Life

Ce que ça fait d’être nounou pour les gosses de riches

« Ils avaient trois chevaux et les enfants ramassaient leurs excréments pour me les jeter dessus. »
Sandra  Proutry-Skrzypek
Paris, FR
nounou super-riches
Illustration : Alex Jenkins 

De temps en temps, lorsque mon solde bancaire affiche zéro et que la moisissure dans ma salle de bains est sur le point de prendre vie, je cherche sur Internet un  « job sympa » qui me permettra de m'installer à l'étranger et de gagner un revenu décent. Apparemment, celui de « nounou » répond à ces exigences.

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D'un côté, je comprends l'attrait du métier, surtout s'il est bien rémunéré et que vous pouvez vivre gratuitement dans une maison luxueuse. D'un autre côté, ce sont surtout les super-riches qui peuvent s’offrir ce genre de service, et tout le monde sait qu'à partir d'un certain niveau de richesse, on ne peut plus attendre d’eux une quelconque forme de rationalité.

Mais qu'est-ce que cela implique réellement de servir la progéniture des super-riches ? Des personnes ayant travaillé comme au pair m’ont raconté leurs expériences les plus terribles. 

« Le gamin m'a menacée avec un couteau de cuisine »

J'ai travaillé pour une famille qui avait une maison magnifique dans le centre de Bologne. L'enfant avait presque sept ans et était fils unique. Il y avait déjà eu quelques incidents avec lui, mais vers la fin de mon séjour chez eux, il m'a menacée avec un couteau de cuisine, en le brandissant devant moi. La mère est entrée et lui a simplement dit : « Pose-le. »

Le même jour, il m'a frappé si fort sur la jambe avec une cuillère en bois que j'ai eu des bleus. Les parents s'en fichaient et il n'y a jamais eu de conséquences. Je suppose qu'ils me voyaient comme un objet utile avec des traits humains. – Emma

« Je me faisais engueuler si je mettais trop d'eau dans la casserole pour faire cuire les pâtes »

J'ai travaillé comme fille au pair pour une famille riche dans une ville près de Boston. La mère était médecin et avait du mal à gérer sa colère, le père était PDG d’une entreprise et criait tout le temps, et ils avaient trois enfants âgés de 12, 15 et 18 ans. Ils avaient beaucoup d'argent, mais ça ne se voyait pas, car ils avaient tendance à tout réutiliser. Ils réutilisaient même les sacs à déjections canines.

J'ai dû me rendre plusieurs fois à l'école pour remettre à l'un des enfants la pomme qu’il avait à moitié mangée au petit-déjeuner afin qu'elle ne soit pas gâchée. Et je me faisais engueuler si je mettais trop d'eau dans la casserole pour faire cuire les pâtes. – Lana

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« La mère a retirée sa fille de l'école et je suis devenue sa seule source d'éducation »

Je travaille dans le secteur depuis près de dix ans et, récemment, j'ai travaillé pour une femme avocate et sa fille de neuf ans dans la vallée de Santa Clarita. J'ai été engagée comme nounou pour aider l’enfant à lire, mais je suis rapidement devenue sa professeure particulière. Après trois mois, la mère l'a retirée de l'école et je suis devenue sa seule source d'éducation.

J'ai élaboré un programme complet à partir de rien, avec l'histoire, les mathématiques et tout le reste, bien que je ne possède aucune qualification. En général, la mère me traitait très mal : elle annulait tout à la dernière minute et retenait même une partie de mon salaire. – Isa

« La mère a acheté tout le bâtiment afin que sa fille puisse avoir son propre jardin »

La famille pour laquelle je travaille au Japon dirige une société immobilière. Un jour, la fille a demandé à ses parents « un jardin plein de fleurs ». Ils avaient déjà un dans leur villa, mais elle n'avait pas le droit d'y aller.

Elle a vu un terrain près de la maison et m'a demandé d'y faire un jardin. Je lui ai dit que c’était impossible car ce n’était pas chez nous. Elle l'a donc dit à sa mère, qui a appelé le propriétaire pour l'acheter. Le propriétaire a refusé, et la mère, pour le convaincre, a acheté tout le bâtiment où se trouvait le terrain, ainsi que le terrain voisin, afin que sa fille puisse avoir son propre jardin. – Jake

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« Ils m'ont mis à la porte avec un préavis d'une semaine »

J'ai commencé à travailler comme garçon au pair en Angleterre pour améliorer mon anglais. La famille venait d’emménager dans un quartier chic du Buckinghamshire. La maison valait environ deux millions d'euros. D’abord, ils ont promis de me laisser utiliser la voiture, puis ont refusé. Ils m'ont traité comme une merde.

Après deux mois, ils m'ont dit de partir, alors que j'avais signé un contrat d'un an. Lorsque j'ai demandé à le relire, ils m'ont dit qu'ils l'avaient perdu, mais je pense que c'était un mensonge pour éviter de me payer des indemnités de licenciement. Ils m'ont mis à la porte avec un préavis d'une semaine, sachant très bien que je n'avais nulle part où aller. Au cours de cette dernière semaine, ils m'ont interdit de toucher à leur nourriture, à l'exception du lait et du beurre. – Peter 

« Les enfants ramassaient les excréments des chevaux pour me les jeter dessus »

J'ai été brièvement fille au pair pour une famille en Corse, qui vivait dans les montagnes. Le paysage était incroyable, la mère tenait un restaurant et il y avait une piscine. Les deux enfants semblaient très gentils au premier abord. Tout me semblait beau, mais les choses ont vite changé. Ils avaient trois chevaux et les enfants ramassaient leurs excréments pour me les jeter dessus.

Il y avait aussi un chat errant qui se promenait dans le domaine. Un jour, ils l'ont attrapé et l'ont mis dans une cage sans eau ni nourriture. Quand je l'ai découvert, j'étais très en colère. Puis ils ont uriné partout, même autour de la piscine. Mais la mère ne les a pas grondés. Ils ont même menacé de me tirer dessus – je ne peux pas en être sûre, mais il y avait sûrement des armes à feu dans la maison, puisque la famille pratiquait la chasse avec des chiens. Tout cela s'est passé en seulement trois jours, puis j'ai dit que j'allais partir. Je ne pouvais tout simplement pas continuer. – Naomi

« J'ai eu l'impression qu'il voulait me surprendre pendant que j'étais distraite »

C'était mon premier jour de travail, et le père a dit qu'il sortait pour 15 minutes. Une heure plus tard, il n'était toujours pas rentré, alors j'ai couché la petite pour sa sieste. Je suis allée aux toilettes, mais j'ai pris le babyphone avec moi pour parer à toute urgence. Pendant que j'étais dans la salle de bains, j'ai vu le père entrer dans la chambre pour emmener le bébé dans une autre pièce et changer sa couche.

Quand je suis sortie, il a fait un commentaire sur le fait que j'allais aux toilettes pendant la sieste de sa fille, disant que c'était « inquiétant ». Je lui ai dit que le bébé était en sécurité, mais j'ai vraiment eu l'impression qu'il avait attendu exprès et qu'il voulait me surprendre pendant que j'étais distraite. J'ai démissionné immédiatement. – Jess

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