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Plus que Zéro

Oui aux punk rockers californiens qui ne viennent pas de Californie

Un après-midi de 1999, j'ai vu les mecs de Blink-182 répondre à une présentatrice MTV qui leur demandait quel était le message de leur musique.

Maxime est notre senior editor. Son enfance en montagne lui a transmis un sens de l’éthique et de l’honnêteté sans pareille ; aujourd’hui, ça fait 26 ans qu’il n’a jamais cessé d’être sympa. Dans Plus que zéro, il donnera tous les quinze jours un avis positif sur les trucs que vous détestez. Ici : les punk rockers californiens qui ne sont pas originaires de Californie.

Un après-midi de 1999, alors âgé de 13 ans, j'ai entendu les mecs de Blink-182 répondre à une présentatrice de MTV qui leur demandait quel était le message de leur musique : « Have fun. Have fun all the time. Have fun naked. »

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Ce statement était de loin la chose la plus sensée que j'avais jamais entendue de ma vie et je pense que c'est à ce moment-là que j'ai décrété que la Californie était de loin le meilleur endroit de la planète. Apparemment, je n'étais pas le seul puisqu’une bonne partie des lycéens du reste du monde était du même avis que moi. Ces endroits désolés de l’Occident ont donné naissance à des groupes à guitares dont les références culturelles se situaient quelque part entre Tony Hawk’s Pro Skater et American Pie.

J'imagine que, comme moi, ces enfants de la classe moyenne avaient de quoi se payer une imitation de Stratocaster et un ampli 20 watts, mais pas un vol à destination de l’aéroport LAX. C'est donc dans la solitude de leur chambre ornée de posters NOFX qu’ils ont exprimé l’ennui de leur condition adolescente, donnant naissance à l’un des courants musicaux les plus étranges de la fin du XXè siècle : le punk californien joué par des groupes qui n’y ont jamais mis les pieds. Quatorze ans plus tard, je trouve que ce sous-genre de sous-genre est le seul truc bien dont ait pu accoucher la banlieue blanche globalisée.

SUM 41

Les labels se sont intéressés à Sum 41 quand, au lieu de leur filer leur démo, les joyeux drilles du groupe ont commencé à leur envoyer des vidéos tournées avec le caméscope de leurs parents où on les voyait arroser des inconnus avec des pistolets à eau ou se saper en mafieux et dire des conneries avec un accent italien. Quand le clip de « In Too Deep »est sorti, personne n’aurait pu deviner que cette bande de jeunes en shorts Dickies venait de l’Ontario, au Canada : on les voyait défier avec d’autres jocks de leur connaissance dans un concours de plongeon et gagner à la fin. Aujourd’hui, le groupe a dilapidé toute sa crédibilité : Deryck Whibley a déclaré qu’« In Too Deep » était la plus grosse erreur de leur carrière et il est resté marié plusieurs années à sa compatriote Avril Lavigne.

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BOWLING FOR SOUP

En choisissant un nom déconneur, les mecs de Bowling For Soup se sont assurés d’éviter le piège dans lequel étaient tombés la plupart de ces groupes : aborder des « sujets sérieux » ou pire, « mûrir ». Pourtant, malgré tous leurs efforts, on n’est jamais parvenu à oublier que ces Texans ne seraient jamais que des potes par défaut (type : potes de bureau, potes de fac, potes de soirée) et ne constitueraient jamais vraiment le genre de mecs avec qui ont traînerait si on avait le choix.

UNCOMMONMENFROMMARS

C'est en voyant « Unco » à Aix-en-Provence que j'ai réalisé qu'il était possible de dépasser le vingtième anniversaire et de continuer à porter des chaussettes Independent remontées très haut. Ces mecs défonçaient en skate, parlaient de pizza dans leurs chansons et finissaient la plupart de leurs sets à poil : ils étaient plus californiens que la Californie. Si l'homme était vraiment un animal rationnel, il aurait depuis longtemps brûlé le drapeau à l'ours et l'aurait remplacé parce cette charmante petite figurine en pâte-à-modeler dont la signification m’échappe toujours.

MILLENCOLIN

En plus de donner envie à toute ma génération – moi compris – de se mettre au skateboard, Tony Hawk's Pro Skater (et le 2 en particulier) a permis à un paquet de gens de découvrir des groupes. Avant l'avènement du Tout-Puissant Internet, de The Berrics et de Guitar Hero, on pouvait skater les spots les plus célèbres de la planète en écoutant les Ramones, Lagwagon ou Motörhead. Le track de Millencolin sur Tony Hawk 2 s’appelait « No Cigar », extrait de Pennybridge Pionners et allez savoir pourquoi, je l'ai toujours associée au deuxième niveau, celui de l'école. Millencolin a toujours représenté pour moi la quintessence du punk à roulettes et j'étais d'accord avec à peu près tout ce qu'ils disaient, même si je dois bien reconnaître que leur musique tend d’avantage vers la rugosité du climat suédois que vers l’été sans fin californien. C’est pourquoi je leur décerne seulement quatre arbres tropicaux sur cinq.

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SIMPLE PLAN

J’ai écouté cette chanson en boucle dans l’oreillette droite de mon walkman pendant plusieurs semaines en 2002. Je l’avais trouvée sur une compilation Atticus que j’avais ramenée de San Diego et je l’écoutais alternativement assis par terre dans le hall du lycée, en allant en cours, en faisant la queue au CDI et dans le train pour rentrer chez moi. Depuis, les mecs de Simple Plan ont fait des duos avec Sean Paul à destination de leur public français et ont geint sur à peu près tous les sujets imaginables. Aujourd’hui, ils ressemblent à un groupe qui se serait fondé pendant une année Erasmus à Nice.

NEW FOUND GLORY

Je ne me rappelle pas de grand-chose concernant New Found Glory, si ce n’est la pochette de Sticks and Stones et le peu que je comprenais de leur chanson « My Friends Over You ». Ces deux raisons ont suffi à m’en donner l’image d’un groupe badass et sur lequel on « pouvait compter » dès qu’il s’agissait de distribuer des patates ou de porter un baggy Ecko. En regardant ce clip à nouveau, je dois bien reconnaître que ma mémoire m’a joué des tours puisque ces mecs se sont manifestement encore moins battus que moi. Mais bizarrement, je m’en fous : si à la suite d’un soudain changement de carrière j’atterris un jour dans un skatepark de San Diego, c’est typiquement sur ce genre de personnes que j’espère tomber.

MINIMUM SERIOUS

À mi-chemin entre le côté pet sur un matelas pneumatique de Bowling For Soup et la période cérébrale de Blink-182 post-« Adam’s Song », Minimum Serious est le groupe qui a le plus assumé ses influences californiennes. Un investissement qui a payé puisque le groupe, originaire des environs de Grenoble, a fait passer ses casquettes No Fear à la douane avant de s’envoler aux États-Unis pour enregistrer deux albums dont Goodbye California, qui sonne aujourd’hui comme l’aveu de leur impuissance. Malgré tous leurs efforts et la présence de Mr. Barbecue à la batterie, Minimum Serious a splitté en 2008. Je les aime toujours de tout mon cœur.