Avoir 25 ans en 2016 revient à naviguer entre deux mondes : celui de la réussite et celui de l’échec. Il s’agit d’un checkpoint où le destin décidera si le reste de votre existence sera entièrement merdique, ou si au contraire vous pourrez entrevoir une lumière douce et rassurante, comme celle du néon McDonald’s à quatre heures du matin qui signifie « ouvert ». Si l’adolescence est « une bombe atomique d’hormones qui vous fait passer d’être humain de seconde catégorie à adulte », alors atteindre les 25 ans en est l’aboutissement. Et comme toute fête qui se termine, le retour à la réalité peut être cruel. À vous d’en faire un truc génial.
Vous avez terminé les études choisies par vos parents et commencez à entrevoir à quoi ressemblera votre vie pendant les 40 prochaines années. Vous êtes tiraillé entre deux mondes qui se rejettent mutuellement : celui des jeunes cool qui « ne se prennent pas la tête », face au monde des vieux qui « se prennent la tête ». Vous n’arrivez pas encore à vous faire à l’idée que vous être en train de changer de camp, inévitablement. Par exemple, vous ne voyez aucun mal à vous passer de la crème hydratante le matin tandis que vous persévérez à taper des shots de Get 27 le vendredi soir. Vous allez courir de temps en temps pour vivre plus longtemps, mais persévérez à prendre des shots de Get 27 le samedi soir. Récemment, vous avez même acheté une housse en cuir pour votre téléphone portable.
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Mais les choses vont changer, sachez-le. La presse le sait. Pour le magazine Paulette, « la crise des 25 ans, ça existe ». Pire, « le cap des 25 ans, c’est l’horreur », comme le rapporte L’Express. Le site Psychologies parle, lui, de « blues des 25 ans ». Ce sera donc difficile, mais il est tout à fait possible d’en sortir plus heureux que jamais. Car quitter le monde en pantacourt des étudiants de Rennes II n’est pas nécessairement mauvais.
Je le sais, parce que j’ai 27 ans et je suis parfaitement heureux . Voici ce qui peut vous arriver de mieux après vos 25 ans.
TROUVER UN EMPLOI ET DEVENIR UN HOMME LIBRE
Si vous avez la chance d’avoir pu faire des études supérieures – en excluant les arts du spectacle, les arts plastiques et l’histoire de l’art – vous allez normalement pouvoir obtenir un emploi un peu plus facilement que les autres, c’est-à-dire que ceux qui n’ont aucun diplôme. Une étude de l’INSEE publiée en 2016 affirme que le taux de chômage est aujourd’hui trois fois plus élevé chez les ouvriers que chez les cadres. En ayant fait quelques études, mêmes moyennes, vos chances de ne pas finir pieds nus dans le métro à cracher sur des jeunes filles réduisent fortement. Même si le risque de tomber sur un job à la con reste omniprésent, un emploi est aujourd’hui un ticket vers la liberté. Oui, je viens vraiment d’écrire ça. Je sais que la plupart d’entre vous voient le travail comme une contrainte aliénante plus qu’un facteur d’épanouissement personnel, mais ce n’est pas que ça. Travailler signifie déjà une chose : plus de devoirs à rendre à un professeur autoritaire qui veut votre mort. Du vendredi soir au lundi matin, personne ne vous demandera – sauf si vous êtes avocat, ou pigiste – de bosser. Vous serez alors libre de vaquer à vos occupations sans penser à cet exposé que vous devez faire lundi matin devant 42 personnes. Vous pouvez enfin disparaître.
Travailler peut aussi vous permettre de ne plus compter sur l’argent de vos parents et de sortir de ce gouffre culpabilisant de jeune pourri gâté. Estimez-vous chanceux, il s’avère qu’un jeune sur trois de 18 à 34 ans vit encore sous le toit de ses parents. Contrairement à ces loosers, vous avez su prendre votre envol et faire fructifier votre capital social. Vous n’avez plus à vous justifier si vous souhaitez investir tout votre pognon dans des sous-vêtements de qualité ou pour acheter un trampoline et le mettre au milieu de votre salon. Vous êtes maintenant un capitaliste individuel, prêt à conquérir le monde. Et c’est formidable.
Après 25 ans, on s’amuse notamment en se coloriant le visage entre copines. Photo via l’utilisateur embot, sur Flickr CC.
GAGNER PLUS DE FRIC QUE LES PAUVRES
À partir de 25 ans et un jour, vous allez d’un coup posséder ce qu’on appelle un « CV intéressant », c’est-à-dire que vous avez de la valeur aux yeux de l’entreprise. Selon une étude publiée dans le Guide des salaires des Éditions législatives, les salariés âgés de 26 à 30 ans voient leur salaire augmenter bien plus que tous les autres en 2016 – losers ! En gros, dès que vous avez intégré une entreprise convenable (soit autre chose qu’une start-up qui vous paye en M&M’s et en cool) vous devenez immédiatement peinard. Vous serez même « chouchouté » par vos dirigeants qui verront en vous l’avenir de l’entreprise. Ce sera votre nouvelle famille et vos dirigeants seront comme une multitude de nouveaux pères formidables et accessoirement plus riches que votre géniteur. Vous ne pourrez alors plus faire machine arrière. Vous pourrez devenir propriétaire, acheter une Audi avec diverses options et avoir un enfant à qui vous pourrez tout donner sur un plan matériel. En outre, terminé les soirées à 87 dans un studio de 19 mètres carrés à Place des Fêtes. Terminé aussi le Noctilien sordide qui vous ramène à Marcadet. Vous n’êtes plus libres de rien, mais vous êtes libres de dire « stop ».
RENCONTRER QUELQU’UN ET FORMER UN COUPLE MODERNE
Avant 25 ans, « être en couple » est souvent vu comme un obstacle au bonheur. Un truc ringard que font les humains quand ils n’ont plus rien d’autre à faire qu’attendre la mort. Le bonheur était – avant cet âge charnière – souvent constitué d’alcool, de piètres plans culs et de paninis mal cuits. Après, les choses changent. Entre 25 ans et la mort, seulement 15% des gens sont célibataires. Vous avez rencontré Julie à la crémaillère de votre pote Adrien, consultant, – qui vient d’emménager avec Justine – et à peine quelques mois après votre rencontre, vous voilà tous les deux en jogging en train de regarder la téloche un samedi soir avec un plateau de sushis, en lieu et place d’un apéro dînatoire chez un collègue qui passe parfois dans votre bureau pour vous dire « Salut, tu vas bien ? » Eh bien, sachez que c’est ça le bonheur. Pourquoi aller s’emmerder à une soirée où les gens portent des mocassins et parlent de RTT lorsque vous pouvez rester au chaud avec votre meuf et potentiellement terminer la soirée par une fellation de qualité sous la douche ?
À partir de 25 ans, on prend un soudain plaisir à téléphoner en voiture. Photo via Flickr CC.
AVOIR UNE RELATION EXTRACONJUGALE AVEC QUELQU’UN DE PLUS JEUNE
Si vos lundis et mardis soirs sont désormais réservés au temple du cinéma sur commande Netflix, travailler peut également pimenter votre vie en créant une faille spatio-temporelle en direction d’un truc lointain : votre jeunesse. Selon une enquête OpinionWay, 35 % des salariés d’Île-de-France seraient déjà « tombés amoureux » de quelqu’un au boulot. Cette même étude affirme que 44 % des salariés français ne seraient pas contre une petite « love story » au bureau. La vie est dure, mais vous êtes Français, et c’est comme ça : vous aussi rêvez de vous retrouver seul avec Sophie, la nouvelle assistante de prod’ qui vous envoie des messages sur Slack et dont le copain vient malencontreusement de partir un an en Chine pour un super job. Vous avez plus de 25 ans, vous pouvez donc devenir à votre tour cet infâme cadre supérieur amoureux de sa femme – qui est toujours là pour lui quand il en a besoin, souvent le lundi et le mardi devant Netflix, mais pas vraiment quand elle veut baiser – mais aussi ce charismatique et éternel « amoureux de toutes les femmes », surtout de celles figurant en dessous de lui dans l’organigramme de la société.
DÉMÉNAGER EN PROVINCE
Vieillir à Paris est impossible. À moins que vous ayez les moyens d’acheter 100 m2 – ou que vous soyez célibataire – vous allez forcément regarder ailleurs, et c’est tant mieux. Paris n’aura plus toute votre attention : trop chère, trop jeune et pas assez de droite. Après 25 ans, vous n’allez plus choisir votre logement en fonction de sa proximité avec des bars, mais plutôt en fonction des parcs, de l’origine sociale des gens et des places de parking. Vous allez donc chercher une ville qui corresponde à vos besoins : une ville prospère, belle, et sans cité HLM. Marseille se retrouve donc exclue. Lyon est trop « de gauche ». Lille est trop « Lille ». Il ne vous reste plus qu’à déménager à Bordeaux, comme 99,9 % des Parisiens. Sur les 10 000 nouveaux habitants bordelais en 2016, 70 % d’entre eux étaient Parisiens. Vous quittez donc Paris pour une ville plus calme, mais en gardant avec vous tous les Parisiens que vous détestiez. Vous allez pouvoir marcher le long des quais, pull sur les épaules, après avoir garé votre Renault au parking du musée. Vous pourriez même bricoler des trucs le week-end. Vous allez devenir votre père.
VIEILLIR ET L’ACCEPTER DOCILEMENT
Ce mot fait toujours peur. Vous imaginez tout de suite des personnes âgées sales, aigries, dépitées et bruyantes, ressassant sans cesse les mêmes vieilles histoires de guerre mondiale et désormais incapables d’appuyer sur une touche de télécommande pour diffuser leur série préférée où ne figurent – tiens, tiens – que des personnes tout aussi âgées. Vous avez un peu raison. Passé 25 ans, vous comprendrez toutefois que vieillir à deux est le truc le plus cool qui existe sur cette planète. C’est tellement mortel qu’il est impossible de trouver une étude qui atteste de ça. C’est juste que j’en suis persuadé, et que l’histoire rocambolesque de la vie de l’espèce humaine sur Terre le prouve également. Vous allez arrêter de cloper. Vous allez arrêter la pizza. Vous allez arrêter de rire. Vous allez arrêter de baiser. Et vous allez adorer.
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