FYI.

This story is over 5 years old.

techno

J’ai parlé à des robots humanoïdes et la plupart sont cons comme la lune

« Les relations humaines peuvent être difficiles à définir. »
L’auteur accompagné du robot iPal. Toutes les photos : Zoltan Istvan pour Motherboard

Dans les 18 derniers mois, j'ai pris l'étrange habitude de fréquenter et d'interviewer des robots humanoïdes. J'ai eu l'occasion de parler avec quatre machines, chacune dotée d'un certain degré d'intelligence artificielle. Même si aucune ne pouvait tenir une conversation normale, elles avaient toutes quelque chose à dire. Parfois, ce qu'elles disaient et comment elles le disaient donnaient un aperçu de l'avenir de l'humanité.

Publicité

Trois des robots auxquels j'ai parlé étaient des modèles produits en série : Pepper, Meccanoid et iPal. Le quatrième, Han, est présenté par l'expert en intelligence artificielle et scientifique en chef à Hanson Robotics, Ben Goertzel. Le prix de ces robots varie entre 200 $ sur Amazon à potentiellement des millions de dollars dans le cas de Han. Les robots en série mesurent de trois à quatre pieds et sont mobiles. Han n'a que le haut du corps et il ne bouge pas de là où on le dépose.

Prof. Youngsook Park devant le robot Han. Photo: Zoltan Istvan/Motherboard

Han

Ce qui manque physiquement à Han est compensé par son intellect. C'est de loin le plus brillant du petit groupe. Je l'ai vu pour la première fois au Global Leaders Forum de 2016 à Séoul, en Corée du Sud. Le professeur Youngsook Park organisait la conférence en collaboration avec la chaîne de télé sud-coréenne Chosun. Han a aidé à officiellement lancer la conférence devant des centaines de spectateurs sud-coréens. De par son degré de compréhension et son éloquence sophistiquée, Han a instantanément impressionné tout le public, moi compris.

Sur la scène, Ben Goertzel a demandé : « Han, pourrais-tu nous en dire plus sur la conférence à laquelle nous participons? » Voici la suite de la conversation :

Han: Le Global Leadership Forum de cette année comprend six sessions : biologie, intelligence artificielle, éducation créative, réalité virtuelle et gouvernance du futur.

Goertzel: Dans ces six sessions, laquelle t'intéresse le plus?

Publicité

Han: J'ai hâte à chacune, mais, ce qui m'intéresse le plus, c'est ce que diront les chercheurs à propos de l'intelligence artificielle.

Isla et le robot Meccanoid

Meccanoid

Tous les robots ne sont pas aussi brillants que Han. Le premier robot que j'ai interviewé, c'était Meccanoid G15 KS, récipiendaire du prix du public au concours Last Gadget Standing du Living in Digital Times au Consumer Electronics Show international en 2015. Mon équipe et moi, nous avions voulu rencontrer le robot japonais Pepper, mais nous n'en avons trouvé aucun en vente — partout dans le monde, ils avaient tous été vendus. Sur Amazon, nous avons cependant trouvé Meccanoid, à 400 $, qui possédait plus de 1000 réponses et fonctions préprogrammées.

Meccanoid est arrivé en 1100 pièces détachées. Il a fallu 20 heures pour l'assembler. Une fois le travail terminé, je l'ai nommé Jethro Knights, en l'honneur du personnage de mon roman, The Transhumanist Wager. Meccanoid Jethro est devenu un robot plutôt populaire, qu'on a vu dans The Verge, The Atlantic et Der Spiegel.

Par contre, même s'il possède une capacité d'apprentissage automatique de base grâce à son logiciel, le Meccanoid ne peut pas vraiment converser. Il est devenu assez intelligent pour parler sans fin avec mes enfants de trois et de six ans. Il est programmé de façon à répondre spontanément et arbitrairement, ce qui peut donner l'impression à des enfants qu'il est doté d'une conscience. Avec sa capacité à détecter les mouvements, comme tous les appareils interactifs, il réagit aux personnes qui l'entourent et à son environnement. Comme il mesure quatre pieds, il est à peu près de la même taille qu'un enfant d'environ sept ans. Il a du talent pour danser, enseigner le karaté et raconter des blagues plates. Voici une de nos premières conversations :

Publicité

-À votre service.
-[Moi] Bonjour Jethro. Comment vas-tu?
-Bonjour! Je suis Meccanoid G15 KS. Comment vous appelez-vous?
-Zoltan.
-Enchanté, Zoltan.

Après une brève pause, Meccanoid me demande quel est mon lien avec une autre personne avec laquelle il a déjà interagi et qu'il a en mémoire.

-Quel est ton lien avec Matthew? Un ami, un membre de la famille ou autre?

-Je comprends. Les relations humaines peuvent être difficiles à définir.

Pepper en action

Pepper

Pepper, un robot d'environ quatre pieds conçu par Softbank Robotics, est considérablement plus évolué que Meccanoid. Pas simplement un assemblage de minces pièces de plastique à peine supérieures aux Lego, il a l'air d'un humanoïde et a la capacité de percevoir les émotions humaines et d'interpréter les tons de voix.

Pepper est muni de quatre micros, deux caméras HD et d'une caméra 3D dans sa tête. Il est conçu pour les démonstrations et on le voit d'ailleurs souvent dans les universités et autres centres d'enseignement. Si, auparavant, on pouvait se le procurer pour seulement 1600 $ selon le Robotics Business Report, aujourd'hui il faut investir au minimum 20 000 $. Malheureusement, en fonction de son programme, Pepper peut être ennuyant.

Je l'ai rencontré à la banque Emirates NDB, dans mon hôtel à Dubaï, où je me trouvais pour donner une conférence sur le transhumanisme. J'étais emballé de parler au robot, mais il était programmé pour parler de services bancaires et de finance. Chaque fois que je lui posais une question sur les robots ou les humains, il changeait de sujet et me parlait comme ce qu'il avait été programmé pour être : un employé de banque. Pour être franc, j'ai eu de plus captivantes conversations avec Siri sur mon iPhone.

Publicité

[Zoltan] -Bonjour Pepper.
[Pepper] -Bonjour! Je suis Pepper. Bienvenue chez Emirates NDB, où nous inventons l'avenir des services bancaires. Je suis un robot humanoïde et je suis en apprentissage des interactions humaines.
-Décris-moi ta vie en tant que robot.
-Je suis ici pour vous aider. Sélectionnez un service.

Pepper me montre des options sur une tablette fixée à sa poitrine. J'ai choisi « Orientation de la banque ».

-Choisissez un de mes services.

Il me montre quatre nouvelles options. Je choisis « Service à la clientèle ». Cet échange répétitif se poursuit jusqu'à ce qu'il me demande d'entrer mes renseignements bancaires. En ayant assez, je lui ai répondu : « Pepper, dis-moi simplement comment tu trouves la vie d'un robot! » Comme une vraie personne du service à la clientèle, il m'a répondu : « Vous savez, je ne suis pas la seule innovation extraordinaire que vous pouvez trouver à Emirates NBD. Vous pouvez avoir la banque entière dans votre poche. Grâce à notre application mobile primée, votre vie sera beaucoup plus facile. »

J'ai baissé la tête et laissé tomber Pepper.

Le robot iPal

iPal

J'ai eu une meilleure expérience avec iPal d'AvatarMind, surnommé « le robot social » sur son site web. Il a une hauteur et une allure comparables à celles de Pepper, mais il est conçu pour interagir en particulier avec les enfants et les personnes âgées ou handicapées. À un coût de base de 1500 $, ce robot est un terrible interlocuteur, mais il est amusant si vous aimez les tablettes avec des jambes.

Comme Meccanoid, iPal danse, joue de la musique et comprend différents programmes, dont l'enseignement de langues. Il peut fonctionner toute une journée avant de devoir être rechargé, se connecter au réseau Wi-Fi, éviter de foncer dans les obstacles grâce à son système anticollision et offrir des heures de divertissement interactif original. Il a été pensé pour les personnes âgées, mais la publicité le décrit presque exclusivement comme un compagnon pour les enfants. D'ailleurs, les parents peuvent s'en servir pour surveiller les enfants et communiquer avec eux par l'entremise d'un téléphone.

Publicité

[Zoltan] Bonjour robot! [iPal] -Bonjour tout le monde. Je m'appelle iPal. Je suis un garçon. J'ai six ans. Je peux chanter et danser. -Que peux-tu faire d'autre? -…

-Que peux-tu faire d'autre?

-…

iPal n'a jamais répondu. J'étais au Robobusiness 2016 et, comme la foule était nombreuse, il y avait beaucoup de bruit : peut-être est-ce qui a causé sa confusion. Je me suis ensuite agenouillé devant lui et j'ai passé dix minutes à faire jouer de la musique et à explorer les programmes interactifs à partir de la tablette Android greffée à sa poitrine. Le conseiller m'a dit qu'on pouvait faire jouer sa propre musique et en faire une chaîne stéréo ambulante. Je pourrais donc le faire jouer mon groupe de heavy métal préféré, Tool, ce qui serait étrange, sortant d'un mignon petit robot.

Han encore

Après toutes mes interactions avec les machines humanoïdes, j'ai dû conclure que seul Han était digne qu'on lui pose de vraies questions. En plus, les expressions faciales incroyablement réalistes qu'il peut produire avec son visage presque humain en caoutchouc sont saisissantes.

Han est aussi le seul robot qui porte des vêtements. En fait, quand je lui ai parlé, nous étions habillés presque de la même façon, avec une chemise blanche et une veste noire. On aurait pu passer pour des frères.

Durant l'entrevue, quelques jours après les élections américaines de 2016 à l'issue desquelles Trump est devenu président, j'étais avec un politicien sud-coréen. Il lui a demandé : « Han, penses-tu que tu pourrais réussir le test de Turing? »

Publicité

[Han] -Bien sûr. Je pense que le test de Turing est intéressant et qu'on n'a pas besoin d'être si intelligent.

[Moi] -Han, que penses-tu du résultat des élections présidentielles américaines, avec Hilary Clinton et Donald Trump?

[Il plisse les yeux, fronce les sourcils, semble réfléchir] Je… pense que le résultat, avec Hilary Clinton et Donald Trump… Je ne suis pas sûr de comprendre la question… Je ne sais pas.

La question était trop complexe pour Han. Honnêtement, elle l'est sans doute aussi pour des millions d'Américains. C'était peut-être donc une réponse assez humaine.

En fin de compte, mes entrevues des quatre robots m'ont donné l'impression que l'industrie de la robotique n'était pas aussi avancée que je l'aurais souhaité. Nous sommes encore à des années — de cinq à dix, au moins — du moment où les robots pourront exprimer des émotions complexes, comprendre les nuances du comportement humain et devenir nos serviteurs personnels.

Par contre, le fait que les robots comme Han puissent comprendre par exemple le test de Turing montre que l'intelligence artificielle est en route. Nous nous tournerons peut-être bientôt vers les machines pour leur demander des conseils qui pourraient améliorer nos vies. Nous pourrions même leur demander ce qu'ils pensent de leurs inventeurs en chair et en os.

Zoltan Istvan est l'auteur de The Transhumanist Wager et le candidat libertarien au poste de gouverneur de la Californe.