J’ai un orgasme dès que je dois faire pipi. Je ne parle pas du soulagement que vous ressentez lorsque vous pouvez enfin aller aux toilettes après vous être retenu pendant des heures. Non, je parle bien d’un véritable orgasme. À chaque fois que ma vessie est trop pleine, ça arrive. Heureusement, je parviens à le dissimuler un peu et ce n’est pas toujours aussi flagrant que celui de Meg Ryan dans Quand Harry rencontre Sally. Cela dit, ce n’est pas toujours pratique. Certainement pas si ça dure trop longtemps. Et encore moins dans la vie de tous les jours, à la caisse au supermarché, en cours ou dans un bar avec des potes.
Quand j’étais en cours et que le prof décidait soudainement de ne pas faire de pause entre deux heures, je savais très bien ce qui allait se passer. Personne ne veut avoir un orgasme pendant des heures durant un cours sur la Seconde Guerre Mondiale. Dans d’autres circonstances un peu plus privées, c’est agréable, car je peux au moins en profiter.
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À seize ans, j’ai osé demander à mes amies si elles aussi avaient des orgasmes quand leur vessie était pleine. L’expression sur leurs visages a répondu à ma question.
J’ai eu ce qu’on appelle des « peegasms » depuis le jour où je sais ce qu’est un orgasme. C’était vers le début de ma puberté. Je pensais que tout le monde en avait, bien que je n’aie pas osé en parler pendant longtemps. Un jour, je devais aller aux toilettes et je n’ai pas pu m’empêcher de demander à mes amies si elles avaient aussi des orgasmes quand leur vessie était pleine. J’avais 16 ans à l’époque. L’expression sur leurs visages a répondu à ma question et je n’en ai plus jamais reparlé jusqu’à récemment, quand je me suis rendue compte que je n’étais pas seule grâce à cet article publié sur Reddit, où un mec demande si c’est normal que sa petite amie jouisse quand elle doit se retenir d’uriner.
Ensuite, j’ai découvert d’autres articles sur ce type d’orgasmes. Le Cosmopolitan, Vogue et même La Libre s’exclament que cette nouvelle « tendance » est dangereuse et que se retenir de pisser peut être nocif pour les femmes qui veulent en faire l’expérience. Puisque je ne peux pas contrôler ni retenir mes orgasmes, j’ai commencé à m’inquiéter pour ma santé. Je suis allée à la recherche d’un expert pour savoir pourquoi je jouis quand je dois pisser et si je devrais m’inquiéter pour ma vessie.
Je me suis d’abord renseignée auprès de ma gynécologue. Elle n’en avait jamais entendu parler et elle avait du mal à comprendre ma situation. On a parcouru ses bases de données ensemble mais on n’a rien trouvé sur le peegasm. Elle m’a parlé d’une possible anomalie génétique et m’a donné un rendez-vous pour un examen génital approfondi, qui n’a rien révélé.
J’ai donc décidé de consulter un sexologue. J’en ai appelé une bonne vingtaine, dont sept n’ont pas décroché. Les sexologues que j’ai eu au téléphone étaient intéressés par mon cas et m’ont proposé des rendez-vous, mais aucun n’a pu me fournir une explication. Heureusement, j’ai rencontré Wim Slabbinck. Il en avait déjà entendu parler et a immédiatement pu me rassurer avec une explication biologique: « C’est lié aux muscles du plancher pelvien. Ce sont les muscles qui relient l’urètre, le vagin et l’anus. Ils jouent un rôle important dans l’orgasme et l’accouchement, mais aussi pour uriner. Lorsque tu jouis ou urines, tu contractes les muscles du plancher pelvien qui créent des vibrations rythmiques. Ce qui arrive quand tu as besoin d’uriner, c’est que tu contractes ces muscles de la même manière que quand tu as un orgasme, de sorte que tu l’obtiens réellement », m’a-t-il expliqué.
Plus vous vous retenez, plus les orgasmes deviennent puissants, jusqu’à ce que ça devienne vraiment difficile à gérer.
Selon lui, le fait de me retenir n’est pas mauvais pour ma vessie: « Tant que c’est agréable, il n’y a pas de danger. Mais si les femmes veulent s’y adonner d’elles-mêmes et qu’elles n’y arrivent pas, il vaut mieux aller aux toilettes. Forcer n’a aucun sens si vous ne savez pas comment ça fonctionne », a-t-il ajouté.
Le peegasm ne procure pas exactement la même sensation qu’un orgasme vaginal ou clitoridien. Mais ça ne veut pas dire qu’ils sont moins biens. En gros vous sentez que vous devez pisser et vous vous retenez parce que vous ne pouvez pas aller aux toilettes tout de suite. Cette retenue provoque des orgasmes jusqu’à ce que vous puissiez enfin soulager votre vessie. Plus vous vous retenez, plus les orgasmes deviennent puissants, jusqu’à ce que ça devienne vraiment difficile à gérer. Un jour, j’étais en voiture avec un date et je n’arrivais plus à parler. J’ai du lui expliquer qu’il fallait qu’on s’arrête le plus vite possible pour que j’aille à la toilette, parce que sinon j’allais avoir un orgasme. Heureusement, contrairement à d’autres, il n’a pas été choqué. Je peux en profiter, mais ça dépend d’où je me trouve et avec qui.
Pour les lecteurs masculins, je suis navrée de vous apprendre que ces orgasmes ne sont pas pour vous. Ceci dit, selon Wim, on peut tous jouir de plein d’autres manières non-sexuelles. Il m’a même parlé d’une femme qui jouissait quand elle se brossait les dents et d’un homme qui a un orgasme quand sa femme lui suce le… pouce. « Certaines personnes n’atteignent pas l’orgasme pendant les rapports sexuels. Mais ça ne veut pas dire qu’elles ne peuvent pas jouir autrement. C’est ça qui est beau. »
Wim m’a fait réaliser que les peegasms dont je suis victime sont tout à fait normaux et qu’ils peuvent même être perçus comme étant de belles choses. Maintenant, je comprends comment mon corps fonctionne et en cas de situation de crise, je peux au moins donner une explication aux mecs que je fréquente.
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