Manifestations et pancartes d'activistes en Belgique
Société

People of the Year : les activistes belges qui ont marqué 2019

2019 a été une année pourrie en termes d'injustices. Cela dit, sans ces 8 collectifs et personnalités, ça aurait pu être bien pire.
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Brussels, BE
JN
illustrations Juliane Noll

Cet article a été sponsorisé par Scarlet.

Notre série « PEOPLE OF THE YEAR » présente les belges qui nous (et peut-être vous) ont inspiré·es en 2019.

Qu’il s’agisse de droits LGBTQ+, de climat, de racisme ou encore de culture ou de féminisme, l’activisme s’est trouvé au coeur de notre contenu tout au long de l’année. En cette fin de 2019, on a tenté de faire le bilan sur tous ces mouvements, ces collectifs et ces personnes qui oeuvrent en faveur de combats importants, et qui se bougent pour que ce qui doit changer en Belgique change.

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Pelphine (29 ans), pour avoir dénoncé la grossophobie avec son projet Corpscools

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Corpscools est un projet militant qui parle des gros·ses, des normes et des corps. Le compte Instagram recueille des écrits, des photos et des travaux d’artistes afin de militer par la positive ; montrer les pensées alternatives, les solutions, améliorer la représentation des personnes grosses. Mais plus le projet avance, plus Pelphine, la créatrice, prend la parole en son nom. Comme elle l’explique sur son compte, les rares fois où les gros·ses apparaissent dans les médias, iels sont souvent représenté·es comme fainéant·es, sales, stupides, sur-sexualisées, méchant·es, ou encore tristes. Ces images se cristallisent dans l’inconscient collectif et créent les préjugés.

La grossophobie est une oppression systémique : elle impacte tous les aspects de la vie des personnes concernées : body-shaming et difficultés dans la sphère privée, mais aussi discriminations à l'embauche, écart de salaire, mauvaise prise en charge médicale, impossibilité d’accéder à la PMA (procréation médicalement assistée), harcèlement ordinaire dans l'espace public, difficultés voir impossibilités de s'habiller en magasin et à prix raisonnable, mobiliers et transports en commun inadaptés… Corpscools n’est pas un mouvement body-positive ; son message n’est pas : « aime ton corps », mais plutôt : « Peu importe ton corps, tu as le droit aux même chances, aux même droits et à la même bienveillance. » Et on avait besoin de le rappeler.

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L’action TransActie anti-transphobie, pour avoir ouvert le débat sur les dons de sang par la communauté LGBTQ+

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À gauche : résultat de la première action, menée dans la nuit du 10 au 11 juin à Gand. | À droite : la deuxième action, menée le 13 juin.

En mai dernier, la Croix-Rouge flamande avait annoncé que les personnes transgenres - soit toute personne qui aurait changé de genre sur sa carte d'identité - ne seraient plus autorisées à faire don de leur sang ou de leur plasma. Pris·es de colère face à cette décision discriminatoire, des activistes anonymes ont réagi en jetant du faux sang sur la vitre d’un centre de collecte de la Croix-Rouge à Gand en écrivant : « Voici notre sang que vous ne voulez pas. » En effet, changer légalement de genre ne signifie pas forcément prendre des hormones ni avoir des relations sexuelles à risque.

L’action n’était pas directement dirigée contre la Croix-Rouge, mais plutôt le Gouvernement flamand et les « déclarations homophobes et transphobes émises par les dirigeants de la N-VA et du Vlaams Belang », avait précisé le collectif. Suite à cette action, la Croix-Rouge flamande a réagi en spécifiant que les personnes transgenres sont en réalité soumises aux mêmes critères d'éligibilité que les autres donneur·ses. C’est donc uniquement l’évaluation du risque qui justifie un éventuel écartement au don de sang.

Depuis le 30 septembre, une personne transgenre ayant suivi un traitement hormonal est autorisée à donner son sang après un délai de trois mois. Cette action a également permis de rappeler que les hommes homosexuels doivent attendre douze mois après leur dernier rapport sexuel avant de pouvoir faire don de leur sang. Des conditions très strictes qui renforcent la stigmatisation envers la communauté LGBTQ+.

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Anne-Sarah N’Kuna (24 ans), pour avoir osé aborder le racisme de manière simple et efficace

Anne-Sarah est l’une des présentatrices de l’émission IZI News sur Tarmac, une série vidéo abordant différents sujets d’actualité et de société, allant de la télé-réalité aux paramètres Instagram en passant par le racisme. Femme engagée, elle se sert de la plateforme pour éveiller les esprits des plus jeunes. Après avoir couvert la question des privilèges ou encore de l’appropriation culturelle, elle a récemment pris la parole sur l’affaire du contrôleur de train de la SNCB qui avait invité un passager à « rentrer à Kinshasa ». La scène avait été filmée par un·e passager·e et avait suscité l’indignation générale.

Au delà des sujets qu’elle aborde, c’est surtout l’approche no-bullshit d’Anne-Sarah, son sens de l’humour et son sarcasme qui font toute la différence. Elle tape dans le mille ; et c’est pas pour rien si on l’avait invitée à s’exprimer sur le racisme et la diversité dans notre série DIVERSIDEAS.


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Collecti.e.f 8 maars, pour avoir fédéré les femmes autour d’un combat commun et lui avoir amené une dimension intersectionnelle

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Le Collecti.e.f 8 maars lors de la marche du 8 mars 2019.

À l’occasion de la 42e Journée internationale pour les droits des femmes, le Collecti.e.f 8 maars et la Marche Mondiale des Femmes ont joint leurs forces afin d’organiser la première grève nationale des femmes en Belgique le 8 mars avec le message suivant : « Quand les femmes s’arrêtent, le monde s’arrête. » Le Collecti.e.f 8 maars oeuvre en faveur de l’engagement social intersectionnel et rassemble toutes les femmes et celles qui s’identifient comme telle pour prôner la reconnaissance du travail des femmes dans la sphère professionnelle et privée.

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Voici sur quelques-unes de leurs revendications : la reconnaissance de l’importance primordiale du travail reproductif pour la société, la solidarité envers toutes les luttes contre l’exploitation et pour l’émancipation des femmes partout dans le monde. Elles appellent à une éducation à la vie intime qui inclut la diversité, le consentement, la connaissance et le respect de soi. Elles rejettent des discriminations structurelles et combattent les violences faites à toutes les femmes, qu’elles soient sans-papiers, sans logement, exilées, non-valides, musulmanes, juives, travailleuses du sexe, et peu importe leur identité et orientation sexuelle.

Il faut savoir que la date du 8 mars évoque notamment les suffragettes — mouvement du début du siècle dernier, ayant lutté en faveur des droits des femmes — qui se ne se voulait pas intersectionnel du tout à l’époque. Avec leurs revendications et leur grève générale, le Collecti.e.f 8 Maars a non seulement rassemblé pas moins de 10 000 personnes dans les rues de Bruxelles, mais aussi amené une nouvelle dimension intersectionnelle à cette date symbolique.

Youth for Climate et Extinction Rebellion, parce ce n’est pas sur Facebook qu’on va défendre nos droits environnementaux

Depuis le début de l’année, Youth for Climate se bat pour le climat et tente de faire entendre sa voix à travers l’Europe. Les étudiant·es sèchent des cours pour participer aux manifs qui ont eu lieu dans les différentes villes en Belgique et ailleurs. Ici, c’est Anuna De Wever (18 ans) et Adélaïde Charlier (18 ans) qui mènent la danse. Comme on vous l’a montré dans notre docu Make the World Greta Again, nos Greta Thunberg nationales travaillent de près avec les autres organisateur·ices du mouvement à l’étranger. Les différents groupes se lient et coordonnent les projets ensemble, ce qui leur permet d’augmenter l’impact de leurs initiatives collectives. La suite : ne reculer devant rien pour défendre notre avenir face aux gouvernements et aux dirigeant·es européen·nes.

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Extinction Rebellion est un autre mouvement international, moins focalisé sur les jeunes, mais tout aussi engagé dans la cause climatique. Bien qu'il soutienne une révolte pacifique, des manifestant·es ont été confronté·es à des violences policières lors de leur dernière manif à Bruxelles en octobre dernier. Plus de 400 personnes ont été arrêtées et traitées de manière déplorable. Leur vision s'étend au-delà de la durée de leur propre existence, en se souciant pour les générations futures et pour la restauration de l’équilibre de la planète. Ce 20 décembre, iels fêtent leur premier anniversaire en Belgique et constitueront alors la « deuxième déclaration de Rébellion » sur la Grand Place de Bruxelles. Malgré l'interdiction de l'action posée par Philippe Close, le bourgmestre de Bruxelles, XR maintient la mission de rassembler. le plus de monde possible. La bataille n'est pas encore terminée.

State of the Arts, pour avoir défendu les artistes belges

State of the Arts (SOTA) est une plateforme ouverte et gérée par des artistes et divers acteur·ices du secteur qui se préoccupent de l’art en Belgique. Au lieu d’avoir un·e seul·e porte-parole ou représentant·e, une voix est accordée à tous les personnes qui travaillent sur la plateforme. Depuis 2014 déjà, cette organisation lutte contre les économies que la politique ne cesse d’essayer d’imposer au secteur culturel.

Cette année, le ministre de la Culture Jan Jambon (N-VA) a annoncé son plan de réduire fortement les subventions au secteur culturel. La réaction fut immédiate pour SOTA, pour qui il était hors de question de rester là sans rien faire. Fin novembre, ses activistes sont descendu·es les rues pour défendre le secteur artistique. Même s'il y a eu des contrecoups, SOTA n'a pas pu être réduite au silence. Iels continuent de mener des campagnes et ne lâchent pas le steak.

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Dalilla Hermans (33 ans), pour avoir, à travers sa plateforme, donné une voix aux jeunes dans la lutte contre le racisme

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À droite, « Black-out », le dernier livre de Dalilla Hermans (Photo : Assia Missaoui).

Dalilla est une journaliste qui s'est donnée pour mission d’ouvrir le dialogue sur racisme et la discrimination. Elle s’est fait connaître en 2014 avec une lettre ouverte dans laquelle elle a soulevé la problématique du racisme et avait écrit : « On a ouvert la fosse à merde et ça vole dans tous les sens ». Cette fosse à merde, elle la maintient ouverte et met désormais sa voix et sa plateforme au service de la cause. Parce que le racisme est un problème sociétal important, et qui s’aggrave quand on l’ignore, elle prône le principe du « See something? Say something! ». Sur son profil Facebook, elle partage les histoires de jeunes qui ont été traité·es injustement à cause de leur origine, comme celle de la jeune fille de 17 ans qu’un couple de personnes âgées a poussée de son vélo à Gand avant de la traiter de « putain de nègre ».

Dalilla a également sa propre chronique bimensuelle dans De Standaard où elle publie régulièrement des articles à ce sujet. En 2017, elle a été nommée « femme la plus googlée du pays ». Cette année, elle a publié avec fierté son troisième ouvrage, une fiction pour adultes appelé « Black-out ». Le livre parle d’une militante noire assassinée par un troll, passé des menaces en ligne à l’action.

Shout-out également à Laisse les Filles Tranquilles pour ne pas lâcher l’affaire et continuer rendre nos rues plus sûres ; à Collages Féminicide Bruxelles pour avoir attiré l’attention sur un problème encore tu jusqu’ici ; à Niemand is Illegaal et BXL Refugees pour militer en faveur des droits des réfugié·es, à NewB pour avoir levé plus de 35 millions d'euros dans l'objectif de créer la première banque belge entièrement éthique et durable, et à tou·tes les autres qui se battent pour une Belgique meilleure.

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Lire aussi : People of the Year : les photographes belges qui ont marqué 2019.

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