C’était un but venu de nulle part d’une équipe venue de nulle part. Quand David Ball a marqué le but égalisateur pour Fleetwood Town en League One contre Preston North End la saison dernière, il a réalisé un truc que peu de footballeurs peuvent se targuer d’avoir fait : marquer un but qui a été classé à coté d’un but de Lionel Messi. Le but venu d’ailleurs de David Ball a ainsi été nommé pour le prix Puskas 2015 de la FIFA, qui récompense le plus beau but marqué dans l’année. C’est James Rodriguez qui a remporté le gros lot en 2014 grâce à son but pour la Colombie contre l’Uruguay pendant la Coupe du monde. Les précédents récipiendaires incluaient Cristiano Ronaldo, Neymar et Zlatan Ibrahimovic. Le top du top de la crème de la crème du football, en d’autres termes.
Fleetwood Town a progressé de six divisions en dix ans depuis 2005, quand l’équipe jouait dans la North West Counties League. Le soir du but exceptionnel, les joueurs galéraient à domicile dans le derby face à leurs rivaux de Preston. C’est à ce moment-là que Ball, tout juste entré en jeu, prend le ballon. On est à la 82e minute.
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Ce qui se passe ensuite défie la logique, au moins la logique des matches de League One. Brian Nuttall, un fan de Fleetwood Town depuis leurs années dans les ligues régionales, appelle ce but, « le plus beau but que j’ai vu dans un match de Fleetwood. C’était incroyable, un vrai but de dingue, venu de nulle part. Le truc bizarre c’était qu’au niveau du terrain, on avait juste l’impression que c’était juste un très joli but. Mais une fois qu’on l’a revu à la télé, on a réalisé à quel point il était beau. »
Des buts d’exception sont marqués tous les weekends dans les divisions inférieures. Mais il y a quelque chose de vraiment unique dans le fait de marquer le but d’une vie. Le souffle coupé pendant que le ballon file vers le but, le bref moment quand la balle touche le filet, la foule qui se lève comme un seul homme et crie à pleins poumons. Il y avait tout cela dans le but de David Ball, voire même un peu plus. La plupart des grands buts de l’Histoire sont à base de puissance, de toucher soyeux ou de technique exceptionnelle. Mais dans ce but de D3 anglaise, il y avait les trois. David Ball raconte.
« On perdait 1-0 contre Preston North End, un gros derby pour nous. Je suis rentré un peu après l’heure de jeu, j’avais vraiment envie de faire grosse impression. Chris Maxwell, notre gardien de but, dégage le ballon. Notre arrière droit, Tyler Forbes, amène la balle dans la partie de terrain adverse et la passe à Ashley Hunter, qui revient un peu vers le centre. Je lui montre alors que je veux le ballon dans les pieds. J’évite deux adversaires grâce à des petits passements de jambes, et, pendant que je fais ça, je vois que le gardien est avancé. Je tente alors le lob et après, je regarde juste la balle tomber depuis une bonne hauteur sur le poteau et dans la lucarne. »
Formé à Manchester City, Ball raconte que c’est le genre de but que tout joueur espère marquer dans une carrière. « Il y a ce moment, qui n’arrive que quand tu marques un but spécial, cette seconde, quand toute la foule est silencieuse avant d’exploser. Même pendant la célébration, les mecs m’écrasaient en me disant “Wow ! C’est le plus beau but que j’ai jamais vu de mes propres yeux.” Et c’est des mecs qui ont joué des centaines de rencontres, donc entendre ça fait vraiment chaud au coeur. Même l’arbitre m’a dit que c’était un superbe but. »
Le but a désormais fait le tour de la planète, 1,5 million de fans ont pu le voir sur la chaîne YouTube officielle de la FIFA. Ball explique : « Le responsable presse de Fleetwood m’a contacté il y a quelques mois pour me dire que j’avais été nominé pour le prix Puskas, et depuis cela, c’est la folie. CNN m’a interviewé, la télé brésilienne aussi. Daniel Sturridge, que j’ai connu à City, a tweeté à ses followers qu’il fallait voter pour moi. C’est incroyable de se dire que tous les fans de foot à travers la planète ont pu voir le but. C’est le but qui a changé ma vie ! Pendant un mois, au moins. »
On pourrait presque faire un parallèle entre le destin de Fleetwood Town et le tir de Ball : le club est silencieusement sorti de nulle part avant d’atterrir avec fracas dans la lumière. Tout ça grâce au nez et au porte-monnaie d’Andy Pilley, le propriétaire du club. Durant l’ascension irrésistible du club, une autre star a fait son apparition : Jamie Vardy a marqué 31 buts en 36 matches pour Fleetwood Town pour les faire passer de Conference League (première division amateure, équivalente à la D5, ndlr) à la Football League, avant de quitter les Foxes en 2012. Aujourd’hui, il est meilleur buteur de Premier League avec 15 buts pour Leicester City. D’après le capitaine du club, Nathan Pond, un milieu de terrain de 31 ans qui a joué dans sept divisions différentes avec Fleetwood (un record du monde inscrit au Guinness Book), le club devient un habitué des histoires insolites.
« La saison où Vardy a marqué 30 buts pour nous en Conference, sa vitesse était exceptionnelle. On était certains qu’il allait jouer dans les divisions supérieures. Mais de le voir en équipe d’Angleterre, ça te rend fier d’avoir joué avec lui. Il a un gros caractère, c’est un personnage dans un vestiaire, il avait ça pour lui. Chaque fois qu’il marque, c’est un peu comme s’il marquait pour Fleetwood, tu te pinces presque quand tu te dis que t’as joué avec lui. Des choses dingues comme celle-là arrivent tout le temps à Fleetwood. Le but de David Ball, c’est juste la dernière en date. »
Outre Messi, le but de David Ball était aussi en concurrence avec un golazo de Carlos Tevez, un ancien coéquipier de ses années à Manchester City. « J’ai quitté le club sous Mancini, juste au moment où l’argent commençait à arriver, explique Ball. J’adore encore et toujours Man City, mais cet argent là n’a pas aidé les jeunes joueurs. J’ai joué avec Tevez à City mais il ne parlait pas encore très bien anglais donc je doute qu’il se souvienne de moi ! J’espère juste qu’il a regardé la liste et vu les buts. Ça me ferait kiffer de savoir qu’il a regardé mon but. »
Les dix buts ont désormais été réduits à trois après un vote des internautes. Le but de Ball n’a pas passé cette étape-là. Dans les trois qui restent (le but de Messi contre l’Athletic Bilbao, le lob longue distance d’Alessandro Florenzi de la Roma contre Barcelone, et la bicyclette de Wendell Lira pour l’équipe brésilienne d’Athlético Goianiense), Ball a son préféré. « J’adore le but de Messi. Passer six défenseurs de cette qualité-là et marquer comme ça, il devrait recevoir le prix. »
On connaîtra lundi le vainqueur du prix Puskas de la FIFA 2015. Vous pouvez voir tous les buts nominés, ainsi que les trois finalistes, ici.