10 questions que vous avez toujours voulu poser à un narcoleptique

Environ 3 millions de personnes dans le monde souffrent de narcolepsie – une anomalie du cerveau qui cause un endormissement soudain sans vous prévenir. Ses symptômes principaux sont une somnolence journalière excessive, une perte soudaine du contrôle musculaire et une paralysie du sommeil. Personne ne connaît les causes de la narcolepsie, à la grande frustration des personnes atteintes comme Ana Jovanovic – bien que la jeune femme de 21 ans assure que ses épisodes narcoleptiques sont déclenchés par des situations extrêmement stressantes et émotionnelles.

J’ai parlé avec Ana afin d’en savoir plus sur ce que ça fait de vivre en sachant qu’on peut s’endormir à tout moment, et sur ce qu’on ne devrait jamais dire à un narcoleptique.

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VICE : Salut Ana, quand t’es-tu rendu compte que tu souffrais de narcolepsie ?
Ana Jovanovic : Je n’avais jamais entendu parler de la maladie avant mon diagnostic l’an dernier. Avant ça, je m’allongeais simplement dans mon lit toute la journée, incapable de me lever. Mon psychiatre m’a envoyé vers le seul docteur en Serbie qui est spécialisé dans les troubles du sommeil.

À quoi ressemble un épisode et qu’est-ce que ça fait ?
Eh bien, grâce à mes médicaments, je n’expérimente plus les symptômes les plus extrêmes aussi souvent et durement qu’avant. Précédemment, j’étais quasiment incapable de bouger pendant environ une demi-heure. Les gens pensaient que je dormais, mais non – j’étais consciente de tout ce qui se passait autour de moi, je ne pouvais juste ni bouger ni parler.

Est-ce que tu rêves ?
Oui – et de manière saisissante, aussi. La plupart des gens ont du mal à rêver pendant une courte sieste, mais c’est beaucoup plus facile quand on est narcoleptique.

Comment c’était d’être narcoleptique en étant enfant ?
Tout au long du collège et du lycée j’avais besoin de faire une sieste d’une demi-heure chaque jour, ce qui impliquait toujours des rêves très surprenants. On m’avait dit que c’était dû à une pression du sang trop faible, mais maintenant je sais que c’était en fait la narcolepsie.

Quelle était la chose la plus frustrante dans le fait d’être narcoleptique avant que tu aies accès au traitement ?
Avant que je commence à prendre mes médicaments, j’étais très frustrée de ne pas pouvoir rester éveillée en cours et bien sûr que ça puisse m’arriver à n’importe quel moment. Heureusement, c’est beaucoup plus soft maintenant – au lieu d’une demi-heure de paralysie, je me sens juste super fatiguée. De plus, quand je sors, il faut que je surveille mon débit de boisson – mélanger l’alcool avec mes médicaments peut causer des insomnies.

Quand es-tu le plus durement touchée ?
À chaque fois que je sors avec des amis, le sommeil s’approche silencieusement de moi – et avant que je puisse m’en rendre compte, j’ai loupé une partie du concert ou du film, quoi que ce soit. Je me sens toujours extrêmement gênée quand ça arrive et que je suis entourée de mes amis. Bien sûr, ils savent tout à fait ce qui se passe, mais je n’arrive pas à me débarrasser de l’idée que je suis impolie.

As-tu le droit de conduire ?
Je ne suis pas sûre, mais de toutes façons je ne le fais pas. Je sais que certains pays autorisent la conduite aux narcoleptiques, du moment qu’ils peuvent prouver que leur condition est sous surveillance.

Tu prends quel type de médicaments ?
Le Modafinil, le médicament le plus efficace pour ma condition est en réalité indisponible à la vente en Serbie. Il y a six mois j’ai entrepris une démarche pour l’autorisation d’importation, mais elle est toujours en examen. Je pourrais bien l’acheter sur internet mais je ne fais pas trop confiance aux gens qui le vendent 30 euros alors que le prix légal est plutôt autour de 4000 euros. Pendant ce temps, on me prescrit de cachets qui sont de base faits pour soigner les troubles de l’attention.

Quel est le pire effet secondaire de ta condition ?
La narcolepsie peut être déclenchée par un état émotionnel extrême, donc j’ai l’impression que ça me frappe toujours après une grosse dispute ou lorsque je suis extrêmement contente. Du coup j’ai souvent le sentiment de me forcer à arrêter d’être contente juste pour ménager ma narcolepsie.

Comment réagissent les gens lorsque tu leur parles de ta condition ?
Quand j’explique ce que c’est, les gens disent soudain que ça leur fait aussi, ou alors que ça doit être super de pouvoir s’endormir à n’importe quel moment et à n’importe quel endroit. C’est vraiment pénible.

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