Les vrais secrets de la fabrication des saucisses à hot-dog

La chair à saucisse intubée dans des boyaux de mouton

Parmi tous les petits bonheurs de la vie – un premier amour, de la neige le matin de Noël, une victoire en finale – rien n’est plus merveilleux que de manger un hot-dog danois. Enfin, surtout si vous êtes Danois. La recette du ristet med det hele, à savoir du hot-dog grillé agrémenté de toutes sortes de garnitures, n’importe quel Danois digne de ce nom peut la réciter comme le Notre-Père.

Mais ce qu’on ignore, c’est la composition exacte de ces saucisses qui reposent tranquillement dans de petits pains chauds bien dorés, baignés de rémoulade, d’oignons grillés et de concombre au vinaigre. Qui peut vraiment dire d’où vient sa pølse (saucisse)?

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Les morceaux de porc arrivent tout droit de l’abattoir

Le photographe Alastair Philip Wiper a eu l’occasion – rare – d’entrer dans l’usine Gøl à Svenstrup, pas loin de la ville d’Aalborg. Ici, on confectionne des saucisses depuis 1934. Dans ce projet photo, Alastair documente toutes les étapes de la fabrication, depuis la viande coupée et hachée jusqu’à la pulpe qui sera ensuite encore mixée avec des herbes avant d’être fumée sur du bois de hêtre dans l’un des plus grands fumoirs d’Europe. Chaque four peut contenir quatre-vingt-quatre grilles sur lesquelles peuvent tenir jusqu’à vingt-cinq tonnes de saucisses.

Les lames qui servent à hacher la viande sont régulièrement nettoyées et aiguisées

Aujourd’hui, c’est la compagnie Tulip qui possède Gøl, mais l’usine de Svenstrup fabrique toujours les saucisses vendues sous le nom de Gøl. Et beaucoup plus.

Des restes de salami colorés avec du carmin

Si l’on prend en compte toutes les différentes formes et les mélanges d’épices utilisés, l’usine fabrique plus que deux cents types de saucisses, de salamis, de pepperonis et autres charcuteries destinées à la fois à la vente au détail et à la restauration.

Les pepperonis en route pour être emballés
Les pepperonis fraîchement tranchés sur un tapis roulant

Oubliez un instant la cuisine nordique contemporaine. La culture alimentaire danoise, ainsi que le fast-food, se nourrit de cette viande de porc saucissonnée.

Les saucisses avant emballage

Pourtant, le Danemark n’a pas toujours été un grand consommateur de porc. Tulip, l’une des plus vieilles marques du pays (elle existe depuis 1909), a d’abord été affublée de ce nom pour mieux sonner néerlandais.

Le nettoyage des machines qui forment les saucisses1

La salle où les saucisses sont colorées au carmin (le liquide rouge au sol est le surplus de colorant)

« Au début du 20e siècle, on commençait à exporter du bacon et les Anglais en étaient les principaux consommateurs, explique Michael Ravn, le chef de la communication chez Tulip. Et à l’époque, le bacon néerlandais était considéré comme l’un des meilleurs. Tulip a pris ce nom pour profiter de cette réputation. Ça ressemble à du néerlandais ».

Les pepperonis en chemin vers la salle de maturation

Aujourd’hui, les marques Tulip et Gøl aimeraient bien sonner un peu plus danois, mais continuent d’adapter leurs produits au marché international : « Nos produits sont vendus partout dans le monde, du Groenland à Porto-Rico, m’explique Ravn. Et même si ce n’est pas évident de vendre du porc au Moyen-Orient, on exporte quand même aussi vers le Liban. »

Des pepperonis qui reposent dans la salle de maturation

Le marché de la saucisse à hot-dog était donc, dès l’origine, bourré de références culturelles et de prises de parti.

La saucisse rouge – qui doit sa couleur à sa peau colorée au carmin, un ingrédient qui donnait autrefois sa couleur rouge au Campari – est non seulement un symbole, mais aussi un ingrédient de base dans tous les stands à hot-dog du Danemark. Mais, bizarrement, elle se vend moins dans les pays voisins.

La chair de pepperoni avant d’être fourrée dans des tubes de boyaux

La Suède avait d’abord interdit les saucisses rouges par précaution en raison des colorants artificiels. Mais, depuis que les producteurs ont décidé d’utiliser un colorant naturel au milieu des années 90 et que les premiers ministres des deux pays ont trouvé un accord pour que tout le monde ait de la saucisse, les Suédois en sont devenus de plus en plus friands.

En Allemagne, aucune wurst ne saurait concurrencer la traditionnelle bratwurst.

Des intestins de porc servent de peau aux saucisses de Francfort

« Il y a quelques années, un test de goût a été réalisé en Allemagne. On proposait à des gens dans la rue de manger soit un morceau de saucisse de couleur rouge, soit un morceau de saucisse de couleur verte, raconte Michael. La plupart des Allemands ont préféré goûter la saucisse verte. Ça n’arriverait jamais au Danemark. Il faut donc s’adapter aux différences de chaque marché, même s’il s’agit du pays voisin. »

Au Danemark, les saucisses qui vont et viennent entre les fumoirs et les réfrigérateurs de l’usine de Svenstrup respectent toutes une recette bien précise. Les saucisses sont faites à base de porc et fourrées dans des intestins de mouton. Les saucisses rouges ne sont fumées que quelques minutes. Les saucisses de Francfort contiennent un peu de bœuf et sont fourrées dans des intestins de porc.

La salle de maturation où les saucisses se reposent et développent leurs parfums

Michael est fier des saucisses, des salamis et des tranches de pepperoni qui sortent de cette usine. Moins la farce est mixée, moins il est facile de cacher certains ingrédients. « Nous aimons montrer comment nos produits sont fabriqués afin de déboulonner certaines légendes urbaines qui persistent à propos de la fabrication des saucisses. Les producteurs ne peuvent pas cacher ce qu’ils mettent dans leurs saucisses. »

« Vous pouvez les goûter et le constater. On est fiers de nos saucisses! »