À la rencontre du mec qui veut importer le hooliganisme aux États-Unis

Derek pokazuje svoju SHARP tetovažu.

Les États-Unis ne sont pas exactement la Mecque du hooliganisme. En dehors du livre Among the Thugs du journaliste américain Bill Buford, les premières choses qui nous viennent à l’esprit sont le filmHooligans de Lexi Alexander, et cette fois où des fans de la MLS se sont jeté des sacs-poubelle à la figure à New York.

Mais cela n’a pas empêché Derek « Diablo » Alvarez, qui habite en Floride, de fonder les « Miami Casuals » et de provoquer d’autres groupes sur les réseaux sociaux. Dans sa vidéo la plus célèbre, il apparaît en tenue décontractée, attaquant les ultras de Mitwall avec la phrase suivante : « Vous pensez être les gangsters les plus coriaces du monde, mes frères ? Alors comment ça se fait qu’on ne vous voit jamais à Miami ou en Floride ? »

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Curieusement, Alvarez a réussi à gagner le respect de plusieurs membres de la communauté hooligan britannique grâce à sa passion et son enthousiasme pour la culture des bars et la violence dans le football. Il espère gagner davantage de reconnaissance en organisant une série d’événements liés au hooliganisme, notamment en mettant en place son plan visant à transformer la violence des jours de match en sport de combat et en organisant une émission de cuisine liée à la culture du hooliganisme. J’ai discuté avec lui pour en savoir plus sur ses projets.

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VICE : Bonjour, Derek. Quand avez-vous décidé de devenir hooligan ?
Derek « Diablo » Alvarez : Le mouvement skinhead a eu une très grande influence sur moi. Les skinheads américains étaient l’équivalent des hooligans anglais. Avant, on avait l’habitude de se battre contre les Hammerskins [un groupe de skinheads prônant la suprématie blanche, ndlr]. On allait toujours chez eux, lors de concerts, en groupes, ce qui était, en gros, l’équivalent des hooligans qui se rendaient à des matches à l’extérieur. J’ai aussi connu l’Oi! [un sous-genre du punk] et ses groupes, qui parlaient constamment de la violence liée au foot.

J’ai connu différents styles de vie avant de me décider à vivre de manière décontractée. J’ai aussi été très impliqué dans des gangs de skinheads antiracistes. J’ai fait partie d’un groupe hardcore, le FSU (Friends Stand United). J’ai aussi été président de l’association SHARP en Floride [Skinheads Against Racial Prejudice, ou « Les skinheads contre les préjugés raciaux, ndlr], puis je me suis lancé dans la politique en rejoignant le Parti communiste. J’ai fait partie du mouvement anti-Trump et j’ai participé à la Women’s March (« La marche des femmes »). Ensuite, les néo-féministes ont pris les rênes et m’ont dégagé sous prétexte que j’avais prononcé le mot « putes ». Mais je ne parlais pas de mes camarades de lutte, je parlais des prostituées qu’on voit dans les rues. Je leur ai demandé : « Mais vous allez vraiment m’exclure à cause de ça ? Donc, vous ne voulez pas du soutien des gangsters noirs ou latinos ? Parce que je vous préviens, ils parlent tous comme ça. »

Les États-Unis sont bien plus connus pour leurs guerres de rue entre gangs armés que pour les hooligans qui se battent lors d’événements sportifs. Les hooligans ne vous semblent-ils pas un peu dociles, comparés aux gangs locaux ?
C’est justement ça le truc. Je suis contre l’usage des armes à feu et contre le hooliganisme old school qui consiste à attaquer des bars. Je préfère les bagarres dans la forêt [très populaires dans les pays européens, ndlr]. Selon moi, ce serait l’activité idéale pour les skinheads et les membres de gangs à la retraite : de la camaraderie et des bagarres, mais sans nuire au reste de la société.

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Derek lors d’un événement antifasciste. Photo personnelle de Derek « Diablo » Alvarez.

C’est quoi, l’histoire derrière les Miami Casuals ? Ont-ils vraiment défié d’autres groupes ?
Je suis en contact avec plusieurs centaines de personnes qui ont fait partie de groupes skinheads ou d’autres gangs, et d’autres qui pratiquent les arts martiaux. J’ai lancé un défi de combat à dix contre dix, dans la forêt, mais personne n’a répondu à l’appel.

Y a-t-il d’autres groupes aux États-Unis auxquels vous pourriez vous confronter ?
Aux États-Unis, le hooliganisme est bien plus actif qu’on ne le croit. Il y a eu beaucoup de combats et de coups de couteau.

Qu’en est-il de votre projet de faire du hooliganisme un sport de combat ?
Toutes les personnes à qui j’ai montré des vidéos de combats dans la forêt m’ont dit : « C’est génial. Est-ce que quelqu’un en tire profit ? Tu pourrais être le Dana White [le président de l’UFC, ndlr] de ce concept ! » Pour moi, c’est l’évolution du hooliganisme. Je veux en faire un sport. Les groupes porteraient les couleurs de leur équipe. Mais les gens vont-ils apprécier de voir tout un tas de hooligans à la télé ? Eh bien, en quoi est-ce différent du MMA ? C’est juste du MMA en équipes, après tout.

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Derek en casual. Photo personnelle de Derek.

Et votre émission de cuisine pour hools ? Comment en avez-vous eu l’idée ?
Je suis membre du groupe Facebook « Football Hooligans Banter ». Je ne sais pas si tous les Britanniques font la même chose, mais dans ce groupe, tout le monde poste des photos de ses repas. Quelqu’un m’a dit : « Eh bien, Alvarez ? Pourquoi tu ne nous montres pas ton dîner ? » Je ne voulais pas que ces imbéciles pensent que je me nourris mal, alors j’ai préparé un plat cubain et je l’ai pris en photo. Quand je l’ai posté, les commentaires disaient : « On dirait que tu l’as chié et remis dans l’assiette. » J’ai répliqué : « OK, bande d’idiots. Vous voulez critiquer ma nourriture ? Je vais apprendre à cuisiner comme vous et le faire mieux que vous. D’ailleurs, je vais en faire une émission de cuisine pour hooligans. » Ils ne savaient pas de quoi je parlais, et moi non plus, mais j’ai pensé : « OK. Je vais le faire. »

Enfin, quels sont vos futurs projets liés au hooliganisme ?
Je souhaite créer un groupe anglo-américain pour les matches de la Coupe du monde, histoire de nous venger des Russes et de ce qui s’est passé à Marseille. Les ultras britanniques ont été interdits de voyage et n’ont pas pu se venger à Moscou. Les Américains ont toujours soutenu les Britanniques. Il est de ma responsabilité d’insuffler un nouvel élan au sein de la scène anglaise. Les Britanniques doivent faire comme les Russes, c’est-à-dire arrêter la drogue, l’alcool et le tabac. J’espère vraiment transformer la scène britannique.

Merci, Derek.

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