Les FPS hardcore sont à la mode. Hell Let Loose, Hunt: Showdown, Post Scriptum, Escape from Tarkov, Squad, Insurgency : la popularité de chacun de ces titres montre que les amateurs de simulateurs de fusillade ont soupé des environnements excessivement accueillants. Bien que cet élan vers la difficulté concerne de nombreux genres vidéoludiques, il engendre des expériences particulièrement intenses dans les jeux de tir à la première personne. La recette est quasi-proverbiale : des armes de maniement difficile, peu de points de vie, des niveaux vastes et complexes… Simple et efficace, mais pas suffisant du goût de GTFO.
GTFO est un FPS collaboratif hardcore dans un univers de survival horror. En escouade de quatre maximum, les joueurs parcourent les restes d’un complexe souterrain fait de laboratoires remplis de gaz toxique et de mines accidentées, mais surtout peuplé de monstres grotesques. Nous avons retrouvé Robin Björkell et Simon Viklund, respectivement directeur de la communication et directeur narratif, pour quelques parties. « Nous avons conçu le jeu pour qu’il soit difficile, explique Viklund, mais toujours satisfaisant. » C’est réussi : nous avons toujours perdu mais nous nous sommes toujours amusés.
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Chaque partie de GTFO commence par une cinématique bien angoissante (harnaché dans une nacelle métallique, vous plongez en chute libre dans les profondeurs du complexe) au terme de laquelle votre escouade entre dans le niveau. Vous devrez alors remplir une mission quelconque, notamment récupérer des disques durs ou transporter des batteries, puis rejoindre un point d’extraction. Pendant votre périple, vous devrez parfois choisir entre trois niveaux de difficulté (difficile, extrême ou overload) qui pourront modifier votre parcours mais aussi votre environnement, par exemple en faisant sauter le courant. Laissez-nous vous dire que ça complique nettement les choses.
Les environnements de GTFO ont du caractère : une lumière bleutée frappe des machines étranges, de la brume empoisonnée stagne entre des murs décrépis, des cadavres se liquéfient contre des consoles industrielles. « Alien 3 est notre influence principale, affirme Viklund. Pour les monstres, nous nous sommes inspirés des nécromorphes de Dead Space. » Clairement, les designers du jeu ont un faible pour le sous-genre du body horror : les créatures couvertes de crocs et de tumeurs qui vous attendent dans le noir sont d’autant plus angoissantes qu’elles semblent avoir été humaines. Pour ne rien arranger, elles sont nombreuses et elles tapent dur. Mais par chance, elles aiment dormir.
La plupart des monstres de GTFO sont endormis par défaut quand vous croisez leur route. Ces « dormeurs » ont tout de même le sommeil léger : braquez votre lampe sur eux, avancez trop vite ou faites sonner une alarme quelconque et ils surgiront de leur torpeur en hurlant pour réveiller tous leurs amis qui viendront vite dévorer votre visage. Dans de telles conditions, pas question de tirer un coup de feu : votre meilleure option est de vous approcher des dormeurs à petits pas et de leur détruire le crâne d’un coup de masse… À moins qu’un compagnon étourdi ne braque sa lampe sur votre cible.
Sans collaboration, abandonnez toute chance de survie dans GTFO. Tout arme ou équipement spécial en doublon risque de vous faire perdre la partie : si votre coéquipier prend la route avec un détecteur de présence pour sonder les salles encore verrouillées et un sniper pour coucher les plus gros monstres, partez plutôt avec une mitrailleuse et un lanceur de mines. En plus d’être remarquablement équilibré, le jeu récompense la bonne intelligence : quand les outils sont bien utilisés et les rôles respectés, détruire une (petite) vague de dormeurs est facile et satisfaisant. Quel bonheur d’entendre trois « Oui ! » quand on demande « Tout le monde va bien ? » dans la fumée des munitions percutées.
Au fil de notre partie, je trouve difficile de survivre et discuter simultanément. Simon Viklund lance en riant : « Vous ne pouvez pas gagner si vous ne vous concentrez pas. » En effet, le moindre faux pas peut vous valoir une défaite : ne pas remarquer un trou dans le sol, un ennemi caché dans un coin ou une « mine biologique » accrochée au plafond, louper un container qui contient un item important, poser sa tourelle automatique au mauvais endroit… Les occasions de perdre de la santé et des munitions bêtement sont nombreuses. Comme la victoire tient souvent à dix cartouches ou une blessure, on a tôt fait de se condamner.
Du fait de cette approche résolument hardcore, GTFO est prenant. Le pari des développeurs sur l’immersion dépasse le simple gameplay : le jeu ne propose pas de système d’expérience et toutes les armes sont disponibles dès votre première partie. Pas de carotte par ici si ce n’est celle de la progression : boucler un niveau permet « seulement » de débloquer le niveau suivant, forcément plus difficile mais aussi gorgé de nouveaux défis et de monstres inconnus. On joue pour le beau jeu, pour la curiosité et les sensations, sans serrer les dents pour boucler un défi idiot qui débloquera une nouvelle pétoire absurde, et ça fait du bien.
GTFO vient de rentrer dans sa cinquième saison ou « rundown ». Il contient un nouveau niveau, un nouvel ennemi, un nouveau système de « boosters » pour aider les débutants à se lancer sans trop souffrir… Et un mécanisme qui fait réapparaître des monstres dans les pièces que vous avez déjà traversées pour ne pas faire baisser la tension. Surtout, le Rundown 005 ou « Rebirth » devrait apporter un peu de substance au lore du jeu, encore bien mystérieux. Quel est ce complexe souterrain ? Qui sont les quatre personnages ? Que sont ces monstres atroces ? Viklund assure que nous en saurons bientôt plus… Mais pas trop non plus.
On aimerait croire que le jeu de 10 Chambers Collective est trop intense et difficile pour plaire à tout le monde. Mais en vérité, comme le note justement mon compagnon de jeu Evergreen, ces développeurs ont une vision. Je ne vais pas me lancer dans mes pleurnicheries habituelles sur la condition des FPS multijoueur, mais sachez que GTFO est tellement original et bien conçu qu’il a de quoi séduire même les plus filthy des casuals. Beaucoup de jeux prétendument « hardcore » sont seulement mal faits ou pauvres en contenu. Pas celui-ci. GTFO est difficile, certes, mais il est avant tout amusant.
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