Culture

L’adolescence de vos artistes préférés ne ressemble pas à la vôtre

Onze Mondial, Philosophie Magazine et L’incroyable : voilà en substance les trois revues que j’évoquerais si j’avais à les hiérarchiser dans mon panthéon personnel. Chacune correspond à l’un de mes âges d’or – l’enfance virginale, l’adolescence formatrice et enfin l’âge adulte flegmatique. Les deux premières ne sont plus à présenter : Thierry Henry et Lilian Laslandes squattaient la une de l’un tandis que l’autre s’adresse depuis 10 ans à ceux qui refusent de lire Derrida et sont convaincus que « ce qui se conçoit bien s’énonce clairement », pour reprendre Boileau.

L’incroyable, en revanche, ne vous dit peut-être pas grand-chose. Cette revue, fondée au printemps 2015, ne compte pour l’instant que deux numéros – l’un sur Juliette Gréco, l’autre sur Jim Shaw, deux noms majeurs de deux époques aujourd’hui révolues. Sauf que L’incroyable se refuse d’être l’hagiographie terminale de deux artistes plus ou moins au crépuscule de leur vie. Non, au fil des dizaines de pages, la revue se penche sur l’adolescence de chacun en mêlant interviews au long cours, digressions artistiques, bande dessinée ou encore poèmes inattendus, tout en ne manquant pas d’évoquer indirectement la société qui les a vus grandir et devenir des adultes – la France post-Seconde Guerre mondiale pour Gréco, l’Amérique des années 1960 pour Shaw.

Videos by VICE

Clotilde Viannay, elle, n’a rien d’une adolescente – du moins en apparence. Cette artiste de 37 ans est la fondatrice et rédactrice en chef de L’incroyable. Adoratrice d’Alan Moore depuis ses tendres années, elle s’inspire de ses passions de jeunesse pour bâtir une revue tout-terrain, qui passe des sectes hippies à l’oïsme – une religion un peu particulière, vu qu’elle ne compte qu’un seul croyant en son sein – sans manquer d’évoquer le parcours de Natasha Vita-More, l’une des pionnières du transhumanisme. J’ai eu la chance d’échanger quelques mots avec Clotilde, ce qui m’a permis de mieux comprendre d’où lui venait cette passion de l’adolescence, là où l’être humain quitte sa carapace malléable pour en acquérir une autre, faite de convictions ancrées.

VICE : Salut Clotilde. Peux-tu me dire quand et pourquoi tu as créé Lincroyable, magazine à destination des adultes mais centré sur ladolescence ?
Clotilde Viannay :
Le premier numéro de la revue L’incroyable est sorti en avril 2015. J’avais ce projet en tête depuis un an mais j’ai mis du temps à le lancer. Il a d’abord fallu convaincre un artiste d’être mon premier invité – en l’occurrence une artiste, car c’est la chanteuse Juliette Gréco qui a accepté ce rôle. Je demande à mon invité de s’investir, de donner de son temps, ce qui n’est pas toujours évident. De plus, à l’époque, je n’avais pas vraiment de références éditoriales pour me présenter. Lorsqu’après notre entrevue dans sa chambre d’hôtel parisienne Juliette Gréco m’a dit oui, je n’en revenais pas.

Avant Juliette Gréco, le dessinateur Charles Burns avait dans un premier temps accepté. Il paraissait enthousiaste, mais ça ne s’est pas fait – pour des questions de temps, justement. Mais je ne désespère pas de le convaincre un jour ! J’ai lu que Matt Groening aurait appelé son personnage des Simpson Charles Montgomery Burns en hommage à lui. Ils étaient bons copains à l’école, ça donne envie d’en savoir plus.

Moi aussi j’ai gardé ma bande d’amis du lycée, que je vois régulièrement. Ce sont mes amis les plus proches. Ils connaissent mes travers et ne se font aucune illusion sur le fait que je change un jour. Il y a un côté rassurant là-dedans. Je crois que c’est en grande partie eux qui m’ont donné envie de créer cette revue autour du thème de l’adolescence. Je les aime beaucoup. 

Tes amis d’enfance ont joué un rôle, tout comme ton amour ancien pour la B.D., non ?
Tout à fait – ça remonte même à avant L’incroyable. Il y a quelques années, j’ai créé un faux numéro du New York Times datant de 1985, que j’ai autoédité pour une exposition au palais de Tokyo. J’avais demandé à des écrivains, journalistes, historiens, critiques d’art, économistes, spécialistes sportifs et j’en passe d’écrire un article uchronique, avec comme postulat de départ l’existence sur Terre du Dr Manhattan, le super-héros du comic book The Watchmen d’Alan Moore.

Pour ceux qui ne connaissent pas cette bande dessinée, l’aventure se passe à New York en 1985 et se présente comme une uchronie de l’histoire américaine des années 1980. L’existence du Dr Manhattan – un homme omniscient et omnipotent depuis un accident nucléaire – change l’histoire telle que nous la connaissons. Les États-Unis ont gagné la guerre du Vietnam et Richard Nixon est toujours au pouvoir. L’apocalypse est imminente, les New-Yorkais sont nerveux, la violence monte dans les rues, les mouvements contestataires se font nombreux : féministes, antinucléaires et fanatiques de l’apocalypse participent à cette hystérie collective. Des justiciers masqués décatis tentent d’exister dans un monde qui ne croit pas en eux. Alan Moore est fort pour créer des personnages touchants – ils sont parfois psychopathes, parfois réactionnaires, dépressifs et impuissants, mais ce sont justement ces défauts qui les rendent si humains.

L’adolescence de Juliette Gréco commence en 1944, lorsque Paris est libéré. Les historiens disent que sa génération est la « première » génération d’adolescents. Ce sont les premiers à avoir dit non aux règles de la société et de leurs parents.

Les textes et les images – j’avais également invité des artistes, des illustrateurs et des photographes – qui ont été créés à l’occasion de ce New York Times fictif sont géniaux. Celui-ci se lit comme un recueil illustré de nouvelles d’anticipation. La variété des sujets traités, l’imagination des auteurs et la drôlerie de certaines fictions valent le détour. Je pense notamment à celle de l’écrivain de science-fiction Jacques Barbéri, qui a imaginé les Soviétiques tentant de fabriquer leur propre Dr Manhattan – de couleur rouge celui-ci, le Dr Manhattan d’Alan Moore étant bleu. Pour ce faire, ils auraient bombardé des volontaires russes à la matière atomique. Comme l’expérience foire à chaque fois, leurs corps sont carbonisés et transformés en des sortes de créatures en steak haché à deux neurones qui glissent sur le sol de la salle d’expérience tels des vers de terre.

Cette première expérience éditoriale m’a donné envie de continuer à faire des livres. L’Incroyable s’inscrit dans la même logique que mon faux NYT. J’ai simplement remplacé l’histoire des Watchmen par celle d’artistes dont j’admire l’œuvre et la pensée. Ces artistes ont grandi à une époque qui nous permet de mieux comprendre notre monde contemporain. L’invité, sa pratique et l’époque au cœur de laquelle il a grandi deviennent des outils critiques pour réfléchir au passé mais également au présent – exactement comme l’histoire des Watchmen le permet.

Tu précisais au micro de France Culture être une « adolescente attardée ». En quoi cela jouetil un rôle dans Lincroyable ?
J’ai dit ça moi ? Mince, je pensais qu’il l’avait coupé ! À vrai dire, mon adolescence a été plutôt normale, bien éloignée des jeunesses romanesques de Juliette Gréco et Jim Shaw. Je n’étais pas particulièrement bonne élève, ce qui m’a causé quelques désagréments avec mes professeurs et mes parents.

Sinon, j’avais pas mal d’amis. Nous passions notre vie au bar en face du lycée à jouer au flipper ou attablés autour d’un café pour cinq parce que nous étions toujours à sec. Le propriétaire nous détestait. Voilà, c’était ça mon adolescence.

OK, je vois. Sinon, comment choisistu les artistes que tu fais figurer en une ?
Je les choisis avant tout parce que j’aime leur travail. Il faut ensuite que leur adolescence et l’époque dans laquelle ils ont grandi aient eu une influence forte sur leur œuvre – ce qui est le cas pour Juliette Gréco et Jim Shaw.

L’adolescence de Juliette Gréco commence en 1944, lorsque Paris est libéré. Les historiens disent que sa génération est la « première » génération d’adolescents. Ce sont les premiers à avoir dit non aux règles de la société et de leurs parents. Avant la Libération, Juliette Gréco est passée brutalement de l’enfance au monde adulte lorsqu’en sortant de la prison de Fresnes – où elle avait été emprisonnée avec sa sœur par la Gestapo – elle s’est retrouvée livrée à elle-même. Elle est partie rejoindre son ancienne professeure de français à Saint-Germain-des-Prés. Cette femme va s’occuper d’elle comme une seconde mère. Sa sœur et sa mère seront des rescapées de Ravensbrück.

Il faut bien comprendre qu’à ce moment-là, les plus grands intellectuels français et internationaux vivent dans un périmètre de 0,282 km² – j’ai regardé sur Wikipédia pour la superficie. Les meilleurs amis de Juliette Gréco sont Marguerite Duras, Jean-Paul Sartre, Simone de Beauvoir, Boris Vian, Maurice Merleau-Ponty, Jacques Prévert, Jean Cocteau, André Breton. Miles Davis est son amant. Elle dîne avec Orson Welles.

Après la guerre, Juliette Gréco vit enfin son adolescence. Les héros de ce premier numéro de L’Incroyable ont entre quinze et vingt ans. On les appelle les existentialistes, les zazous, les troglodytes, les rats de cave. Ils faisaient tout dans les caves de Saint-Germain : danser, boire, fumer, discuter, dormir. Le reste du temps ils vivaient dans les cafés. C’est comme ça que Juliette décrit l’époque.

Il faut bien comprendre qu’à ce moment-là, les plus grands intellectuels français et internationaux vivent dans un périmètre de 0,282 km² – j’ai regardé sur Wikipédia pour la superficie. Les meilleurs amis de Juliette Gréco sont Marguerite Duras, Jean-Paul Sartre, Simone de Beauvoir, Boris Vian, Maurice Merleau-Ponty, Jacques Prévert, Jean Cocteau, André Breton. Miles Davis est son amant. Elle dîne avec Orson Welles. Il y a tous les lettristes, encore quelques surréalistes. Yves Montant et Joseph Kosma ne sont pas connus, ce sont encore des gamins. Mis à part Sartre et Beauvoir et quelques autres de la génération du dessus, ils sont tous très jeunes.

Ce qui les unit, c’est leur décision de quitter leur famille pour rejoindre Saint-Germain. Après les horreurs de la guerre, les règles de la bonne bourgeoisie française n’ont plus de sens à leurs yeux. Ils ont besoin d’art et de philosophie pour redonner du sens à leur existence.

Ils étaient tous pauvres. Ils vivaient à plusieurs dans des petites chambres, dans des hôtels miteux du quartier. Chaque fin de mois, comme ils n’avaient pas d’argent, ils sortaient de l’hôtel à quatre pattes avec tous leurs vêtements superposés sur leur corps. Un jeu incessant du chat et de la souris existait entre eux et les patrons des hôtels, qui les recherchaient dans tout Saint-Germain pour qu’ils honorent leur dette. C’était ça, Saint-Germain. La vie était difficile mais ils devaient bien se marrer.

Portrait de Jim Shaw dans son atelier à Los Angeles par Mathilde Agius pour L’Incroyable © Mathilde Agius

S’il est évident que Juliette Gréco incarne à merveille cette époque charnière, peux-tu m’expliquer en quoi Jim Shaw est représentatif des profonds bouleversements des années 1960 ? J’imagine quà travers son histoire, tu as voulu évoquer un récit bien plus large, non ?
Oui, tu as tout à fait raison. La jeunesse de Jim Shaw est un tout autre univers que celui de Juliette Gréco, mais il est tout aussi passionnant. Son œuvre et cette jeunesse qui l’inspire sont une fenêtre sur les États-Unis, sa culture et ses dérives sectaires également. Ce numéro est proche de plein de façons de l’univers des Watchmen. La guerre du Vietnam est en toile de fond. 

Jim Shaw s’intéresse aux religieux fanatiques chrétiens qui vivent en attendant l’apocalypse prochaine, le moment où Dieu rappellera à lui ses enfants – the Left Behind, les survivants de l’apocalypse. Les pécheurs, quant à eux, resteront sur la Terre, qui deviendra le purgatoire des infidèles. Il y a une série américaine géniale de Damon Lindelof et Tom Perrotta sur ce sujet, The Leftovers, que je conseille vivement ! Elle est méga glauque mais vraiment super. Le préambule de départ est que tout à coup 2% de la population mondiale disparaît – des bébés, des enfants, des hommes et des femmes. Personne n’est capable d’expliquer ce phénomène paranormal et la société doit se reconfigurer. C’est complètement délirant ! J’aurais adoré avoir cette idée de scénario. C’est un terrain fictionnel et d’analyse des mondes sans limite ! Il faudrait que je demande à Jim Shaw s’il connait cette série, elle lui ressemble tellement et il est un grand fan de séries TV.

Jim Shaw s’intéresse aux laissés-pour-compte du déclin industriel de l’Amérique qui trouvent du réconfort auprès des Églises évangélistes, comme les anciens ouvriers des usines automobiles du Michigan délaissés par les syndicats et les partis politiques de gauche.

Cette obsession de l’apocalypse m’intrigue, tout comme la manière dont fonctionne le cerveau des gens qui vivent avec la crainte de ce qui parait être l’une des pires angoisses possible. Imaginez vivre au quotidien avec un telle peur… Cela n’est pas humain. Le cerveau est obligé de disjoncter. Il cherche alors des ennemis pour incarner cette peur qui n’a pas de matérialité car elle n’est que le fruit du fantasme. Dans cette catégorie, il y a les complotistes, les religieux fanatiques, les psychopathes, les paranoïaques…  Ou au contraire certains flippés de l’apocalypse, qui développent une empathie extrême pour le Monde, à tel point que seule la religion est capable de s’y mesurer. Je les appelle les illuminés. Je ne parle pas des croyants du dimanche mais des illuminés qui sont capables de se mettre en transe absolue par amour pour un Dieu. C’est de ça dont parle Jim Shaw dans son projet My Mirage, à travers le parcours initiatique d’un jeune Américain dans l’utopie psychédélique de sa jeunesse puis dans les milieux évangélistes, où il renoue avec son éducation religieuse d’enfance pour renaître chrétien (born-again). Jim Shaw s’intéresse aux laissés-pour-compte du déclin industriel de l’Amérique qui trouvent du réconfort auprès des Églises évangélistes, comme les anciens ouvriers des usines automobiles du Michigan délaissés par les syndicats et les partis politiques de gauche.

La religion semble être un sujet de prédilection pour Shaw.
Tout à fait. Jim Shaw se questionne sur le gros business de la religion aux USA, auquel participent les magnats gourous mais également les politiciens, les communicants, la télévision (Fox News par exemple). Dollars, drapeau et Bible, les trois poisons de l’Amérique selon Jim Shaw. 

Une partie des Américains vit avec cette peur constante de la fin du monde, de la chute de l’Empire américain alors ils s’arment, cherchent des ennemis et votent Donald Trump. Un énorme business s’est construit autour de cette peur. C’est délirant quand on y pense. Jim Shaw a été le jeune spectateur de tout ça et a construit petit à petit une œuvre monumentale et époustouflante sur cette histoire fucked up de l’Amérique. Il est lui-même un peu fou mais il est génial !

Portrait de Jim Shaw dans son atelier à Los Angeles par Mathilde Agius pour L’Incroyable © Mathilde Agius

Jim Shaw est aujourd’hui célébré pour ses contributions artistiques. Peux-tu m’en dire plus sur le milieu qui l’a vu naître ?
En fait, tout commence par son groupe de protopunk, Destroy All Monsters, qu’il a créé avec ses amis Mike Kelley, Cary Loren et Niagara quand ils étudiaient à l’école d’arts du Michigan. Après le Michigan, il a pris la direction de la Californie pour étudier à CalArts, la célèbre école d’arts basée dans la banlieue de Los Angeles. Là-bas, il a rencontré Tony Oursler, Sue Williams, Christopher Williams, John Miller, James Casebere et Ericka Beckman – pour ne parler que d’eux. Il finira par côtoyer Kim Gordon, Dan Graham ou encore Tony Conrad – à savoir toute la scène musicale de Los Angeles et de New York de ces années 1970 et 1980.

Toutes ces bandes d’amis sont cultes. Ils ont influencé de nombreuses pratiques artistiques de ma génération. J’aurais tant de choses à raconter, tant d’anecdotes incroyables à relater… Là encore – à l’image de ce qu’a vécu Juliette Gréco – la liste des artistes qui se sont rencontrés à cette époque est étourdissante. Lors de son entretien avec Yves-Alexandre Jaquier, Tony Oursler expliquait à quel point il avait été chanceux de compter parmi ses amis autant de personnalités brillantes. Je le comprends.

Jim Shaw, Stellaktite and Stalagmite, 2011, 18 dessins à l’encre sur planche de comic, 61 × 51 cm (encadré) (chacun) © Jim Shaw & galerie Praz-Delavallade.

Les artistes que tu cites ont eu recours à différents supports tout au long de leur carrière : de la photo au dessin en passant par la peinture, ou la musique. Dans L’incroyable, tu as également recours à de nombreux supports. J’imagine que c’est lié ?
Disons que je m’intéresse à tous ces modes d’expression. Mes invités sont eux aussi pluridisciplinaires. Juliette Gréco chante, danse, joue la comédie. Jim Shaw peint, sculpte, dessine, chante et danse très bien.

De manière logique, les deux puisent leur œuvre dans de nombreux supports différents. Juliette Gréco a lu beaucoup de philosophie, de poésie et de littérature – comme je te l’ai dit, elle était amie avec Jean-Paul Sartre, Marguerite Duras, Boris Vian, Orson Welles. Jim est un puits de science et un collectionneur compulsif. Il s’intéresse à la musique des années 1930 aux années 1980, c’est un passionné d’illustration, de bande dessinée, de peinture. Il connaît plein de choses savantes tout en ne délaissant pas la culture populaire ou encore la contre-culture.

Ma revue s’inscrit dans cette logique d’échanges entre les artistes, de connaissances diverses qui sont partagées entre eux. Je trouve ça plus riche. De plus, cela fait le lien avec mes amis qui participent à la revue – qui viennent eux aussi d’horizons divers.

Et comment arrivestu à rendre le tout « homogène » ? Construis-tu un numéro en suivant ton intuition ou respectestu un procédé strict  ?
J’aimerais bien être scrupuleuse dans la structure de chaque numéro mais j’en suis incapable ! Cette revue est le résultat d’une mauvaise élève à l’école. La pensée n’est nullement universitaire. L’Incroyable n’est pas le fruit d’une recherche scientifique. C’est pour cette raison qu’il est important qu’elle reste revue.

Même si je passe de longs mois à étudier l’oeuvre et l’époque de la jeunesse de l’artiste, les choix éditoriaux restent subjectifs. Ils sont le fruit de l’interprétation que je me fais du travail et de la jeunesse de l’artiste, de ce que j’ai décidé de mettre en lumière et de mes possibilités. Il y a également un décalage générationnel et culturel qui crée une distance supplémentaire. Mais je décortique longuement et me documente. Ensuite, la participation de spécialistes permet d’apporter des connaissances savantes sur des sujets qui éclairent certains pans de la vie de l’invité. Et puis il y a les nombreux entretiens. Ce sont essentiellement l’invité, ses amis et quelques acteurs de l’époque qui racontent l’histoire. Ces entretiens sont longs, avec volontairement peu de coupes au moment de leur retranscription. Il arrive parfois que les protagonistes de ces discussions s’écartent du sujet initial mais cela ne me dérange pas, bien au contraire. Parler de la jeunesse est aussi une manière d’aborder nombreux sujets divers et variés, une sorte de flânerie intellectuel qui raconte, il me semble, beaucoup de l’œuvre et de son artiste. C’est ce que je revendique tout du moins. Après, parfois, il y a des loupés – mais comme dans toute entreprise finalement.

Je vois. Merci beaucoup, Clotilde.

Vous pouvez commander L’incroyable par ici.

Suivez Romain sur Twitter.