Voilà ce qui se passe quand de jeunes punks russes partent en tournée

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Voilà ce qui se passe quand de jeunes punks russes partent en tournée

La photographe et collaboratrice de Gosha Rubchinskiy, Sasha Mademuaselle a suivi quatre groupes de punk russes en tournée dans l'ancien Bloc de l'Est.

Basée à Moscou, la photographe Sasha Mademuaselle a toujours été fascinée par la jeunesse russe, ses passe-temps furieux et son amour pour la musique. Au fil des années, elle est parvenue à capturer l’extase, l’esprit libertaire qui s’échappe de nombreuses fêtes, raves et concerts. Dans son dernier fanzine, elle tourne son objectif vers la scène punk du pays et accompagne cinq groupes russes en tournée en Europe.

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Appelé Боль, ou « Douleur » en russe, le fanzine alterne entre des images qui saisissent l’énergie brute des concerts et des moments plus prosaïques d’un quotidien en tournée. L’ouvrage doit son titre au Bolь festival, lancé par Stepan Kazaryan à Moscou en 2014 et devenu depuis l’épicentre de la scène musicale russe. Un événement qui ne peut pas être uniquement décrit comme un festival rock, tant il englobe aussi le post-punk, la new wave, le grunge, le rap et la musique électronique. Chaque été, il réunit des hordes d’adolescents russes attirés par le bruit, une énergie débridée et un esprit DIY expérimental.

« J’ai rencontré Stepan Kazaryan dans un bar et il m’a dit qu’il organisait une tournée européenne pour cinq groupes. J’ai tout de suite flairé le super sujet et je me suis un peu invitée toute seule, se souvient Sasha. En arrivant dans le bus, je connaissais très peu de gens, et j’avais conscience que j’allais passer dix jours à voyager avec des inconnus plutôt bizarres à première vue. Même avant que l’on quitte Moscou, ils avaient commencé à boire de l’alcool fait maison et à écouter du ZZ Top. Je me suis demandée dans quel bourbier je m’étais engagée. Mais au final, les 25 personnes présentes sur le tour étaient toutes très sympas et très marrantes. À la fin du voyage, j’avais l’impression de revenir d’une colonie de vacances – on a tous été très contents de se retrouver à Moscou plus tard. »

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Sasha a photographié les cinq groupes – Kazuskoma, Spasibo, Electroforez, Glintshake et Shortparis – en tournée à Minsk, Varsovie, Posnan, Berlin et Kaliningrad. Le résultat est un mélange de portraits intimes et dynamiques, de clichés de concerts flous et de moments calmes captés sur la route. Sasha a aussi mis sa discipline au service du romantisme et de la fugacité de la jeunesse. Le fruit d’un processus très drôle et particulièrement réjouissant, se souvient-elle.

« On a bu pendant toute la tournée. Pendant l’organisation, Stepan avait pensé à vendre quelques places dans le bus à des groupies mais tous les groupes ont insisté pour qu’il ne le fasse pas. Comme personne ne me connaissait vraiment, plusieurs mecs ont pensé que j’étais une groupie qui avait acheté des tickets, raconte Sasha en se marrant. Dès le début du voyage j’avais en tête de produire un fanzine. Je voulais montrer les concerts, mais aussi notre vie sur la route. On a passé presque cinq jours dans le bus. »

Sasha Mademuaselle a une capacité incroyable à saisir la jeunesse russe dans ce qu’elle a de plus extatique, pur et libre. Attirée par les communautés jeunes et soudées depuis qu’elle a acheté son premier appareil, à 17 ans, elle a commencé par photographier sa petite ville et ses amis. Depuis, elle a documenté la scène rave russe et les fameuses nuits gebber de Skotoboinya ; a collaboré avec Gosha Rubchinskiy et Tolya Titaev sur un fanzine pour leur marque de skate PACCBET, qui suivait des skateurs russes en voyage en Californie. Les photos de Sasha sont universelles, on s’y reconnaît mais elles offrent également un regard unique sur une Russie qui n’existe que pour ceux qui font partie de cette scène et reste invisible aux yeux des autres.

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« Ce qui m’intéresse en ce moment, c’est d’observer et de documenter la jeunesse, d’essayer de refléter les changements de la société russe à travers eux. J’adore le festival Bolь parce qu’il attire des milliers de jeunes cools, comme le croisement de toutes les facettes d’une génération au même endroit. La plupart sont des adolescents, certains ont 15 ans et tous ont en eux un esprit très libre. J’adore l’idée de révéler ma génération et de continuer à photographier la suivante. J’espère que dans 20 ans je serais en mesure de publier un grand document revenant sur la façon dont nous nous amusions dans les années 2010. »

Pour Sasha, photographie rime aussi avec culture analogue et il était primordial de produire un fanzine imprimé. « C’est un grand pas pour moi. C’est la première fois que je fais un fanzine moi-même, que je le finance seule. Je pense qu’en 2018 les choses qui ont le plus de valeur sont celles qui sont tangibles, celles que l’on peut toucher. »

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Cet article a été initialement publié dans i-D UK.

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