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D’où vient la mode des sex-toys mignons aux couleurs pastel ?

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Si vous avez eu l’occasion d’entrer dans un sex-shop dans les années 2000 ou au début des années 2010, vous vous souvenez sans doute des couleurs criardes, des combis en latex et des dildos aux doux noms comme « Big Daddy Destroyer ». À l’époque, le sexe se vendait derrière des rideaux à paillettes et était strictement genré. Les sex-toys avaient la réputation d’être sordides, pornographiques et déconseillés aux âmes sensibles.

Ces dernières années, on a assisté à un changement progressif mais notable, notamment en ce qui concerne l’aspect des sex-toys, mais aussi leur marketing et leur cible. L’époque des menottes en fourrure et des lapins en silicone rose fluo est révolue. Les incontournables d’aujourd’hui sont discrets, de couleur neutre et rappellent les ustensiles de cuisine scandinaves. Ce ne sont plus des sex-toys, mais des « accessoires de bien-être intime », classés quelque part entre les huiles de CBD et les cristaux de guérison.

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Ce changement semble avoir rendu les sex-toys beaucoup plus « acceptables » aux yeux du grand public. Vers 2018, le géant du prêt-à-porter Urban Outfitters a commencé à proposer les produits d’Unbound, une marque américaine qui fabrique des sex-toys marrants aux couleurs acidulées (on imagine difficilement H&M vendant des perles anales à l’époque). Faites un tour sur l’e-shop d’Urban Outfitters aujourd’hui et vous verrez qu’ils vendent désormais des « Smile Makers », des vibromasseurs aux noms ringards, aux couleurs pastel, avec un smiley imprimé sur le côté – les mêmes que vous pouvez trouver chez Monoprix.

Urban Outfitters a simplement sauté sur une tendance naissante. Des marques comme Y Spot, Vush, Dame et Foria vendent des produits du même genre depuis quelques années. Des produits mats et pastel qui passent bien sur Instagram à côté d’un bouquin et d’un verre de kombucha. « Le bien-être sexuel pour les filles », dit le slogan de Vush. S’il n’y avait pas le mot « sexuel », on pourrait croire qu’il s’agit d’une nouvelle gamme de soins Glossier.

Adult PR, une agence de relations publiques spécialisée dans l’industrie pour adultes, dit avoir constaté un « énorme changement » en matière de marketing des sex-toys. « Avant, les marques voulaient vendre les jouets les plus gros, les plus brillants et franchement les plus effrayants du monde », explique Sarah Ryland, directrice de l’agence. Bien que ces jouets aient encore leur place, dit-elle, « les marques ont compris que cela limite leurs ventes car ce n’est pas assez inclusif, dans le sens où ça s’adresse à certains fétichistes, plutôt qu’à un consommateur ordinaire. »

Ryland fait remarquer que les godes, par exemple, ressemblent davantage à des objets « ordinaires » aujourd’hui, simplement parce que le plaisir féminin s’est normalisé. « Les sex-toys sont de plus en plus considérés comme un élément essentiel du bien-être, plutôt que comme un plaisir coupable. La stratégie marketing a dû s’adapter à cette évolution, explique-t-elle. Aujourd’hui, si vous comparez le logo de votre marque de maquillage préférée avec celui d’une nouvelle marque de sex-toys, vous ne verrez pas beaucoup de différence. Ce rebranding en tant que produits de santé et de bien-être attire le grand public et transforme le sex-toy en un objet du quotidien. »

Biz Sherbert, spécialiste de la culture chez The Digital Fairy, une agence de marketing spécialisée dans les tendances de la jeunesse, convient que l’image de marque des sex-toys a évolué en même temps que notre vision du plaisir sexuel.

« L’idée de “bien-être intime” brise le cliché selon lequel les sex-toys doivent être cachés sous le lit ou dans un tiroir poussiéreux, dit-elle. Les sex-toys sont désormais commercialisés comme faisant partie d’une routine de bien-être, comme le yoga ou le soin des cheveux, ce qui signifie qu’ils ont le potentiel de vous aider à vous détendre, à être plus productif et plus attentif. »

Le look minimaliste des sex-toys les plus récents, ajoute Sherbert, peut également être attribué à des tendances culturelles plus larges. « Les premiers sex-toys étaient souvent visuellement agressifs, avec un mélange de paillettes et de rose fluo, explique-t-elle. Cette nouvelle génération a l’air beaucoup plus artistique et se marie bien avec ce qui est tendance ailleurs dans la mode et le design. »

« Les formes douces et organiques ont le vent en poupe, poursuit-elle, en partie parce qu’elles rendent bien sur les réseaux sociaux. De plus, l’aspect pastel de ces nouveaux sex-toys est stratégiquement conçu pour être mignon sans être infantilisant, ce qui peut rendre la masturbation moins taboue, intimidante ou routinière. »

Cette évolution de l’image de marque est en grande partie positive. La nouvelle vague de sex-toys semble faite pour la génération Z : elle est respectueuse du sexe et des corps, fabriquée à partir de matériaux éthiques et souvent plus neutre en termes de genre que les décennies précédentes. (Beaucoup de ces marques, comme Dame, par exemple, évitent d’utiliser un langage genré dans leur marketing, avec des couleurs et des designs qui sont souvent perçus comme ni féminins ni masculins).

Mais pour les plus pervers d’entre nous, l’idée de « bien-être intime » peut sembler un peu aseptisée. Le plaisir des femmes et des genres marginalisés est-il devenu moins tabou, ou les marques font-elles simplement preuve de plus de pudeur ? Ne pouvons-nous pas avoir des designs excentriques et obscènes qui sont également neutres en termes de genre et fabriqués de manière éthique ? Le sexe n’a pas besoin d’être commercialisé comme un acte coupable ou honteux, mais doit-il être positionné comme un acte presque médical, juste à côté des soins de la peau ou de la santé intestinale ?

Si le marché des sex-toys pour femmes, personnes non binaires et queer a évolué, celui des sex-toys pour hommes cis hétérosexuels semble connaître une crise d’identité. Personne ne veut revenir à l’époque de l’humour American Pie et des concours de t-shirts mouillés. Mais si le plaisir masculin hétérosexuel ne ressemble pas à ce qu’il était dans les années 1990 et 2000, alors à quoi ressemble-t-il ? Bien sûr, les tendances sexuelles comme le pegging seront peut-être un peu moins taboues dans les années 2020, mais ce n’est pas comme si nous allions voir Urban Outfitters vendre de jolis Fleshlights de sitôt.

Sherbert pense qu’un changement de marque n’est pas nécessaire, étant donné que le plaisir masculin a historiquement été mis en avant. « Le plaisir sexuel des hommes cis hétérosexuels n’a pas besoin d’un design ergonomique remis au goût du jour, car il n’est pas considéré comme tabou dans la société, explique-t-elle. Il n’y a pas besoin que les Fleshlights apparaissent dans des endroits inattendus, comme les rayons des boutiques Urban Outfitters, car il n’y a pas besoin de faire pencher la balance dans l’autre sens. »

Les sex-toys, comme tout autre produit, évoluent avec la culture. Si la mode et le design prennent un virage sauvage et criard, alors nos sextoys le feront aussi. Pour l’instant, les godes et les vibromasseurs restent élégants et adaptés à Instagram. Et à mesure que les idées sur le sexe, la technologie, le plaisir et le genre évoluent au sein de la conscience collective, il en sera de même pour les sex-toys.

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