FYI.

This story is over 5 years old.

société

Avec les vétérinaires de rue qui soignent gratuitement les chiens des sans-abri

Sam Joseph et Jade Statt écument les rues de Londres pour prodiguer des soins à d’adorables petites boules de poils.
Photo : Minni Karttunen

Andy Hutchins m'explique qu'il doit sa vie à son chien, et je n'ai aucun mal à le croire. Cet ancien héroïnomane s'est battu avec son addiction pendant 15 ans – une période durant laquelle il est allé jusqu'à voler pour financer sa consommation. C'est en 2011 qu'il a acheté Bailey, un petit chiot de trois semaines, après être sorti de prison. « Il m'a coûté 12 £, et je n'ai plus jamais touché d'héroïne depuis, me raconte Andy. Tous les jours, il me sauve la vie. Au réveil, je pense à la drogue. Mais il me suffit de le promener pendant dix minutes pour que ça me sorte complètement de l'esprit. » Alors que les coupes budgétaires des aides sociales continuent de faire augmenter le nombre de sans-abri, des études ont montré un fait qui paraît indéniable : les chiens peuvent sauver la vie de certains SDF, et profiter à la santé de ces personnes souvent touchées par des problèmes de santé mentale et physique. En partant de ce constat, Sam Joseph et Jade Statt ont lancé StreetVet – la première association britannique à but non lucratif permettant de soigner des chiens de sans-abri. Hutchins m'explique qu'il n'aurait jamais eu de quoi se payer les soins d'un vétérinaire qualifié, même avant la réduction de ses aides sociales. « Rien qu'un scanner coûte 36 £, déplore-t-il. Je n'arrête pas de me demander ce que je ferai si je n'avais plus de quoi le nourrir. »

Publicité

George, star du livre John and George: The Dog Who Changed My Life, est l'un des derniers patients de StreetVet. Photo : Robert Trafford

Aujourd'hui, StreetVet opère dans six endroits différents de la ville de Londres – 50 bénévoles se sont associés à eux, et 100 autres ont été missionnés pour étendre leur champ d'action au reste du pays. « De nombreuses personnes se sont portées volontaires, déclare Statt. Nous avons tous déjà vu un chien auquel nous aurions aimé venir en aide. » Un sentiment également partagé par Joseph : « Dans le milieu vétérinaire, on croise souvent des animaux dont les propriétaires sont très aisés. Ils sont souvent en forme, et bien qu'ils aient parfois besoin de notre aide, certains cas sont bien plus désespérés. » Les membres de StreetVet se connectent avec leurs patients grâce à deux œuvres de charité : Streets Kitchen et la Refugee Community Kitchen. Alors que je me promène avec Joseph près du Hackney Town Hall, je croise Hutchins. Bailey se fait offrir un petit manteau flambant neuf, ainsi que l'équivalent de deux semaines de nourriture. « Les gens que nous aidons ne sont pas vraiment différents de moi », m'explique Joseph. Il se décrit comme un « gentil mec de classe moyenne », et concède avoir été très naïf avant d'entamer ce projet. « Ça m'a vraiment ouvert les yeux, et c'était aussi une leçon d'humilité. J'ai compris que ces gens se retrouvaient dans cette situation à cause d'une mauvaise décision ou un coup de malchance, et que ça pourrait très bien m'arriver aussi. »


Vidéo associée : La musique par les chiens, pour les chiens

Publicité

Cette petite vérité s'est confirmée le mois dernier, quand Statt a rencontré Dean Coleman – un ancien ingénieur dans une exploitation de gaz qui dormait dans sa voiture avec son chien, Huni. Coleman, 35 ans, venait de traverser une « mauvaise passe ». Après une rupture, il a sombré dans la dépression et a tenté de bosser le moins possible, effrayé à l'idée de blesser quelqu'un dans le cadre de son travail. « Dans ce milieu, les risques sont énormes, m'explique-t-il. Quelqu'un peut facilement perdre la vie. » À cause de son manque de revenus, il a enchaîné les loyers impayés, mais sa propriétaire a été relativement patiente avec lui. « Elle a été très compréhensive au cours des premiers mois, mais j'ai fini par recevoir une lettre. » En septembre dernier, il a été contraint de quitter son appartement et a commencé à dormir dans sa voiture. Ses seules possessions étaient une valise, et son chien Huni. « Les gens disent souvent que n'importe qui peut perdre sa maison. Dean en est le parfait exemple, me raconte Statt, qui était auparavant la directrice de Vetlife. J'ai aussi souffert par le passé, et si je n'avais pas eu le soutien de ma famille, ça aurait très bien pu m'arriver. J'avais vraiment envie de l'aider. » Touchée par la relation entre Coleman et son chien, Statt a profité des contacts qu'elle s'était faits dans l'année, depuis le jour où elle avait commencé à écumer les rues avec son sac à dos et son stéthoscope. Elle a réussi à leur trouver un foyer en l'espace de 24 heures. Coleman décrit ce moment comme « la fin d'un conte de fées », visiblement toujours enchanté d'avoir trouvé de l'aide après une période aussi difficile. « J'ai vécu mes pires moments, et je sais que je m'en remettrai », affirme-t-il. Depuis qu'il a emménagé dans son nouvel appartement, Coleman fait du bénévolat en attendant de retrouver un travail dans son domaine. « Je ne pensais pas pouvoir un jour me trouver dans une telle situation, mais je suis en quelque sorte content que ce soit arrivé. Ça a complètement changé ma vision de la vie. »

Publicité

Jade rend visite à Dean et Huni dans leur nouvel appartement. Photo : Robin Trow

Quelques semaines plus tôt, Coleman avait vu Statt sur la chaîne YouTube Do Something for Nothing, fondée par le barbier Josh Coombes. « J'étais loin de m'imaginer que je la rencontrerai et qu'elle me sauverait la vie », déclare-t-il.

Statt me parle de sa rencontre avec Coombes comme d'un « catalyseur » – et il est facile de voir les similitudes qui existent entre son projet de solidarité et celui de StreetVet.

« Ces gens ont souvent l'impression de perdre le contrôle de leur vie, décrit Joseph. Mais s'ils comprennent qu'ils peuvent s'occuper d'un animal et le rendre heureux, ça leur donne une valeur – et ce constat peut leur permettre de rebondir. Notre vraie valeur réside dans le fait que nous aidons des gens qui ont bien plus de soucis qu'une personne lambda. »

Robert Trafford est sur Twitter.