Clubhouse est une application audio réservée aux élites. Lancée aux États-Unis au printemps 2020, elle a d’abord attiré les investisseurs en capital-risque et les célébrités de la Silicon Valley qui lui ont conféré son caractère exclusif. Le réseau social est divisé en différents chats où les gens s’expriment à tour de rôle dans des conversations de type podcast. Certains utilisateurs organisent régulièrement des émissions auxquelles participent des milliers de personnes, mais il est également possible de simplement les écouter – à condition de pouvoir rejoindre le réseau.
S’inscrire à la plateforme n’est pas aussi simple qu’avec les autres réseaux sociaux – il faut une invitation et un appareil fonctionnant sous iOS. Akash Bajwa, analyste chez Augmentum Fintech, a déclaré à Sifted que la société mère de Clubhouse, Alpha Exploration, se concentre actuellement sur l’élargissement de la base d’utilisateurs de l’application en Europe – en particulier au Royaume-Uni et en Allemagne – grâce à un système d’invitations stratégiques. Et cela semble fonctionner : en Allemagne, Clubhouse a été l’application la plus téléchargée entre le 18 et le 24 janvier 2021. Selon Andrew Chen, un associé de la société d’investissement Andreessen Horowitz qui a participé au développement de l’application, Clubhouse a déjà atteint environ 2 millions d’utilisateurs.
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L’application simule la structure des conversations que vous pourriez avoir lors d’une fête : vous rejoignez un chat, vous écoutez, vous parlez, puis la discussion se termine dès que tout le monde est parti. Selon le New York Times, les personnes d’influence qui se sont déjà fait un nom sur la plateforme ne sont pas celles auxquelles on s’attendrait – beaucoup d’entre elles ont la quarantaine ou la cinquantaine. Une utilisatrice explique que l’application l’aide à se constituer un réseau maintenant qu’il n’y a plus de conférences professionnelles en raison du Covid.
« Le réseau Clubhouse est pour tout le monde, peut-on lire sur le site de la société. Il n’est pas destiné à être exclusif. » Son modèle basé sur l’invitation permettrait de « développer les communautés lentement » plutôt que du jour au lendemain, et de nouvelles fonctionnalités doivent encore être développées pour accueillir davantage d’utilisateurs. En attendant, les candidats se retrouvent à quémander une invitation sur Twitter, certains utilisateurs allant même jusqu’à vendre leur adhésion pour plus de 100 euros sur eBay.
Depuis son lancement, l’application a déjà connu quelques controverses. Les utilisateurs se sont plaints du manque de modération qui, selon eux, décourage les femmes et les minorités de dénoncer les discours de haine. Comme Vanity Fair l’a écrit dans un article de décembre 2020, « Clubhouse est devenu un refuge pour les puissants qui flirtent avec la misogynie et le racisme », car la nature uniquement audio et transitoire des chats permet aux utilisateurs de soulever des questions « pseudo-intellectuelles » sur la race et le sexe sans laisser de trace. L’application dispose d’un mécanisme permettant de signaler les discours de haine, mais les utilisateurs affirment que la politique de sanction de la plateforme est obscure et peu efficace.
L’application a déjà posé quelques problèmes de sécurité. Lors de l’inscription, Clubhouse demande aux utilisateurs de fournir leur numéro de téléphone ainsi que l’accès à l’ensemble de leur liste de contacts afin de pouvoir inviter d’autres personnes à l’avenir. Cela signifie que tous vos contacts sont enregistrés et stockés sur des serveurs aux États-Unis. Cela signifie également que l’application crée des « profils fantômes » de vos proches qui ne sont pas sur l’application. D’autres applications comme WhatsApp et Telegram le font également. Selon de nombreux experts de la protection de la vie privée, l’application pourrait être en infraction avec le règlement général de l’UE sur la protection des données.
Les discussions audio au sein de l’application sont censées disparaître une fois que tout le monde a quitté le chat. Mais la politique de confidentialité de l’entreprise indique que les conversations ne sont supprimées que si aucun utilisateur n’a signalé de « violation de la confiance et de la sécurité ». En cas d’incident, Clubhouse conserve l’audio jusqu’à ce que « l’enquête soit terminée » et se réserve le droit de le partager avec les autorités si nécessaire.
Bien que l’application offre des possibilités intéressantes pour les créateurs audio, elle semble pour l’instant s’adresser à ceux qui privilégient la liberté d’expression au détriment du respect et de l’inclusion. De plus, elle exclut actuellement les utilisateurs qui n’occupent pas des postes élevés. Pas sûr que cela vaille la peine de dépenser 100 euros.
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