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Rien ne ressemble au Berlin raver des années 90

Quand le mur de Berlin est tombé, parmi les décombres, les rues désolées, les entrepôts vides et les squats miteux a émergé une toute nouvelle scène musicale. En Allemagne de l’Est, l’été 1990 est aussi connu sous l’appellation « été des squatteurs », et même une fois que la saison est arrivée à son terme, quand le gouvernement a commencé à remettre la main sur tous les immeubles occupés, cette mentalité d’appropriation d’espaces urbains s’est perpétrée. Et elle a donné naissance aux clubs temporaires et aux raves qui ont immortalisé le Berlin des années 90.

Le jour où l’hédonisme généralisé du Berlin Ouest s’est engouffrée dans le tunnel vacant du Berlin Est, ça a donné un nouveau point de repère au mouvement et à la ville : le fameux Tresor. Puis tout s’est enchaîné très vite : les techno parades se sont lancées, le club E-Werk a ouvert et Paul Van Dyke et Maurizio ont déboulé derrières les platines. Les yeux des Berlinois étaient grands ouverts, littéralement et métaphoriquement, ils étaient tous braqués sur ce nouveau mouvement – une scène qui repoussait les limites imposées par la loi et qui échappait aux objectifs des photographes.

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À de rares exceptions, dont Tilman Brembs fait partie. « J’ai commencé à travailler au Tresor en 1991 et je gravitais autour de la scène techno dès ses débuts – toujours avec mon appareil à portée. Il était généralement interdit de prendre des photos dans les clubs, mais j’avais une sorte de passe-droit – comment j’ai pu l’obtenir ? Je ne saurais même pas le dire » se souvient Tilman. Les archives de Brembs comprennent quelques 20 00 clichés en 35mm, ce qui représente sans conteste la plus grosse base de données existante sur cette scène. Il a accepté de nous commenter quelques-unes de ses photos.

Le jour où le nouveau néon Tresor a été installé. La pub juste en-dessous convient parfaitement au lieu : « chef d’oeuvre berlinois ».

L’entrée du E-Werk après la Love Parade. Il devait être 10 heures du matin et la queue était digne de celle du Berghain aujourd’hui.

La première Love Parade sur son nouveau tracé, à travers le parc de Tiergarten (le centre de Berlin était devenu trop dense pour les foules de gens qui s’y rassemblaient chaque année).

Une énorme rave sans aucun smartphone en vue. Mais avec 90 % de mecs.

Deux filles « passionnées », avenue Kurfürstendamm, pendant la Love Parade. Ce qui était cool à l’époque, c’est que ce que tu portais n’avait strictement aucune importance.

DJ Woody avec un perroquet dans les coulisses de l’E-Werk – c’est ce genre de moments où l’on se marrait le plus.

The Prodigy en concert à l’E-Werk. Je n’ai pas seulement perdu mon appareil photo cette nuit-là mais aussi beaucoup de souvenirs.

Boy George et quelques drag queens lors d’une soirée Frontpage au Kongresshalle. Comme on peut le voir, Boy adorait la bière allemande.

DJ Keoki en backstage du Tresor. C’est un des premiers super-DJs américains à être venu jouer ici.

Allégorie d’une époque où l’on avait tous les yeux grands ouverts, au sens littéral comme figuré.

Dr. Motte, le fondateur de la Love Parade, derrière les platines sur l’Île de la Jeunesse, dans le quartier de Treptow à Berlin. Motte portait toujours une blouse pour sied à son personnage de « docteur ».

Qui a dit que les drag queens étaient toujours obsédées par le regard des autres ?

Le DJ anglais Goldie lors d’une soirée Metalheadz. Il était strictement interdit de le prendre en photo. J’ai quand même tenté le diable en le croisant et le résultat demeure une de mes photos favorites.

DJ K-Hand de Détroit, devant le Reichstag. En 1995, le palais avait été entièrement recouvert par les artistes Christo et Jeanne-Claude, ce qui estomaquait la plupart des touristes.

DJ Terrible léchant une grenouille. Toute nouvelle tendance était bonne à prendre pour élargir sa conscience. Dans ce cas précis, il s’agissait simplement d’un jouet en plastique.

Une valse en camouflage, involontairement drôle et une belle caricature du « techno love ».

Ce stand avait été installé lors d’une grosse rave et on pouvait y acheter des lunettes de soleil qui projetaient des rayons dans les yeux de ceux qui les portaient. Ils appelaient ça des « brain machines » et ils tentaient de convaincre les gens qu’elles pouvaient les faire planer.

Une tenue importée par les jeunes ravers d’Angleterre, où le duo Altern-8 régnait en modèle absolu.

Les années 1990 étaient aussi l’ère des poils de toutes les couleurs. En voici un exemple parfait, qui permettait à vos potes de vous retrouver n’importe où, même dans le plus sombre des clubs.

Le mur extérieur du Tresor était recouvert de marqueurs temporels. Je l’avoue aujourd’hui, le « HARTCORE light » était mon oeuvre.