Honnêtement, c’est le premier nom qu’on aurait donné si on nous avait posé la question : « Quel est le pays qui a réussi à faire rouler une bagnole alimentée par du whisky à la place de l’essence ? ». Vous aussi ? Il n’y a donc rien d’étonnant dans le fait d’apprendre qu’en Écosse, une Ford Focus a roulé vendredi 7 juillet avant un mélange de résidus de whisky dans le moteur.
Le test de conduite effectué à Édimbourg a été couronné de succès. La voiture a roulé au bioéthanol, un carburant qui (en plus de répondre aux stéréotypes écossais) est le résultat d’un mélange de « draff », un résidu d’orge que le whisky perd pendant la fermentation, et de « pot ale », le liquide laissé par le moût qui fermente au fond de la cuve après le processus de distillation.
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« Je dois vous avouer que j’ai quand même croisé les doigts », a confié au Martin Tangney, le président et fondateur des Celtic Renewables à l’origine du projet, au Telegraph. « Nous n’avons versé qu’une bouteille de bioéthanol dans la voiture, mais les répercussions de cet essai peuvent être vraiment considérables. »
Le biocarburant a donc été élaboré par Celtic Renewables, une startup lancée par l’université Napier d’Édimbourg. C’est la distillerie Tullibardine qui a fourni le combustible : les résidus de son single-malt. Selon Celtic Renewables, seulement 10 % de ce qui « sort de n’importe quelle distillerie » se transforment finalement en whisky. Le but est donc de convertir les dépôts et autres résidus (comme le draff et la pot ale) en biocarburant. Ce qui aurait pour impact de limiter les émissions de CO2 des véhicules (d’après certaines estimations, cela pourrait même réduire les émissions de gaz à effet de serre de 85 % comparé à l’essence) et de devenir une importante source d’énergie pour certaines régions de l’Écosse mieux équipées en distilleries qu’en pompes à Sans-Plomb 95.
Celtic Renewables estime que l’industrie du whisky écossais produit chaque année deux milliards de litres de pot ale et 500 000 tonnes de draff. En plus du biocarburant, l’entreprise transforme ces résidus en nourriture pour animaux.
« Nous avons développé un procédé qui permet de réunir le liquide et le solide dans un processus de fermentation traditionnel un peu différent appelé ABE. C’est ce qui donne le produit chimique appelé bioéthanol », explique Tangney à la BBC. « C’est un substitut du pétrole » Et de fait, il a raison. La Focus n’a pas eu besoin qu’on modifie son moteur ou son circuit de carburant pour rouler pépère avec du bioéthanol.
Raconté comme ça, le bioéthanol ressemble à une innovation lambda du XXIe siècle. Pourtant, l’idée a émergé dès les années 1900. Le processus ABE était même utilisé pour produire de l’acétone, un composé présent dans les explosifs utilisés pendant la Première Guerre mondiale. Malgré de bons résultats et des points communs avec l’essence, la production de bioéthanol s’arrête dans les années 1960, en partie à cause de son coût élevé.
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Malgré de bons résultats et des points communs avec l’essence, la production de bioéthanol s’arrête dans les années 1960, en partie parce qu’elle coûte beaucoup trop d’argent. Celtic Renewables a tenté de ressusciter le combustible ces deux dernières années, en changeant notamment la recette et en utilisant les résidus de whisky. L’entreprise a déjà reçu 9 millions de livres (10 millions d’euros environ) de la part du gouvernement écossais. et espère utiliser cette somme ainsi que tout financement additionnel pour construire un site de démonstration et étendre ses capacités.
Au moins, on saura qui remercier pour cette excuse un peu bancale : « Non Monsieur, je vous jure que je n’ai rien bu. Par contre ma voiture… »