Fermés définitivement ou temporairement à cause du Covid, ces légendaires clubs belges et leurs soirées sans fin nous manquent terriblement. La série NIGHTS TO REMEMBER nous en rappelle de bons souvenirs, principalement flous.
Le Club Vaag a ouvert ses portes en 2015 dans le cadre du triptyque « The Shop » sur le Rijnkaai à Anvers. Les amateur·ices de house et de techno pouvaient y trouver leur compte tous les week-ends, du moins avant que le Covid-19 n’y mette un terme. Le sous-sol du Rijnkaai peut facilement accueillir 300 personnes, mais on peut souvent en trouver une centaine de plus de plus dès 23 heures.
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VICE a demandé aux habitué·es et au personnel du Club Vaag leurs meilleures anecdotes et les moments les plus mémorables vécus dans ce club, où même les non-fumeur·ses vont zoner dans le fumoir.
Lotte (32 ans), une habituée
« Il y a une soirée au Club Vaag que je n’oublierai jamais. Mes copines m’y avaient traînée parce qu’elles étaient folles à l’idée qu’Yves De Ruyter allait jouer ce soir-là. En entrant dans le club, j’ai immédiatement fait une sorte de crise d’épilepsie à cause des lights. Pendant que je dansais, il y avait un garçon à côté de moi et je me demandais s’il était beau gosse. J’ai demandé à mes amies mais elles n’avaient pas l’air vraiment sûres non plus. Elles étaient en train de spéculer pendant que j’attendais le bon flash de lumière pour pouvoir démasquer son visage. Le mec s’est avéré être beau garçon et quelques heures plus tard, j’avais la confirmation qu’il embrassait bien et que ses deux amis étaient pas mal non plus. À trois heures, le beau gosse a dit qu’ils rentraient chez eux. Il m’a demandé si je voulais les rejoindre à leur appart. Comme j’étais partante mais que j’étais la plus jeune de mon groupe, il a dû passer devant toutes mes copines pour qu’elles vérifient si on pouvait lui faire confiance. L’une d’entre elles m’a obligée à partager ma localisation en direct sur mon téléphone portable.
Les trois mecs avaient loué un loft Airbnb au bord de l’Escaut. À sept heures du matin, mes amies avaient décidé de venir vérifier si tout allait bien. Après avoir passé une demi-heure à appuyer sur la sonnette et à m’appeler sur mon portable, qui était tombé à plat entre-temps, elles ont décidé d’essayer de m’appeler depuis le côté rue. J’entendais crier “Lotteeeeeeee !”. Depuis le balcon, je pouvais voir un groupe de femmes qui m’acclamaient, alors que je mangeais un morceau de pizza en lingerie. Bien sûr, les filles sont montées. Les trois gars ont commencé à jouer de la musique folklorique israélienne. L’un d’entre eux a également essayé d’embrasser la plus âgée du groupe. Elle a répondu sèchement : “Non non, on va pas faire ça, tu pourrais être mon fils.” Après avoir remis ma salopette en cuir, avoir été portée en l’air sur une chaise et avoir bien rigolé, j’ai dit au revoir aux filles. Moi, je suis restée. Alors que j’étais allongée dans la chambre avec le gars que j’avais embrassé en premier, un deuxième beau gosse m’a rejoint. Ce matin-là, j’ai fait mon premier plan à trois israélien. »
Lars (29 ans), technicien lumière
« J’ai commencé en 2015 en tant que technicien light au Club Vaag. Ces quatre ou cinq dernières années, j’y suis allé tous les week-ends. Bien sûr, tu gardes beaucoup d’histoires sur ces folles soirées. Je me souviens très bien de la nuit où le dj britannique WAFF est venu jouer. Au moment où il est entré dans le dj-booth, il m’a dit qu’il n’avait pas bu depuis trois mois. Les dj’s techno britanniques sont connu·es pour prendre leur pied à fond. Comme les choses avaient dégénéré une fois, il avait décidé de ne plus boire pendant un moment. Il n’y avait pas beaucoup de monde ce soir-là et je pouvais voir qu’il s’amusait. J’ai secrètement placé deux shots de tequila derrière lui. Deux bouteilles de tequila plus tard, il était complètement assommé. Le lendemain, il a appelé Sam, le gérant du Club Vaag, pour lui dire que j’avais gâché sa journée.
« J’étais en train d’ arranger la lumière et j’ai soudain vu deux hommes devant moi en train de se tailler une pipe, en plein public. »
Je repense aussi souvent à la fois où une soirée gay avait été organisée au Club Vaag. J’étais en train d’ arranger la lumière et j’ai soudain vu deux hommes devant moi en train de se tailler une pipe, en plein public. Ils se tenaient dans un coin à côté de l’entrée des toilettes, et comme je devais regarder directement l’écran de mon ordinateur portable, ils continuaient à le faire dans mon champ de vision. L’organisateur avait prévu des machines à fumée supplémentaires et je devais constamment souffler de la fumée dans la salle. L’idée derrière cette soirée, c’était que ce genre de choses soient possibles, mais après un moment, je leur ai gentiment demandé de continuer leur activité dans les toilettes.
Les personnes qui gèrent le Club Vaag sont comme une famille pour moi. J’ai même tatoué sur mon bras le tampon de l’entrée. J’ai rencontré ma fiancée au club et je lui ai même demandé de m’épouser lors de la fête annuelle du personnel. »
Sam (31 ans), manager
« Le Club Vaag est un club assez petit, il ne peut accueillir que 500 personnes grand max. C’est pour ça que c’est un lieu de rencontre où tout le monde se connaît, et les gens connaissent aussi le personnel. Ça crée un sentiment de communauté.
Je me souviens encore parfaitement de l’un des meilleurs moments que j’ai passés au Club Vaag. Il y a un an ou deux, un homme en fauteuil roulant se tenait à la porte. Il avait les jambes paralysées et notre bâtiment n’est pas adapté aux fauteuils roulants. C’est un ancien bâtiment de réparation de bateaux et le club est au sous-sol. Comme ce type voulait vraiment entrer et faire la teuf, on a décidé de l’aider. On lui a fait comprendre que les toilettes se trouvaient au-dessus du sous-sol, et que ce serait donc très difficile. On l’a laissé entrer gratuitement et on l’a porté jusqu’en bas. On lui a également donné le numéro de portable d’un membre du personnel qu’il pouvait appeler si nécessaire.
Il a dit qu’il ne resterait qu’une heure, que c’était déjà super car il a rarement l’occasion de faire ça. On lui a mis un verre et… on n’a plus du tout entendu parler de lui. Après quelques heures, je me suis inquiété et j’ai décidé de partir à sa recherche. L’homme était toujours à l’intérieur du club et d’autres clients l’avaient même porté jusqu’aux toilettes à l’étage, puis ramené en bas. Je n’oublierai jamais cette scène ; cet homme était si heureux. Quatre ou cinq heures plus tard, il est rentré chez lui et m’a dit qu’il avait passé la meilleure soirée de sa vie. Les gens qui ne le connaissaient pas s’occupaient spontanément de lui. Ça symbolise pour moi le lien fort qu’on a les un·es avec les autres dans le club. »
Kenneth (27 ans), portier
« Le Club Vaag m’a vraiment façonné en tant que personne. Parce que j’y suis d’abord venu en tant qu’habitué, puis j’ai commencé à y travailler en tant que portier, et ma mentalité a changé. J’ai appris à accepter les gens comme ils sont. Que vous soyez fan de house ou de R&B, à la fin d’une soirée ou d’une après-midi de fête, tout le monde sort de la même manière et tout le monde s’aime de la même façon.
« Pendant le week-end des Antwerp 10 Miles, on a dû fermer plus tôt pour éviter que des centaines de clubbers ne se retrouvent ivres sur la course à 7h du matin. Mais la foule n’était pas de cet avis. »
Pendant le week-end des Antwerp 10 Miles, le club a dû fermer en raison d’un problème d’autorisation. Le dimanche matin à cinq heures, la police était à la porte pour nous dire qu’on devait fermer immédiatement car la course était sur le point de commencer. Pour s’assurer que des centaines de clubbers ne se retrouvent pas ivres sur la course à sept heures du matin, on a obéi à la demande. Mais la foule n’était pas de cet avis. Pendant environ 15 minutes, 300 ou 400 client·es ont scandé “On en veut encore !”, alors que la musique était déjà éteinte. Les gens n’avaient pas envie de donner le coup d’envoi, c’était génial.
Au cours de mes sept années passées au Club Vaag, j’ai connu trois ou quatre directions différentes, mais ce qui n’a pas changé, c’est que le club est toujours resté accessible à tou·tes. Les client·es viennent et se promènent derrière le dj booth ou dans les backstages. Même si les gens viennent au club à cinq ou six heures du matin, ils sont toujours autorisés à entrer. Bien sûr, la billetterie est fermée depuis longtemps, mais ça n’a pas vraiment d’importance dans au Vaag. Le contraste entre les gens est énorme, mais on ne voit jamais de bagarres. Ça peut sembler très cliché, mais au Club Vaag, tout n’est qu’amour et paix. »
Arne (23 ans), bartender
« Lorsque je suis entré dans au Club Vaag pour la première fois, j’ai immédiatement su que je voulais y travailler. Après avoir envoyé mon CV trois fois, j’ai finalement obtenu un emploi grâce au bouche-à-oreille. J’ai grandi dans le Limbourg et il n’y avait jamais grand-chose à faire là-bas. Quand je suis venu à Anvers pour étudier, j’ai atterri dans cette Mecque de la techno qu’est le Club Vaag. Mon genre musical préféré m’a fait tomber amoureux de l’endroit immédiatement. Tous les gens qui viennent ici sont là pour la même raison : être ensemble tous les soirs. Le sentiment qu’on ressent quand on est là, c’est incroyable.
« Comme le Club Vaag est situé dans un sous-sol, près de l’Escaut, il arrivait que l’endroit soit inondé. Une fois, on est arrivé·es deux heures avant l’ouverture du club, dans un sous-sol qui ressemblait plutôt à une piscine. »
Lors d’une de mes soirées au Club Vaag, j’ai rencontré des personnes qui étaient en fait mes voisins. Quand on l’a découvert, on est devenus très proches. Aujourd’hui, on est toujours aussi proches, j’ai trouvé des amis pour la vie.
Je repense souvent à tous ces visages et ces jambes qui dansent, mais il y a surtout une équipe qui fait tout pour que tout le monde puisse passer une bonne soirée. Comme le Club Vaag est situé dans un sous-sol, près de l’Escaut, il arrivait que l’endroit soit inondé. Une fois, on est arrivé·es deux heures avant l’ouverture du club, dans un sous-sol qui ressemblait plutôt à une piscine. On a brossé et dégagé l’eau de toutes nos forces. Le personnel du Vaag n’a fait qu’un pour défendre son club et est revenu chaque soir pour offrir aux client·es une expérience inoubliable. »
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