Manon Piven, jeune skateuse parisienne
Toutes les photos sont de Manon Piven et éditées par Yedihael Canat. 
Life

Dans le quotidien d'une jeune skateuse parisienne

On a filé un appareil photo jetable à Manon Piven pour qu'elle nous montre sa routine, entre soirées et sessions au Palais de Tokyo.

Manon à 25 ans et elle habite à Paris. J’ai découvert son travail il y a quelques semaines sur Instagram. Elle venait de faire une vidéo pour une célèbre marque de chaussures de skate à la semelle gaufrée. Elle fait des photos et des vidéos de ses potes qui skatent dans les rues de Paris avec la particularité de mixer tout au collage. Il fallait qu’on se rencontre pour que j’en apprenne plus sur elle. 

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Pour ce nouvel article de la série La Vie des autres, je lui ai envoyé deux appareils photo jetables. À la réception des boîtiers, on a fini en terrasse à Strasbourg Saint-Denis dans le froid pour discuter. 

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VICE : Salut Manon tu vas bien ? Je viens de recevoir les images que tu as faite cette semaine, tu peux me raconter le quotidien de ces derniers jours ?
Manon Piven :
En ce moment je vis chez ma grand-mère parce que j’ai des galères de travaux dans mon appartement. Je traîne beaucoup avec elle. Sinon je travaille comme assistante caméra, je fais des expos, je vais au cinéma, je sors faire la fête dans les bars. C’est ça mon quotidien type.

J’imagine que tu passes aussi beaucoup de temps dans la rue à skater.
Je me suis fait les ligaments croisés du genou en faisant de la merde en avril donc je peux pas skater pour l’instant. Au Palais de Tokyo j’accompagnais une pote qui allait pisser dans la rue, sur une descente j’ai fait un shove it, je l’ai mis, je l’ai refait et là je suis parti pas comme il faut…. L’opération était en Juin. J’en ai pour neuf mois sans faire de skate. 

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Ah merde. Sinon où est-ce que tu as grandi ?
Je suis née à Paris. J’y ai vécu jusqu’à l’âge de 7 ans et après mes parents ont déménagé au Maroc pendant trois ans. Puis ils ont déménagé en Afrique du sud, à Johannesburg. J’y ai vécu 11 ans jusqu’au bac puis je suis revenue à Paris. Après mon bac j’avais le choix entre rester en Afrique du Sud ou revenir en France pour faire mes études et comme je savais pas du tout ce que je voulais faire je suis revenue en France pour voir quelques écoles et j’ai fait de l’art parce que c’était ce qui me convenait le plus.

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Qu’est ce qui t’a amené à faire du skate ?
À Johannesburg, je trainais avec pas mal de potes qui faisaient du skate mais moi j’en faisais pas du tout, je trainais juste avec des gens qui en faisaient et c’est comme ça que j’ai commencé à baigner dans l’univers du skate. Ça a instinctivement était un kiff pour moi, tout dans le skate me faisait kiffer. J'aimais bien la façon de penser des skateurs, on avait les mêmes délires, la même manière de voir les choses et aussi le fait que ce soit dangereux, que tu te casse la gueule tout le temps, j’aimais le côté cru et casse-cou.

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Du coup la bande de pote qu’on voit sur tes images tu les as rencontrés revenant en France ? 
Ouais, j’ai commencé avec ma pote Emma il y a un peu plus d’un an et demi. Je l’ai rencontrée un peu par hasard au Palais de Tokyo. Elle m’a appris le shove it, le fameux où je me suis fait les ligaments croisés. Elle me poussait à skater et c’est comme ça que j’ai rencontré d’autres meufs dans le skate. Ça a direct accroché, on était toutes les deux trop déter, moi je savais rien faire mais elle me poussait à skater. 

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Vous avez rapidement rejoint d’autre skateurs/euses ?
Au début, commencer avec une meuf c’est un peu le coté sécure, je pense que ça nous rassurait d’être toutes les deux. Il y a aussi la peur du jugement. Dans le skate les gens n’ont pas de filtre. Au final à chaque fois qu’on allait skater on était surtout avec des mecs, on a même souvent été les seules meufs. On a aussi skaté avec quelques assos de filles mais ce n’était pas trop notre délire, c’était cool mais c’était pas notre univers, on voulait faire du skate mais pas de cette manière-là. Maintenant on skate de plus en plus avec des meufs. On est quand même entourées de mecs mais justement c’est cool de pouvoir être mélangés, on s’apprends mutuellement des choses.

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J’ai aussi l’impression que les filles dans le skate sont toutes très motivées, souvent plus que les mecs. 
Je pense qu’on a l’impression qu’on doit se prouver quelque chose. Pendant longtemps on ne se permettait pas de faire ça, maintenant on a envie de prouver que les meufs peuvent aussi bien skater que les mecs. Il y a une certaine pression parce qu’on veut prouver qu’on sait le faire. Mais cette pression elle est positive parce qu’elle nous pousse à skater, se casser la gueule et recommencer. 

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Comment tu as commencé à faire des images ? 
La première fois que j’ai filmé c’était du skate en Afrique du Sud il y a deux ans pour un projet vidéo qui sortait sur Free skate mag. J’avais filmé ça à la super 8. La pellicule ça rend un côté poétique à la chose, il y a quelque chose de plus doux, c’était marrant de mélanger le skate qui est un peu trash au côté granuleux du film 8mm. C’est en arrivant à Paris que j’ai vraiment commencé à faire de la photo et des collages. J’ai du mal à me contenter d’une simple photo, j’ai besoin de découper, dessiner, ajouter du texte, une histoire. Je ne réfléchis pas à mes collages à l’avance c’est instinctif et je travaille très rapidement.  

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C’est quoi Piven ?
Piven c’est un petit personnage que j’ai créé au cours de mes études. Pendant une soirée bourrée avec des potes on se donnait des surnoms, j’ai bafouillé « piven » et c’est resté. Au fur et à mesure c’est devenu mon blase et j’ai commencé à taguer ça avec mes potes. J’ai toujours kiffé les poussins, c’est mon animal totem. J’ai voulu créer un personnage qui me ressemble donc il a des grandes jambes et porte un bonnet. C’est devenu un peu mon identité, c’est le nom que j’utilise quand je fais des trucs artistiques. Quand je fais des vidéos ou des collages je signe toujours Piven. En ce moment je commence à faire des teeshirts avec ce nom-là, je commence à créer une marque, c’est ça mon plus gros projet pour le moment et je m’y mets à fond.

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Sur la première photo que tu as prise, on voit une personne cagoulée qui tient un chat c’est qui ? 
C’est ma grand-mère, Nicole. C’est la personne avec qui je passe la majorité de mon temps, c’est elle qui m’a élevé et qui m’a soutenue dans tout ce que j’ai fait. Elle sait tout, elle connaît tous mes potes. Elle a eu une adolescence tellement différente de la mienne qu’elle vit son adolescence à 85 ans. Je lui ai fait vivre tout et n’importe quoi. Je lui ai fait fumer ses premiers joints, on était toutes les deux pendant des repas de famille. Je l’emmène à des soirées, je la prends en photo, je l’ai faite tourner dans un clip de rap, Je l’ai ramenée à la crémaillère de ma pote Emma dans une grande colloque de 8 personnes, elle a bu des shots avec nous, elle est rentrée à 2h du mat en Y.

Pour la photo j’ai débarqué chez elle je lui ai dit Nanie j’ai 10 minutes, tu mets le kimono, tu mets la cagoule, tu te fais un café et on prend des photos et direct elle était trop contente, elle se réjouit de se plonger dans mon univers. C’est une figure féminine et une source d’inspiration énorme pour moi. C’est mon tout.

Manon est sur Instagram.

Retrouvez les autres épisodes de notre série « La vie des autres ».

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