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FRANCE

Quatre morts lors d’une fusillade dans un camp de gens du voyage du nord de la France

Un homme de 73 ans, ivre, a tué avec un fusil de chasse un nourrisson de six mois, la mère et le grand-père de l’enfant, ainsi qu’un gendarme qui intervenait sur les lieux.
Pierre Longeray
Paris, FR
Hôtel de Ville de Roye, Picardie (Photo via Wikimedia Commons / Mark Roussel)

Quatre personnes ont été tuées, ce mardi après-midi, lors d'une fusillade dans un camp occupé par des gens du voyage, à Roye dans le nord de la France (Picardie). Armé d'un fusil de chasse, l'assaillant est un homme de 73 ans, qui avait « 2,28g d'alcool dans le sang, » d'après le procureur de la République d'Amiens qui s'exprimait ce mercredi après-midi lors d'une conférence de presse.

Un nourrisson de 6 mois, sa mère âgée 19 ans, le grand-père de l'enfant ainsi qu'un gendarme présent pour intervenir sur les lieux sont les victimes du drame. Un enfant de 3 ans — le frère du nourrisson décédé — et un autre gendarme ont été blessés. Ils ont tout deux été hospitalisés ce mardi soir, mais leurs jours ne sont plus en danger. Le gendarme a pu sortir de l'hôpital ce mercredi après-midi, alors que l'enfant était encore en état stationnaire selon le procureur.

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L'assaillant avait lui aussi été transporté au Centre hospitalier universitaire d'Amiens. Les forces de l'ordre avaient été contraintes de lui tirer dans les jambes pour mettre fin à la fusillade. Son état de santé a été qualifié de « stable » ce mercredi matin. L'homme a été placé en garde à vue sur les coups de 10 heures du matin.

Depuis le début de sa garde à vue, le suspect a « refusé de parler » a précisé Bernard Farret, procureur de la République d'Amiens, lors d'une conférence de presse tenue à 16 heures 30, ce mercredi. Farret a ensuite déclaré que le suspect « n'est pas ancien forain et ne fait pas partie de la communauté des gens du voyage, » contrairement à ce qui avait été annoncé précédemment.

Quant à l'arme utilisée, Farret a expliqué que le suspect avait tiré une trentaine de coups de feu et qu'il n'avait « pas besoin d'une autorisation de détention d'arme, il a utilisé un fusil de chasse. » Enfin, le procureur a assuré qu'il n'y avait pas de liens de parenté entre le suspect et les victimes.

Les motifs de l'agression sont encore flous, mais le procureur avait précisé avant sa conférence de presse, qu'on ne pouvait pas « parler d'un règlement de comptes mais d'une agression par un individu sur une famille. » Le maire de Roye, Jacques Fleury, a déclaré au Courrier Picard que le suspect avait sans doute « pété les plombs, » ajoutant que les rapports de l'assaillant avec la famille assassinée n'étaient « apparemment pas bons. »

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Bernard Cazeneuve, le ministre de l'Intérieur français, est allé rencontrer les familles des victimes au CHU, vers 22 heures, ce mardi soir. Cazeneuve a aussi rendu hommage au gendarme tué en opération, « J'ai tenu à aller à Amiens parce qu'un gendarme très valeureux, plein de bravoure, qui s'est interposé, a perdu la vie, » expliquait le ministre.

Le président de la République français, François Hollande, et son Premier ministre, Manuel Valls, ont aussi rendu hommage aux victimes sur Twitter.

Horreur et immense tristesse face au drame de Roye. Mes pensées vont aux familles, aux victimes et au gendarme abattu en servant la France.

— Manuel Valls (@manuelvalls)August 25, 2015

Le camp, où résident les gens du voyage, était en maintenance au moment des faits. C'est juste devant celui-ci que s'est déroulé le drame. 5 caravanes y étaient stationnées en attendant la fin des travaux. Il s'agit d'un camp très calme, d'après l'adjoint au maire de Roye, qui déclare au Courrier Picard, « Si ça avait été tendu, on l'aurait su. » La préfecture note que l'aire accueille « une quarantaine de gens du voyage semi-sédentarisés qui y vivent depuis plusieurs années dans des caravanes, » et dont les enfants sont scolarisés à Roye.

Le statut des gens du voyage en France

Le terme de « gens du voyage » fait référence à une catégorie administrative, créée en France en 1969, pour désigner les populations, de nationalité française qui résident habituellement en abri mobile terrestre (caravane, mobile-home). Ils seraient entre 400 000 et 500 000 en France. Un tiers d'entre eux sont itinérants, un autre tiers semi-sédentaires et le dernier tiers sédentaires, mais ils voyagent pendant l'été. Cette appellation avait permis à l'époque de se ne plus utiliser le terme de « nomade ».

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Il arrive que les termes de Roms, Tsiganes et gens du voyage soient utilisés de manière indistincte. Pourtant, ces appellations ne font pas référence aux mêmes communautés. Les Roms (qui signifie « Hommes » en romanès) sont une branche du peuple tsigane, qui s'était implantée en Europe centrale et dont certains membres ont immigré récemment en Europe occidentale. En 1971, l'Union romani internationale avait décidé de se passer du terme tsigane, jugé péjoratif, pour lui préférer le terme « Rom ». Ils seraient environ 20 000 en France et ne rentrent pas dans la catégorie des gens du voyage. Juridiquement, il s'agit de ressortissants de l'Union européenne, puisqu'ils viennent pour la plupart de Roumanie et de Bulgarie.

Jusqu'en juin dernier, les gens du voyage devaient avoir un « livret de circulation ». Il s'agissait d'un document obligatoire pour toutes les personnes de plus de 16 ans, vivant en France, étrangère ou non, qui n'ont pas de résidence fixe depuis plus de 6 mois. Le 10 juin dernier, l'Assemblée nationale avait supprimé celui-ci. L'ancêtre de ce livret — le « carnet de circulation » — imposaient des règles strictes : il devait être tamponné tous les 3 mois par la police et comportait des informations sur la couleur du teint et la corpulence de son titulaire.

Les gens du voyage disposent des mêmes droits que les autres Français concernant le droit de vote depuis un jugement du Conseil constitutionnel d'octobre 2012. Ils doivent simplement justifier d'un rattachement à une commune ininterrompu de six mois. Auparavant, la loi française exigeait 3 ans de rattachement.

Suivez Pierre Longeray sur Twitter : @PLongeray 

Hôtel de Ville de Roye, Picardie (Photo via Wikimedia Commons / Mark Roussel)