Drogue

J’ai demandé à un médecin pourquoi je badtripe quand je fume du weed

Ça fait dix ans que je n’ai pas (vraiment) fumé de weed. Ça ne me manque pas du tout. Mais c’est certain que ce serait cool, de temps à autres, de pouvoir accepter quand on me propose un joint, au lieu de refuser en expliquant pourquoi je dis oui à tous les autres vices, mais que je me tiens loin du pot. Ça m’aiderait à fraterniser avec 98 % de mes amis, qui sont presque tous des stoners invétérés.

Je fumais pas mal quand j’étais plus jeune, vers 12, 13 ans, alors que c’était cool et rebelle. Mais l’aspect révolutionnaire de fumer de la beuh s’est estompé assez vite, vu que j’allais dans une école d’art, fréquentée largement par des hippies et des coffee shop revolutionaries. À un moment, ça a arrêté d’être amusant, et je badtripais à chaque fois. Maintenant, même juste l’odeur me répugne viscéralement. J’ai pris une puff d’un blunt, cet été, à Osheaga, alors que j’assistais un ami artiste anglais qui y jouait. Je me suis dit que ce serait drôle. J’ai pas badtripé, mais je me suis très vite rendu compte que quelque chose ne tournait pas rond. Je suis allé me réfugier backstage. J’ai pris deux grosses assiettes de bouffe bien grasse au catering, et je me suis endormi 45 minutes dans la loge de quelqu’un d’autre. Après ça, tout allait mieux. Mais après tout ce temps-là, je ne comprends toujours pas pourquoi le weed ne me fait pas. C’est certain qu’il doit y avoir un remède contre mes bad trips?

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J’ai contacté le Dr Didier Jutras-Aswad, médecin-psychiatre au département de psychiatrie du CHUM, et spécialiste des effets de la drogue sur le cerveau, pour qu’il m’explique mieux les effets désagréables que le pot a sur moi.

Le cannabis contient plus d’une centaine d’agents chimiques, qu’on appelle des cannabinoïdes. Le plus connu est bien sûr le THC (tétrahydrocannabinol). C’est l’agent qui modifie le comportement du cerveau et qui va procurer aux amateurs de weed les sensations qu’ils affectionnent, comme l’euphorie, la relaxation et les munchies. Par contre, malheureusement pour moi, c’est aussi celui qui cause des effets comme le stress et l’anxiété.

Il y a beaucoup de facteurs à prendre en compte quand on veut résoudre la question du bad trip de pot. C’est certain que si quelqu’un qui, comme moi, est sensible au weed, fume du gorilla kush à haute teneur en THC, elle ne passera pas un très bon moment. Le Dr Jutras-Aswad explique aussi que certaines personnes peuvent être génétiquement ou biologiquement prédisposées à avoir une mauvaise réaction au cannabis. Si on commence à fumer tôt dans sa vie, on court aussi le risque d’être plus sensible aux effets négatifs du weed en grandissant.

OK, donc qu’est-ce que je peux faire?

« Il y a, dans la plante, un autre agent cannabinoïde qui s’appelle le cannabidiol, dit le Dr Jutras-Aswad. Le cannabidiol (CBD) est intéressant parce qu’il a des effets moins délétères et peut atténuer les effets du THC. » Ce n’est pas une solution miracle, mais fumer du weed avec une concentration moins forte en THC et plus forte en CBD peut réduire les chances de psychose ou d’anxiété.

J’ai demandé au docteur ce que je pouvais faire avant de consommer pour réduire mes risques de badtriper quand il est impossible de connaitre la concentration de THC ou de CBD. « C’est certain que si quelqu’un est susceptible d’avoir de mauvaises réactions aux effets du cannabis, en général, on va recommander à la personne de s’abstenir de consommer. »

C’est tout? Je peux rien faire d’autre pour pouvoir être aussi amusé par un état végétatif et hilare que mes colocs, tard le dimanche soir? Apparemment pas… Dommage!

Si, par contre, je décidais d’être irresponsable pis de me frire les yeux avec un bon gros bong hit et que, par malheur, mon cœur commençait à jouer du happy hardcore dans ma poitrine et que mon cerveau décide de me rappeler qu’on meurt tous seul et que je descende dans une abîme psychotique : JE FAIS QUOI?

Voici les conseils du Dr Jutras-Aswad : « Si quelqu’un réagit mal après avoir consommé, en général les effets secondaires disparaissent en l’espace de quelques heures. Si la personne se sent inconfortable, il aide qu’elle soit bien entourée et qu’elle soit dans un endroit sécuritaire. Il faut bien sûr l’empêcher de conduire ou d’opérer de la machinerie lourde. »

« Si elle commence à devenir violente ou présenter des symptômes graves, il est recommandé d’amener la personne à l’urgence, pour qu’elle puisse être dans un environnement encadré avec des professionnels qui peuvent juger de son état », ajoute-t-il.

Donc, fumer du weed est chose du passé pour moi; ça n’arrivera plus. Mais SI JAMAIS j’étais atteint d’une maladie rare que le cannabis pouvait traiter, je pourrais prendre des pilules de CBD, et le problème serait réglé, right?

Pas tout à fait, d’après le Dr Jutras-Aswad.

« Si la personne a une mauvaise réaction au cannabis, on ne va pas nécessairement tout de suite lui donner du CBD. Il faudrait que le patient en parle avec son clinicien ou son médecin, afin d’étudier les différentes options. »

Dans le fond, si comme moi, vous avez de la misère avec le weed, il y a un truc vraiment simple : tenez-vous en loin. Vous ne manquez pas grand-chose.

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