Comment je suis devenu supporter du FC Metz grâce à Cyrille Pouget

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PP Flingueurs

Comment je suis devenu supporter du FC Metz grâce à Cyrille Pouget

La Lorraine, une couleur source d'identification, Carlo Molinari, Cyrille Pouget et d'autres joueurs pas si pétés que ça. Il nous raconte son amour pour le club messin.

Groucho Marx disait que « le meilleur moyen de s'endormir, c'est de penser que c'est le moment de se réveiller ». Pour mes potes, regarder un match du FC Metz s'avère être tout aussi efficace. Souvent, dans les discussions de fin de soirée, dans une Opel Corsa déchirée par le temps, sur le parking d'un fast-food américain, on refait le monde du ballon rond. On parle de Lionel Messi, de l'équipe de France avec ou sans Benzema, du niveau de la Ligue 1 ou des derniers propos de José Mourinho. Mais c'est plus fort que moi, comme un aimant tourné vers Saint-Symphorien, il faut toujours que je place « on a battu le Barça 4-1 », « Nenad Jestrovic était un grand attaquant » ou « Joël Müller était un fin tacticien » dans la discussion, ce qui fait toujours doucement rire mes amis qui ne voient pas trop le rapport avec leur football.

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À tous ces gens qui ont défendu Dorothée à la grande époque, qui ont voté Ségolène Royal, et qui répètent à longueur de journée que Raymond Domenech nous a quand même emmené en finale de la Coupe du monde, vous me comprendrez. Le coeur n'est pas réglable et il nous ordonne souvent quoi penser.

On peut avoir la personnalité que l'on veut, on ne se détache jamais des racines familiales, même avec la meilleure volonté du monde. Le football et l'amour que j'ai pour ce club sont le résultat d'une identité encore dictée aujourd'hui par la suprématie de l'enfance. Il est d'ailleurs souvent comparable à nos idées politiques, forgées par les débats du dimanche midi qui tournent souvent mal. A moins d'un duel Le Pen/Juppé au second tour de la présidentielle, je ne voterai jamais à droite.

Emmanuel Adebayor et Mamadou Niang fêtent la remontée en Ligue 1, à l'issue de la saison 2002-2003.

Tout à réellement commencé en 1994. Mon père travaillait pour Sollac, en Moselle, un groupe de sidérurgie mondial plus connu aujourd'hui sous le nom d'Arcelor Mittal qui était aussi le sponsor principal et historique du club de Charles « Carlo » Molinari. Alors je ne sais pas si ce lien entre mon père, son employeur et le club de ma région ont vraiment eu un rapport de cause à effet, mais un jour, du haut de mes huit petites années, sur le terrain de foot juste derrière chez moi, j'ai décidé de me prendre pour Cyrille Pouget. Et le grenat fut ma couleur préférée.

C'était la grande époque, celle d'un Kastendeuch entourant la plus belle jeunesse du pays. Rigobert Song, Jocelyn Blanchard, Robert Pirès côtoyant des mecs qui avaient des gueules de bout de comptoir : Pascal Pierre, Frédéric Arpinon ou Philippe Gaillot. Pourtant, ces mecs n'avaient rien à envier aux joueurs de la grande Serie A de l'époque. L'alchimie n'avait jamais autant portée la Lorraine de cette façon. Chaque moment était culte, et nous étions tous conscients de cela. Et quand ce même Cyrille Pouget marqua le penalty de la victoire en finale de la Coupe de la Ligue face aux Lyonnais du jeune président Aulas, c'est là que tout s'est réellement déclenché. C'était ma première grande joie footbalistique, celle où j'ai fini par pleurer dans les bras de mon père. Et ça n'allait pas être la dernière.

Arthur Rimbaud avait loué le football comme une leçon permanente de vie et il est vrai que cette fusion m'a permis de tourner ma terre un peu plus rapidement que les autres. Quand j'apprenais la joie émotive, j'apprenais aussi la déception et le pouvoir de l'argent. Cyrille Pouget, encore lui, aux portes de l'équipe de France, a choisi de s'exiler en Suisse, au Servette de Genève. J'apprenais aussi la force de l'impensable, quand les Finlandais d'Helsinki, perçus comme des amateurs, éliminaient les Grenats, vice-champion de France, au tour préliminaire de la Ligue des champions.

J'apprenais les trahisons : Andrès Mendoza qui signe au club, puis quelques jours plus tard à Marseille, les coups bas, les petites magouilles (l'affaire du faux passeport de Faryd Mondragon), les désillusions (la descente en Ligue 2 en 2002 après 35 saisons consécutives passées dans l'élite, puis le National en 2012), l'ambition personnelle au gré du collectif (Bisous Ribéry), mais aussi de la vraie fidélité, moi qui trompait ma petite amie avec sa cousine et refusait d'enfiler même pour rire un maillot strasbourgeois. Des valeurs, de l'unité, dans les discours d'Albert Cartier, de la reconnaissance (Greg Proment je t'aime), et des choix de vie (Vladan Lukic qui quitte le club pour s'engager dans l'armée serbe pour faire face aux bombardements de l'OTAN au Kosovo). Alors à la question « Comment je suis devenu supporter du FC Metz ? » je n'ai pas vraiment de réponse. J'ai instinctivement suivi l'odeur de la ville, de ma région, en transformant les usines et le passé minier dans une tribune ouest pleine de vie et d'ambition.

Et Albert Cartier a raison quand il dit ceci : « Les gens qui vivent ici n'aiment ni la publicité, ni la lumière. On préfère davantage éclairer que briller. Les supporters étaient surtout en quête de considération. Nos ancêtres grattaient le sol dans les mines pour extraire le charbon, le minerai à plus de 1 000 mètres de profondeur. Ici, on gratte le ballon dans les pieds de l'adversaire. Les valeurs du département rejoignent celles qui prévalent sur la pelouse. On prône la générosité, l'impact physique, la dimension athlétique, le travail, la souffrance. L'équipe plaît non pas pour son talent mais pour son implication ».

Il semble résumer ce que je pense être devenu au dépend des moqueries et d'un business de plus en plus probant, que je réfute par une dérision permanente. À tout cela je n'ajoute qu'une seule chose. Ce qu'il y a de mal avec l'est de la France c'est qu'il n'est pas assez souvent au sud, pour le reste, permettait moi de dire que je l'aime.