Il est tard, les assiettes s’empilent sur la table, les verres sont vides et l’addition salée. Ça arrive. Ça s’appelle un vendredi soir. Tout le monde y pense, mais faut-il vraiment partir sans payer ? Est-ce que ça fait de vous un être humain déplorable (oui) ? Est-ce que ça vous rendra plus heureux (sûrement) ? L’addition est-elle vraiment retenue sur le salaire du serveur (c’est illégal, mais oui) ? Si vous vous posez toutes ces questions, il est déjà trop tard. Payez votre addition.
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Selon le Syndicat Neutre des Indépendants (SNI), 51 % des restaurants ont été victimes de « resto-basket » en 2015. Cette pratique, connue par la loi sous le doux nom de « délit de filouterie », est passible de six mois de prison et de 7 500 euros d’amende. Filous experts, qui vont fumer une clope entre chaque plat pour habituer le serveur à leur future désertion, filous spontanés, échaudés par l’alcool et une éphémère adrénaline, filous dévorés par les remords qui reviennent payer le lendemain : tout existe. Florilège.
Clément, 32 ans
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Claire, 27 ans
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Samuel, 25 ans
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Léa, 28 ans
Gwenaëlle, 31 ans
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Pas d’autre choix que d’y retourner. On espère vaguement pouvoir récupérer le portable discrètement sur la table mais il n’y est plus. On est obligées de s’adresser à un serveur derrière le comptoir. La honte. Le type nous toise, on bafouille qu’on s’est rendu compte qu’on a oublié de payer, oups, et au fait, est-ce qu’ils n’auraient pas retrouvé un portable ? Il sort le portable de sous le comptoir, ne dit toujours pas un mot, sort notre ticket d’addition et nous demande comment on veut régler. On en avait quand même pour une cinquantaine d’euros chacune. On a payé et on est parties rouges de honte. Dix ans plus tard, je n’y ai toujours pas remis les pieds.Le premier resto-basket que j’ai fait, c’était au festival d’Avignon et totalement prémédité. J’y étais allé avec une amie et, comme on n’avait pas beaucoup d’argent, on avait décidé de dormir au camping à côté de la ville – il est hyper cool avec une piscine et on pouvait s’amuser face aux troubadours. À la fin, on n’avait plus une thune et plus de réseau – j’étais obligé d’aller à la FNAC pour choper Internet et répondre aux meufs sur Facebook. Pour bouffer, on s’est dit qu’on allait faire un resto basket.Mais au lieu de le faire dans un truc bon, on est allé dans un Chinois miteux sur une des places. On avait vu qu’il y avait une terrasse et plein de monde, alors on a mangé – c’était dégueulasse – on a attendu la brèche, que le mec soit assez loin à l’intérieur du resto, puis on s’est barré en courant. Je pense qu’en tout, il devait y en avoir pour dix euros. Après, on ne se sentait pas très bien mais ce n’était pas la culpabilité.
Vincent, 26 ans
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En Allemagne, il y a une chaîne de restos qui s’appelle Vapiano. Le concept est super cool parce que c’est un self service, tu prends un plateau, tu récupères les plats que tu veux et tu paies à la fin. Comme les Allemands sont éduqués, ça ne pose aucun problème. Mais quand t’es Français, tu vois tout de suite la faille dans le principe : « les gens me font confiance ». Avec des amis, on a d’ailleurs abusé de cette confiance plusieurs fois. On y allait, on se servait dans le buffet, on mangeait et au lieu d’aller payer à la fin, on se cassait.
Ça marche aussi le bar-basket ? Une fois, je suis allé boire un verre avec un pote qui avait ramené une grosse équipe. On a commandé des mojitos qui étaient immondes et hors de prix. Du coup, on a dit « Bon bah, on se tire ». On était genre huit. On s’est levé et on s’est barré en courant. Le mec qui gérait le bar, c’était un petit gars tout frêle. Il s’est mis à nous courir après. Au bout d’un moment, on s’est regardé et on s’est dit qu’on pouvait peut-être arrêter de courir vu qu’il était tout seul et qu’on était huit. C’est ce qu’on a fait. Il s’est arrêté aussi et puis il est reparti dans son bar.Je peux le refaire à partir du moment où le service ne me convient pas. Si le serveur est chiant, que c’est pas bon et que c’est cher, je me dis que c’est mérité. C’est ma façon à moi de mettre une étoile sur Yelp.VICE France est aussi sur Twitter, Instagram, Facebook et sur Flipboard.