« Robinson, quand le naufrage est là, il ne se prend pas les mains dans la tête en essayant de faire une grande théorie du naufrage. Il va dans la cale, il prend du fromage, du jambon, et il en a lui cette capacité à réinventer une histoire unique »
C’est le genre de phrase prononcée par Macron hier concernant le plan de relance du secteur de la culture qui a interpellé pas mal de monde sur Internet, beaucoup se demandant si le Président n’avait pas un peu forcé sur la poudre blanche. Et même si sa consommation (ou non) de cocaïne ne regarde après tout que lui, il faut dire qu’après le coup de la photo avec Jul en janvier dernier, cette fois Macron a fait assez fort. Cheveux ébouriffés, paroles incohérentes, son discours a ressemblé à celui d’un DA en after avec des projets plein les yeux :
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« Toute la nation pourra pas vivre ses vacances comme d’habitude. On doit en faire un été apprenant et culturel. Et donc là aussi on pourra pas faire les festivals on le sait bien […] Mais rien ne nous interdit d’inventer autre chose. Dans des formes plus petites avec pas de public ou moins de public avec des groupes différents, mais avec des jeunes par… je veux dire, rien n’empêchera à mon avis, sauf si vraiment ça repart complètement et alors ça on le saura début juin, […] mais on vous accompagne financièrement pour pouvoir le faire pour qu’il y ait des jeunes qui puissent venir par 15 assister à une répétition. On va changer leur vie si on arrive à faire ça. »
Mais au-delà du caractère memesque de la prestation, la part apparente d’improvisation souligne surtout le côté amateur du plan de culture de Macron et de son gouvernement. De là, on peut en déduire deux choses. Soit ce dernier est effectivement largué en ce qui concerne le dossier, et les prestations de Franck Riester se désolant hier soir au 20h de France 2 de l’annulation du festival d’Avignon quant à l’impact sur les commerçants locaux, ou encore sa désormais sortie culte sur les « festivals de jardin » accréditent cette thèse. Soit on a affaire encore à une bonne vieille stratégie de communication de la part de notre Président-roi des communicants (on se souvient de son sample de Chirac en Israël), qui s’adresse au secteur de la culture comme on parlerait à des troubadours, ses cheveux aux vents lui donnant sûrement un petit air bohème. Dans les deux cas, c’est au moins un peu préoccupant pour la suite.
Surtout, les zones d’ombre de ces effets d’annonce n’en apparaissent que toujours plus apparentes : si les régimes de l’intermittence sont prolongés jusqu’en août 2021, on ne sait pas si le Président parle du renouvellement des dates d’anniversaire entre maintenant et l’année prochaine, ou simplement de prolongation des droits jusqu’à l’année prochaine – ce qui n’est pas tout à fait la même chose. Le silence est également fait sur les contrats courts, les travailleurs intérimaires et saisonniers, ou encore payés en honoraire. Enfin, la proposition de mobiliser les artistes pour remplacer les animateurs de colo ou placer les intermittents sur le temps périscolaire dans les écoles pour faire leurs heures a bien fait rire tout le monde :
Si cette situation souligne certains particularismes français en la matière (l’Allemagne par exemple a déboursé près de 50 milliards pour la culture mais ne bénéficie pas du régime de l’intermittence par exemple), on peut légitimement se demander, comme toujours avec ce gouvernement dont l’expertise semble être avant tout la communication, si le New Deal culturel annoncé n’est pas cette fameuse « poudre de perlimpinpin » jetée aux yeux d’un secteur à l’aboi.
Marc-Aurèle Baly est vaguement sur Twitter.
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