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Les douleurs menstruelles ne seront peut-être bientôt qu’un lointain souvenir

Quand on parle des règles, la totalité des femmes sur cette planète vous diront deux vérités générales. La première, c’est que ça fait un mal de chien ; la seconde c’est qu’aucun mec ne pourra jamais comprendre cette douleur. Il existe de nombreuses options médicales – que celle qui n’a jamais rêvé de taper un rail d’Antadys me jette la première pierre – mais enchaîner les comprimés pendant 4 jours n’est pas l’option la plus recommandée.

En 2010, l’artiste japonaise Sputniko! a inventé un robot du doux nom de « Menstruation Machine » qui reproduit la douleur des règles pour qui voudrait essayer de tester cette expérience de mort imminente. Dans la vidéo, on y voit un homme déguisé en femme – pourquoi ? – ressentir la souffrance mensuelle des femmes de ce monde. Si, au Japon, cette expérience relève de l’art, elle prouve bien les deux précédentes assertions.

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Vous serez ravis d’apprendre que j’ai des règles douloureuses qui me clouent au lit pendant au moins deux jours. La dysmenorrhée, puisque c’est le nom thérapeutique de ce mal, touche 35 à 50 % des françaises. Il était donc grand temps que quelqu’un se creuse le cerveau et invente quelque chose, n’importe quoi, qui supprime cette souffrance. Réjouissez-vous, les meufs, Dieu est grand.

Lorsque que j’ai appris l’existence de Livia sur Indiegogo, j’ai ri longtemps et fort. Je suis toujours sceptique quand une société sort subitement un truc dont tout le monde a besoin depuis des années. Livia est une société israélienne qui a créé une technologie portable permettant supposément de supprimer les douleurs menstruelles POUR TOUJOURS. Si mon scepticisme est de mise, ce n’est pas le cas des internautes qui ont déjà donné plus de 350 000 dollars pour que Livia voie le jour.

C’est extrêmement gênant.

Dans sa vidéo explicative hilarante, Livia nous démontre que ces douleurs viennent des connections nerveuses entre le vagin et le cerveau et qu’il suffit de bloquer cette communication pour que l’enfer s’arrête. Le professeur Bari Kaplan est neurologue à l’hôpital Beilinson, à Petah Tikva, et en charge des recherches de Livia. Son idée est toute simple : il s’agit de « fermer les ponts de douleur ». Pour cela, il suffit d’attacher un boîtier de la taille de nos regrettés iPod Nano, de se coller deux électrodes sur le ventre quand on se tord de douleur et d’appuyer sur le bouton ON. À partir de ce moment, l’appareil envoie des « vibrations » qui occupent les nerfs et le soulagement est immédiat. Comme expliqué plus haut, les hommes n’ont jamais compris la violence du syndrome pré-menstruel qui peut aller du simple mal de crâne à la crise de larmes si on ne trouve pas de place assise dans le métro. Et c’est pourtant une équipe de trois hommes qui est derrière Livia. Équipe composée, outre Bari Kaplan, de Chen et Zvi Nahum, père et fils, unis dans ce combat pour que la vie des femmes soit plus belle.

J’ai du mal à croire que la solution soit aussi simple que ça, et pour en avoir le cœur net, j’ai contacté Livia pour que la société m’envoie un prototype. C’est certainement de l’abus de pouvoir mais si Livia marche, je veux l’avoir et le garder toute ma vie. Mais, victime de son succès, l’appareil imprimé en 3D, dont 20 exemplaires ont été réservés à la presse, a été distribué uniquement à mes collègues journalistes américaines. C’est donc vers elles que je me suis tournée pour glaner quelques informations sur l’efficacité de Livia. Le premier aspect qui semble émerger de ces tests, c’est que chaque journaliste a testé l’appareil « pour le LOL ». Personne n’y croit, mais face à une technique marketing aussi osée, les rédactrices se sont prêtées au jeu. Et les critiques ont été délirantes. De Cosmo à Glamour, en passant par Seventeen, toutes les journalistes ont été unanimes : « une technologie qui change la vie et met fin pour de vrai aux douleurs de règles », « une invention géniale qui fournit un ‘interrupteur’ pour les crampes », et « le meilleur outil que j’ai jamais essayé ». Incroyable mais vrai.

Pour Emma Lord, journaliste à Bustle, il est clair que Livia fait partie des priorités de l’espèce humaine. « On est en 2016, les mecs. On a des Hoverboard, une femme qui se présente à la présidence et des milkshakes de la taille d’une montagne. Il est plus que temps que nous ayons ‘règles non douloureuses’ sur la liste des choses que l’Humanité est capable de faire. » La journaliste de The Next Web, Amanda Connolly a, tout comme moi, des douleurs qui lui aspirent son âme, tous les mois. Elle a donc sauté sur l’occasion de tester l’appareil. « Quand j’ai accepté de tester Livia, j’avais de l’espoir mais j’étais aussi très sceptique à l’idée qu’un petit boitier puisse guérir mes douleurs. Et bien, c’est le cas. » Mieux, « après quinze minutes [les] crampes avaient disparues. » Connolly a même titré sa critique « Ceci est la meilleure technologie portable que j’aie jamais essayé. Point. » Quant à Anna Lewis du Cosmo anglais, elle a sobrement écrit « Annulez les recherches, nous avons trouvé le Saint-Graal. » Une fois encore, difficile de ne pas croire à l’engouement collectif et de ne pas être excité(e) par la révolution à laquelle nous sommes en train d’assister.

Au delà de l’aspect nécessaire de Livia, le boîtier répond à une problématique générationnelle. En 2016, les générations Y et Z tendent vers un retour au naturel, vers des solutions plus écolos, moins médicales et, bien sûr, plus holistiques. Il va sans dire que l’on flingue nos organismes en le bourrant de médicaments pendant nos règles. Alors, évidemment, s’armer d’un « interrupteur pour les douleurs de règles », comme l’appelle Chen Nahum, peut sembler être une idée tout droit sortie du film « I, Robot », mais si ça soulage durant une douzaine d’heures d’affilée, pourquoi pas.

Mon conseil ? Economisez sur les boites d’Ibuprofène, mettez 100 euros de côté et passez du côté obscur de la robotisation de nos corps. Si on en croit les critiques dithyrambiques outre-Atlantique, ça sera les 100 balles les mieux investis de votre vie. Pour ma part, j’attends patiemment les six semaines nécessaires à l’impression 3D de Livia – ça ne fait qu’un cycle supplémentaire à chialer de douleur sur mon canapé. En plus, y’a plein de couleurs girlies. Hey, on reste des meufs.