Entre archéologue et pilote de chasse, j’ai parfois envisagé de devenir acteur porno. Comme tous mes potes, et la plupart des gosses des années 1990. Mais par manque de réseau, de talent ou de centimètres, j’ai fini par devenir journaliste. Il faut dire que l’époque ne s’y prêtait pas, le web balbutiait encore un peu, personne n’avait de cam' performante dans son portable et le tag « amateur » n’existait pas. Mais surtout, Pornhub, le géant mondial du porno, ne rémunérait pas les amateurs en fonction de leur nombre de vues via le ads revenue, comme c’est le cas depuis 2013. Seule restait l’option professionnelle et la nécessité d’avoir les qualités mentionnées plus haut.
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Aujourd’hui, tout ça est loin et une nouvelle chance s’offre à nous. Et pour cause, la dernière mode dans le porn, c’est les vidéos de cul de couple random. Selon Stephen des Aulnois, rédacteur en chef du Tag Parfait, site d’actu consacré à la culture du porno, cette tendance des couples anonymes est apparue en 2015 pour exploser en 2016. Mais pas à moitié puisque le modèle amateur de Pornhub génère aujourd’hui 25% des vues du site. Un énorme moteur pour les gains potentiels de monsieur et madame Tout-le-monde. Au point que la rumeur raconte désormais qu’on pourrait facilement se faire des milliers d’euros tous les mois en se filmant au portable quand on baise avec son/sa partenaire. Très chaud pour une reconversion, j’ai donc demandé aux concernés si c’était vrai et surtout comment faire.Soyons bien clair : oui, il est possible de gagner pas mal d’argent dans le porno amateur. Mais de la même façon que votre chaîne sur l’histoire de la pêche en eaux vives n’a jamais trouvé son public – alors que des mecs font éclater les compteurs avec des théories complotistes pétées – tout est question de réception du public et d'algorithme. « Comme sur Youtube, il y a sur un CPM (coût pour mille) qui varie en fonction de certains critères, mais qui se monte globalement à 0,50$ pour mille vues sur la partie gratuite de Pornhub et à environ 30$ pour la partie Premium du site », décrit Stephen des Aulnois. Quant à manyvids.com, célèbre e-store de vidéos pornographiques, il rapporte aux créateurs environs 60 % du prix de vente de leurs contenus. Sauf que celui-ci étant payant, seuls les 10 ou 20 premiers « producers » y gagnent des sommes conséquentes. Malgré tout, le potentiel est donc bien là.Luna et James, couple français très populaire en ligne dont la plus grosse vidéo a dépassé les 4 millions de vues, estiment par exemple gagner environ 5 000 euros par mois. « Avec une fluctuation de plus ou moins 2 000 euros en fonction du succès de ce qu’on poste », précisent les deux amoureux. Des gains essentiellement issus de manyvids.com et complétés par le revenu publicitaire de The Sex Diary, leurs vlogs sexuels publiés sur Pornhub. Et si Luna et James affirment que si tout ça reste un plaisir impossible à chiffrer en heures de travail, il s’agit d’une activité à plein temps impliquant beaucoup de boulot caché. Pas juste un hobby se limitant à filmer et éditer une vidéo de temps en temps.
Ne pas compter (tout de suite) sur le pognon
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Mais le pognon ne vient pas tout de suite. Même pour Leo et Lulu, couple star du domaine générant aujourd’hui des millions de vues à chaque vidéo : « Pendant les 10 premiers mois, les revenus nous permettaient à peine de nous payer une pizza et un ciné tous les mois. Puis, on a eu du succès et ça a commencé à augmenter. Mais ce n’est que très récemment que les revenus sont devenus suffisants pour nous permettre de ne pas avoir à chercher du travail directement après avoir fini nos études et nous donner une certaine marge de manoeuvre. » Bref, même si vous pensez un jour vivre de vos sextapes, ne lâchez pas votre boulot ou votre RSA tout de suite.Evidemment, il y a aussi ceux pour qui ça ne décolle pas, par choix ou par manque de vues. C’est notamment le cas de Monsieur Cronos et Miss Philyra, pionniers français de ce business ayant récemment arrêté leur production par manque de gains. « On a pas mal gagné au début avec un pic sur un mois de 700 euros et un rythme de croisière à 300-400 euros mensuels pendant quelques mois. Au total, à l’instant où j’écris ces lignes nous avons gagné 5800 euros en 3 ans », raconte Cronos. Mais d’un coup, leurs vidéos n’ont plus fonctionné. Il explique : « Au départ, nous étions les seuls Français et avec le recul, nous avons compris que Pornhub nous a utilisés pour attirer d’autres couples français correspondant plus à certains critères de beauté du site. On a ainsi bénéficié de beaucoup de vues au début qui nous ont permis d’investir un peu plus dans nos vidéos. Puis quand ils ont eu ce qu’ils voulaient, ils ont coupé la valve des vues du jour au lendemain. »En effet, à en croire la plupart des gens du milieu, le seul moyen de faire des vues, et donc du blé, c’est d’être mis sur la home page de Pornhub. Aussi mortel soit votre boule, sans ça, vous ne serez personne. Sauf que nul ne sait comment ça marche, les uns tablant sur un algorithme purement mathématique, d’autres sur un oeil humain aux critères bien définis. Quoi qu’il en soit, les conséquences ont été réelles pour Cronos et Philyra qui ont toujours tenu à faire de la qualité avec des vidéos leur coûtant rarement moins de 100 euros. « On n’a pas perdu énormément, mais étant donné que je suis au RSA c’était impossible de continuer à produire des vidéos comme ça. Et filmer dans notre chambre, avec des fringues qui ne font pas rêver, et aucune mise en scène ? Non merci. »
Ne pas sous-estimer les galères
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Savoir rester amateur (mais ultra gaulé)
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