillais sur des projets passionnants, et j'avais des responsabilités. Je voyageais beaucoup en France, je rencontrais du monde et je ne m'ennuyais jamais. Mais… car il y a parfois un mais, mon corps et mon esprit n'étaient jamais à l'équilibre. J'avais un super job, des supers collègues, mais j'accumulais énormément de fatigue, je tombais souvent malade et, surtout, je n'arrivais pas à déconnecter de mon boulot. Métro, boulot, voyage, smartphone et open space ont eu raison de ma santé. Ces excès ont eu un impact sur ma vie affective et amicale, qui, elle aussi, commençait à se dérégler.

Un jour, mon corps a dit stop, mes jambes m'ont lâchée dans le métro, j'ai fait ce que l'on appelle aujourd'hui un burn-out. Ce n'est pas que je travaillais trop, ce n'est pas que j'étais mal traitée, mais c'était quelque chose d'insidieux qui était rentré en moi. Le fait d'être en permanence connectée me rendait finalement disponible à tout moment. Cela me tenait en éveil et cela m'a fait disjoncter. Surchauffe et arrêt de travail. A 28 ans, je me retrouvais à devoir me poser de vraies questions. Quelles sont mes limites, quel est mon équilibre et surtout qu'est-ce qui donne du sens à ma vie? Ces questions, on n'y répond pas en une heure et on les partage pas sur Facebook. Il faut les traverser pour trouver des réponses.

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Le yoga, que je pratiquais déjà depuis quelques années, et alors devenu un pilier, un soutien. J'aillais à mes cours de yoga plus souvent et de manière différente. J'ai fait du yoga de manière plus subtile avec beaucoup plus de méditation. Je suis partie en retraite pour faire une semaine de méditation zen, en silence : tu ne parles à personne, tu n'as pas de contact et tu as les yeux ouverts devant un mur. C'est dans ce moment-là que j'ai laissé venir à moi les choses qui devaient émerger. J'avais, je pense, des envies de changements depuis longtemps qui n'arrivaient pas à sortir. Et là, tout à coup, j'ai affronté mes peurs et c'est à ce moment-là que j'ai acté que je ne travaillerai plus jamais dans un bureau. Il fallait que mon corps et mon esprit soient actifs presque simultanément, chose presque impossible dans un bureau.

J'ai accepté un boulot dans une association pas trop grande qui m'a permis de trouver un travail à échelle plus humaine pour moi, mais ça ne me suffisait plus. J'ai donc commencer à m'investir de plus en plus dans la pratique du yoga. J'allais à mes cours trois ou quatre fois par semaine, j'ai fait plusieurs retraites dans l'année et j'ai organisé ma vie en fonction du yoga. Je me suis mise des limites dans mon travail et j'ai laissé derrière les objectifs de carrière qui peuvent parasiter l'esprit.

Durant cette période, j'ai décidé de réaliser un de mes rêves, en m'inscrivant dans une école de shiatsu. Le shiatsu est une forme de massage thérapeutique basé sur les principes de la médecine chinoise. Je m'engageais pour 4 ans d'études, mais dès mon premier cours, j'ai su que j'étais à ma place.

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Et puis en mai 2014, après des années et des heures de pratique du yoga sur mon tapis, je suis partie, sur les conseils de mon professeur, en formation à Ibiza pour devenir professeure de yoga certifiée. Il y a différentes types de formation, allant de 5 semaines à 4 ans, j'ai choisi une formation courte et intensive car j'avais déjà mon travail et l'école de shiatsu en parallèle. Ces formations très intenses te donnent de très bonnes bases mais ne sont pas suffisante pour faire de toi un prof de yoga. Tu sais en t'y engageant que tu devras continuer à te former et à pratiquer continuellement. Tu t'engages dans la voie du yoga.

Entre le yoga et le shiatsu, j'avais choisi mes voies. J'étais sur mon chemin.

La vie est là, dans l'équilibre, et je n'étais plus dans l'ambition et les conventions sociales de réussite. Le yoga m'a aidé à trouver l'équilibre et je voulais dorénavant aider les gens en leur donnant des outils pour qu'ils trouvent leur route, qu'ils soient bien.

En juin 2014, je suis donc diplômée et je retourne voir mon prof de yoga à Paris qui me motive à commencer à donner des cours dès le mois de juillet. La machine était lancée et en août je quitte mon travail dans l'associatif.

Pour tout vous dire, je n'ai même pas pensé au fait que je me mettais en danger en montant mon auto-entreprise, en devant me constituer une clientèle, comme si j'étais transportée et transcendée, et j'ai banni de mon esprit toutes les considérations matérielles habituelles.

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J'ai tout de suite donné des cours dans l'école où j'avais moi-même pris des cours. Les six premiers mois ont été difficiles, il y avait certains cours où il y avait seulement une ou deux personnes et puis ça a décollé. A aucun moment je n'ai douté, j'étais remontée à bloc par ce changement. Depuis, c'est une progression lente et constante.

J'ai aussi changé de mode de vie : je sors moins tard, je ne bois pas d'alcool. Je ne dis pas que tout le monde doit faire la même chose mais c'est mon chemin à moi. Je continue de me former, je rencontre différents professeurs.

Alors l'éternelle question, celle qui doit intéresser les lecteurs de VICE Sports, est de savoir si le yoga est un sport. Pour moi, il ne l'est pas du tout, dans le sens ou la pratique physique n'est pas un but en soi dans le yoga. Il n'y a pas d'objectif, pas de performance. Le yoga est une philosophie de l'unité, comment unir mon corps et mon esprit. Il y a dans le yoga une pratique physique intense, mais elle est là pour nous aider à voyager en nous-même. Etre conscient de qui nous sommes, dans le moment présent. Les yogis cherchent l'union et la vitalité, mais dans la conscience du corps tel qu'il est. Le corps change en permanence, qu'on soit jeune ou vieux, enceinte, malade, fatigué, nous ne tentons pas de le dompter, mais de le comprendre. De se fier à lui et à sa propre intelligence. Le travail postural, physique, se nomme "Asana" en sanskrit, mais il n'est jamais utilisé seul, il est couplé à un travail intense sur la respiration, appuyé par la méditation et la concentration. La pratique des asanas, peut être extrêmement lente, méditative, ou au contraire très dynamique. A chacun de choisir le yoga qui lui parle, et surtout celui qui lui fait du bien.

Pour les sportifs, le yoga constitue selon moi une superbe option pour découvrir son corps et ses schémas mentaux, et donc se préparer à son activité. Les yogis sont déjà très nombreux dans des disciplines comme l'escalade ou l'apnée, je sais qu'il arrive même dans les clubs de foot. Alors, pour moi, non le yoga n'est pas un sport, mais le yoga peut sans aucun doute rencontrer le sport…et on parlera ensemble de l'esprit de compétition, que les yogis de reconnaissent pas comme positif ! Ça fera un débat animé mais respectueux.

Propos retranscrits par Louis Dabir.