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Pourquoi nous ne devrions peut-être pas tenter de contacter les extraterrestres

Selon des astronomes de premier plan, une telle démarche est "potentiellement catastrophique".

Pour les astronomes chargés de trouver des traces de vie intelligente dans notre système solaire, l'une des questions les plus épineuses est la suivante : pourquoi les extraterrestres se font-ils si discrets ? Le programme SETI (« Search for Extraterrestrial Intelligence ») a débuté en 1960, quand l'astronome Frank Drake a passé 3 mois à chercher des traces de vie dans le cosmos ; mais au cours des 50 années qui se sont écoulées depuis, les astronomes du programme SETI n'ont trouvé aucune véritable preuve que nous ne sommes pas seuls dans l'Univers.

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Cette absence de résultats est à l'origine de la création d'une branche controversée du programme SETI connue sous le nom de METI (« Messaging to Extraterrestrial Intelligences ») ou d'Active SETI. L'idée, grosso modo, c'est que si les extraterrestres ne font rien pour nous contacter, c'est à nous de tenter de les joindre.

Même si quelques messages ont été émis à travers le cosmos au cours des cinquante dernières années, allant de dessins en 8-bit à l'intégralité des annonces postées sur le site Craigslist, la plupart des institutions qui font partie du programme SETI ne financent pas les projets d'Active SETI. Surtout, en février 2015, quelques éminents chercheurs du SETI ont publié une lettre ouverte détaillant les dangers inhérents à l'existence même de METI, et appelant à un consensus global avant qu'un quelconque message soit émis dans l'espace de la part de la planète Terre.

Les inquiétudes des chercheurs sont fondées : comme l'expliquait un article publié sur arxiv en mai dernier, après examen critique, le projet METI est sans doute plutôt une mauvaise idée, et l'auteur allait même jusqu'à qualifier le projet de « non-scientifique et potentiellement catastrophique. »

Signé John Gertz, président de la Foundation for Investing in Reserach on SETI Science and Technology et directeur du SETI Institute, l'article commence par exposer les principaux arguments en faveur du projet METI. En premier lieu, il y a bien évidemment le fait que tous les autres projets de SETI ont jusqu'ici échoué à trouver des traces de vie ailleurs dans l'Univers, ce qui devrait nous inciter à changer d'approche. Ensuite, il y a le fait que la Terre émet déjà des ondes radio dans l'espace depuis des décennies, dévoilant ainsi potentiellement notre position à des civilisations extraterrestres par inadvertance. Dès lors, selon cet argument, autant faire ça bien.

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Mais Gertz souligne également que ces arguments pro-METI posent plusieurs problèmes. D'abord, nous ne savons rien des civilisations extraterrestres que nous tentons de contacter ; peut-être sommes-nous en train de faire coucou à une race extraterrestre hyper violente et super-intelligente. L'histoire de notre propre planète le montre bien : quand une civilisation technologiquement avancée entre en contact avec une civilisation plus primitive, la seconde est généralement exterminée rapidement. Peut-être vaut-il donc mieux se faire discrets et attendre patiemment.

L'autre argument majeur en faveur du METI, selon lequel nous avons déjà révélé notre position en émettant des ondes radio dans l'espace, a paradoxalement été réfuté par l'astronome en chef du SETI Institute, Seth Shostak, qui ne croit pourtant pas aux dangers du programme METI. Comme Shostak l'a souligné, ces radiotransmissions terrestres sont si faibles qu'il n'y a quasiment aucune chance qu'elles aient pu être détectées par une civilisation extraterrestre.

Une autre question se pose : qui a le droit de s'exprimer au nom de la Terre, et qu'ont-ils le droit de dire ? L'International Academy of Astronautics a défini un protocole interdisant d'envoyer des messages dans l'espace, mais celui-ci n'a pas de valeur légale, ce qui signifie que quiconque ayant accès à un télescope radio peut potentiellement dire n'importe quoi à l'Univers sans craindre d'être poursuivi.

Gertz affirme qu'en raison de nos incertitudes concernant les formes de vie que nous tentons de contacter, des enjeux colossaux d'une telle démarche (l'existence même de l'humanité, tout simplement), et du caractère très aléatoire de la méthode, l'initiative METI demeure « non scientifique et potentiellement catastrophique. »

Pour l'heure, donc, la plupart des astronomes travaillant pour le programme SETI semblent d'accord pour dire que tenter de contacter des extraterrestres est sans doute une très mauvaise idée, même si elle mérite réflexion. Grâce à un afflux récent de donations au projet SETI, Shostak prédit que nous établirons sans doute notre premier contact avec des extraterrestres d'ici 20 ans, et s'il a raison, la question majeure qui se posera à notre génération risque fort d'être la suivante : que leur répondrons-nous ?