Pas facile d’être un metalhead en Turquie. La culture conservatrice, les tendances autoritaristes de l’État et le manque de salles de concert tourmentent les scènes DIY du pays, même dans les plus grandes villes. Les rares endroits qui ouvrent leurs portes à ces groupes ont souvent des soundsystems affreux. Heureusement, ces déboires n'ont pas empêché la scène black et death metal underground de s'épanouir.
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La Turquie est sous le contrôle ferme du président Recep Tayyip Erdoğan, dont le parti, AKP, a dirigé le pays pendant une décennie et demie, dominant l'arène politique ; il s’est fait connaître pour sa répression violente de la population kurde du pays et sa détermination à emprisonner les dissidents pour des charges futiles (y compris les membres élus du parlement). Erdogan a annoncé en avril dernier que les élections présidentielles et législatives auront lieu le 24 juin, soit un an et demi avant la date prévue initialement. S'il est à nouveau élu ce week-end, il sera à la tête d’un système présidentiel qui lui permettra d’asseoir encore un peu plus son pouvoir pour les années à venir. Ajoutez à cela la chute rapide de la livre turque cette année, et vous obtenez une atmosphère légèrement apocalyptique – une atmosphère qui se fait beaucoup ressentir au sein de la scène metal underground.
Malgré son gouvernement autoritaire, la Turquie n'est pas le Turkménistan ou la Corée du Nord, et laisse juste assez de liberté et d'espace pour que les scènes underground puissent prospérer. La vitalité de la scène metal underground était particulièrement évidente lors d'un récent festival de deux jours qui s’est tenu à Ankara et a accueilli 14 groupes sur scène. Des centaines de métalleux ont répondu à l’invitation, beaucoup ayant fait le trajet depuis la capitale culturelle, Istanbul. Certains des meilleurs groupes de metal du pays ont livré des performances passionnantes et tonitruantes dans un bar rock en sous-sol, où la scène était bordée d’une rangée de barils propice au stage-diving et au slam. Les groupes présentés ci-dessous n’étaient pas tous présents lors du festival d’Ankara, mais tous comptent parmi les plus importants et excitants de leur génération.
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Bien que les opportunités de jouer soient en effet rares, cela n'a pas empêché les groupes de metal underground turcs de cultiver une scène riche.On doit sans doute la performance la plus brutale du week-end à Engulfed, un quatuor de death metal formé en 2010 à Istanbul. Suite à la sortie de son premier album en 2017, Engulfed in Obscurity, le groupe a fait un concert immanquable qui s’apparentait à une meute de rhinocéros martelant une route poussiéreuse. Le chanteur/bassiste Serkan décrit la musique de son groupe comme « le bruit que vous entendez lorsque vous vous enfoncez dans un tunnel obscur, quand toutes les choses positives de l'univers s’engouffrent dans les ténèbres éternelles, quand vous prenez plaisir à souffrir et quand tout ce qui est sacré est impitoyablement détruit. »Le rythme effréné du groupe est ponctué par des breaks lents et sombres entremêlés de leads intéressants. Selon Serkan, les problèmes de visas sont l'un des principaux inhibiteurs de la scène, puisqu’ils empêchent les groupes turcs de présenter leur musique à l'étranger (les Turcs doivent demander des visas Schengen pour se rendre en Europe – les frais d'inscription sont élevés et les refus arbitraires sont fréquents). Néanmoins, il apprécie les liens étroits qui unissent les membres de la scène. « La scène metal a beau être petite, elle est composée d'amis qui prennent soin les uns des autres », explique Serkan.
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