Cet article a été initialement publié sur VICE Espagne.
Peu de coupes de cheveux sont aussi controversées que le mulet, qui a atteint le sommet de sa popularité sur les scènes rock et punk des années 1970 et 1980. Depuis, il est montré du doigt, moqué, ridiculisé.
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Pourtant, le mulet renait aujourd’hui de ses cendres, en particulier dans la mode et au sein de la communauté queer. Nous avons rencontré ceux qui osent avoir les cheveux courts devant, et longs derrière.
Ricardo León, 24 ans, étudiant
VICE : Salut Ricardo. Pourquoi portes-tu la coupe mulet ?
Ricardo : Parce que j’aime ce style, et j’aime les années 1990.
Qu’est-ce que le mulet signifie pour toi ?
Pas grand-chose, en réalité. C’est une coupe de cheveux comme les autres, point. Ce n’est pas comme si je me sentais soudainement libre et accompli à chaque fois que je sens une mèche de cheveux dans la nuque.
Comment vis-tu le fait que la plupart des gens trouvent cette coupe ridicule ?
C’est dommage que tant de gens réagissent aussi mal au mulet. Certaines personnes me manquent directement de respect, d’autres se contentent de me fixer ou de rire dans mon dos. Tout cela m’a fait comprendre que les gens passent leur temps à se juger les uns les autres. Et peu importe ce que je porte, ce que je dis ou la façon dont je me comporte – je serai toujours vu comme un voyou par certaines personnes. En dehors de l’Espagne, les gens trouvent que je ressemble à Pablo Escobar.
Angela Huete, 21 ans, styliste
VICE : Salut Angela, y a-t-il une raison spécifique pour laquelle tu as décidé de te faire un mulet ?
Angela : Pas vraiment, pour être honnête. Je n’ai pas vraiment réfléchi avant de le faire.
Penses-tu que cela joue un rôle dans la façon dont les gens te perçoivent ?
Ça dépend de la situation. Le mulet peut vous donner un air sexy, mais dès que vous enfilez un jogging, vous ressemblez plutôt à une canaille de 12 ans.
À ton avis, le mulet te rend-il plus féminine, ou te donne-t-il un air de garçon manqué ?
Le genre est un concept qui n’existe plus vraiment aujourd’hui. Mais si l’on se réfère aux stéréotypes traditionnels, à savoir des femmes avec des cheveux longs et des hommes avec des cheveux courts, alors, dans ce cas, j’ai l’air d’une femme de dos et d’un homme de face.
Alverd Gual-Cibera, 26 ans, musicien
VICE : Salut, Alverd. Penses-tu que les gens portent le mulet de manière ironique ?
Alverd : Eh bien, je fais partie de ces gens-là. Je trouve ce genre de réappropriation culturelle très intéressant, il s’agit d’une forme d’émancipation. C’est aussi une forme de radicalisme – un moyen pour moi de préserver mon côté punk. J’aime le fait que cette coupe brouille les distinctions de genre – ça me convient parfaitement.
Les gens réagissent-ils différemment à cause de tes cheveux ?
Oui, on m’a déjà demandé si j’essayais de ressembler à une femme. C’est la même chose pour les femmes qui portent le mulet, étant donné qu’il est généralement considéré comme une coupe d’homme.
Ça te dérange que les gens le perçoivent comme ça ?
C’est juste que ces stéréotypes sont stupides. Mais grâce à moi, certaines personnes ont changé de point de vue sur cette coupe de cheveux et sur les stéréotypes qui lui sont associés, et ça, ça fait du bien.
Ahida Agirre, 29 ans, créatrice de mode
VICE : Salut, Ahida. Comment t’es-tu retrouvée avec un mulet ?
Ahida : Un jour, j’ai eu envie de changer de look, et j’ai opté pour le mulet.
Penses-tu qu’il est temps pour la société de changer de point de vue sur le mulet ?
Absolument. Du point de vue historique, des hommes et des femmes issus de différents mouvements culturels ont porté le mulet, et il est agréable de voir que de plus en plus de jeunes se l’approprient. Beaucoup d’enfants en Espagne le portent aujourd’hui, en particulier à Bilbao.
C’est vrai, le mulet revient doucement, mais sûrement. Penses-tu qu’il rompt avec les canons de beauté traditionnels ?
Oui. J’aime la façon dont le mulet joue avec les normes de genre, et je serais très heureuse de le voir revenir pour de bon, qu’il ne soit pas seulement un effet de mode. Je me lasse très rapidement des nouvelles tendances – je préfère les choses qui perdurent dans le temps.